Média : Norah
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"Ready to lose my feet,
Take me on to the place where one reviews life's mystery."
Je suis prête à perdre pieds
Que ça m'emmène à l'endroit où l'on examine le mystère de la vie.
Catch and release, Matt Simons
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Norah entendait des bips sonores tout autour d'elle, ainsi que des voix se mélangeant dans sa tête. Elle ne comprenait souvent pas grand-chose à ce qu'elles disaient, souvent à cause du vocabulaire médical utilisé et du sang qui pulsait contre ses tempes.
C'était ce bruit qui éclipsait tous les autres, battant à un rythme régulier, celui de son coeur. Norah avait essayé plusieurs fois d'ouvrir les yeux ou de bouger les mains pour enlever le masque posé sur son visage ou l'aiguille qui lui démangeait l'avant-bras.
Mais, à chaque fois, elle en avait été incapable. Alors, après quelques minutes (ou heures, le temps lui était complètement étranger) de combat avec ses paupières, elle abandonnait, épuisée.
Parfois, Norah s'élevait dans les airs au-dessus de son corps et se regardait. Son corps couvert de blessures, de sang. Son visage méconnaissable à la peau blafarde et aux immenses cernes violacées. Pourtant, elle était étrangement détachée.
Quand elle était en dehors de son corps, plus rien ne la touchait, elle se sentait emplie d'une plénitude inhabituelle. Elle voyait parfois son corps se tordre de douleur, pourtant, Norah ne ressentait rien. Son visage restait calme et stoïque.
Parfois, Norah redescendait dans son corps, mais ne restait pas dans la pièce.
La première fois qu'elle était arrivée dans cette autre dimension de son esprit, ou ce qu'elle croyait être une autre dimension de son esprit, elle avait été aveuglée par une immense lumière blanche.
C'était un blanc plus que lumineux, un blanc d'une pureté incroyable, plus blanc que tout ce qu'elle avait vu auparavant. Elle avait avancé dans un tunnel qui s'était matérialisé autour d'elle, censé la mener à la lumière blanche.
À côté d'elle, à chaque fois se trouvait deux petites filles, qui souvent lui prenaient les mains.
Sa marche dans ce tunnel pouvait durer assez longtemps. Lors de ces visites dans ces dimensions, qu'elle avait dénombrées au nombre de trois, Norah n'avait atteint la lumière blanche qu'une seule fois.
Quand elle était entrée dans cet espace d'un blanc lumineux, Norah avait senti une étrange plénitude se développer dans son corps. Un sentiment de bonheur tellement grand qu'il lui coupait presque la respiration.
Norah, à l'instant où ce sentiment d'extase l'avait envahi, avait su qu'elle n'était pas seule. Son esprit semblait s'être relié à d'autres, d'une manière naturelle. Des esprits qui lui envoyaient du calme, du bonheur, une sensation d'amour bien au-delà de ce que Norah n'avait jamais ressenti en tant qu'humaine.
Elle baignait dans cette lumière blanche, dans ce bonheur permanent, quand un visage était apparu. Un visage aux traits flous, que Norah n'avait pas reconnu, mais qui lui semblait sombre, beaucoup plus sombre que le blanc qui l'entourait.
Ce visage l'avait regardée, avait semblait vouloir la toucher, mais Norah avait hoché négativement la tête en s'écartant. Le visage lui avait alors adressé un sourire étrange, qui avait fait froncer les sourcils à Norah dans ce monde de plénitude.
Elle s'était alors retrouvée dans une salle d'opération. Des chirurgiens se parlaient entre eux, il y avait beaucoup de bruits. Norah sentait comme un vide au fond de sa poitrine, maintenant que la lumière avait disparue.
Les médecins lui cachant la vue sur l'opération qu'ils menaient, elle s'était retournée et avait marché en direction des portes de la salle d'opération. Elles s'étaient ouvertes dans une salle aux murs blancs. Il y avait d'autres enfants qui jouaient.
Norah les avait observés un moment avant que son regard ne tombe sur un adolescent assis sur une chaise en plastique de l'hôpital.
Norah s'était approchée et avait posé une main sur son épaule. Le garçon s'était retourné. Norah l'avait reconnu immédiatement : Victor.
La jeune fille avait penché la tête sur le côté, sans comprendre sa présence ici. Le garçon lui avait souri avec beaucoup de bienveillance, un sourire d'extase. Norah avait demandé :
— Tu vas bien ?
Les autres enfants s'étaient évanouis, il ne restait que Victor et elle. Sa voix avait résonné étrangement fort dans le silence bienheureux qui les entourait. Le garçon lui avait souri de nouveau, de son regard comblé.
— Je vais plus que bien, lui avait-il assuré. J'ai réussi à libérer mon samsara. J'ai atteint l'Éveil.
Norah l'avait regardé, sans comprendre, pendant que son corps se faisait aspirer par la lumière blanche, jusqu'à ce qu'il disparaisse complètement. La jeune fille s'était alors retrouvée de nouveau dans la salle de jeux des enfants.
Il semblait que rien n'avait changé.
Norah leur avait tourné le dos et était retourné dans la salle d'opération. Elle s'était approchée des chirurgiens et soudain, un d'eux s'était déplacé pour lui permettre de voir le patient. Norah avait alors compris que c'était elle, la blessée allongée sur ce brancard. Une douleur intense s'était propagée dans sa poitrine et elle avait dû appuyer ses mains sur son torse en essayant de faire partir cette douleur.
Et puis, tout à coup, elle s'était réveillée de nouveau sur son lit d'hôpital. Les bips avaient redémarré, les voix criaient de nouveau dans ses oreilles, le sang pulsait contre son oreille. Le sentiment d'exaltation total semblait avoir disparu.
Puis, au prix d'un incroyable effort de concentration, Norah avait réussi à faire bouger son doigt. Depuis, la jeune fille pensait à sa mère.
Norah se demandait si elle devait se battre pour elle ou se laisser aller pour rejoindre le nirvana de Victor.
J'imagine que je ne pouvais pas parler autant de décès dans la Traque, sans aborder cette partie, celle de l'après-mort.
Je ne sais pas vraiment si je crois au paradis et à tout ça (je crois cependant à la notion de "karma" où l'on paye un jour ses actions (bonnes ou mauvaises d'ailleurs)). Je pense néanmoins que la complexité de l'esprit humain et du monde qui nous entoure est trop riche pour que tout s'arrête après une espérance de vie tout à fait minime face à celle de notre planète.
Je ne sais pas si je suis claire, mais en tout cas, pour moi, il n'y a pas un "rien éternel" (concepts tous deux subjectifs) après notre corps.
Mon but n'est pas de partir sur un débat philosophique, cette expérience du coma que je relate est réelle, elle est inspirée de témoignage (je vous invite à vous renseigner, c'est assez passionnant comme sujet).
Après, je suis toujours intéressée d'avoir des avis à propos de cela. Alors, vous croyez à la vie après la mort (ou à une sorte de vie) ? A la réincarnation ? Ou à autre chose ?
Sur cette très heureuse conclusion, fort positive et peu morbide de surcroît, je vous souhaite une bonne lecture pour les prochains chapitres (que j'espère que vous lirez si la Traque vous plaît toujours).
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La Traque - Rouge sang
Teen FictionDeux équipes. Un combat à mort. A la clé, un souhait qui réalisera leurs plus grands désirs. Mais à quel prix ? Quand Louise, dix-sept ans, apprend que son petit-ami n'était chargé en vérité que de la recruter pour un jeu cruel auquel elle est oblig...