Chapitre 42

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Je fixe le plafond, regardant la lumière du jour jouer à travers mes rideaux. Mon sommeil a été difficile, ponctué d'insomnies et de cauchemars où je revivais la scène, encore et encore. Il y a une telle tempête sous mon crâne que ça en est étourdissant. Ma poitrine me fait souffrir. L'air me manque en permanence. Christian. Il m'a laissé frôler mon doux rêve, avant de m'en expulser avec violence. Et cette lueur dans son regard, ce regret si terrible à accepter. J'aurais dû le savoir. J'aurais dû m'y préparer. Ça ne pouvait pas en être autrement. Mais je ne suis pas triste, non. Je suis en colère. En colère contre lui, pour avoir réveillé de vieilles blessures. Et contre moi, pour m'être laissée avoir encore une fois.

Alors j'ai fait la chose la plus stupide qu'il soit. Je sais. Je me suis jetée dans les bras d'un autre pour l'oublier. Mais que pouvais-je faire d'autres ? le supplier ? broyer du noir ? Non, il en était hors de question. Je ne voulais plus de ça. Nathan m'avait brisé une fois. Je n'allais pas permettre que cela recommence. Je devais passer cette épreuve la tête haute.

J'essuie une foutue larme qui se forme au coin de mon œil. Même si Christian m'a brisé le cœur, sans s'en rendre compte, je ne veux pas me laisser engloutir par cette obscurité. Je vais me relever et vivre comme bon me semble. Plus d'attache, plus de sentiment. Juste me perdre dans le plaisir pour combler ce vide dans ma poitrine.

Je sors de mon lit. De toute façon, il est trop tard pour espérer quelques minutes de repos. Je me dirige d'un pas nonchalant vers la cuisine. Machinalement, j'attrape une tasse et me coule un café. Voilà, il faut que je reprenne le cours de ma vie, que j'envoie à l'oubliette Nathan et Christian. Il est évident que je ne suis pas douée pour les histoires de cœur. Elles ne font que me détruire. Alors je préfère les laisser à d'autres. Je porte à mes lèvres le liquide noir encore brûlant et souffle doucement dessus. Je vais réussir à le faire taire, à l'anesthésier ce fichu palpitant. Je ne peux échouer, sous peine de perdre la raison à tout jamais.

Mon téléphone vibre. C'est Josie.

« Je suis chez toi d'ici dix minutes. Je veux tout savoir. J'espère que ton bel apollon traine encore tout nu que je puisse profiter du spectacle. »

Et merde, Jo va débarquer. Je commence à lui rédiger un message déclinant son invitation, ou plutôt son intrusion forcée, mais je l'efface. De toute façon, elle n'en tiendra pas compte. Alors je balance mon smartphone sur le plan de travail et vais m'enfoncer dans le moelleux réconfortant de mon fauteuil préféré.

Quand le bruit strident de ma sonnette retentit, j'hésite à aller ouvrir. Si je ne bouge pas, elle finira peut-être par partir. Mais une deuxième salve de sons désagréables me prouve qu'elle n'a pas l'intention de lâcher prise. Donc je me lève en maugréant et vais ouvrir la porte.

- Alors, ma chérie, tu me racontes ?

Josie s'engouffre dans mon appartement, sans que je ne l'aie invitée, comme à son habitude. En général, ça ne me dérange pas, mais aujourd'hui, j'avais juste envie d'être seule.

- Alors, il est où le beau blond ? demande-t-elle, curieuse.

Je grimace à son évocation et je lui sers un grognement en guise de réponse. La discussion risque d'être moyennement agréable. Je préfère retourner m'asseoir.

- Ne cherche pas. Il n'y a personne.

Jo se retourne et m'interroge du regard.

- Quoi ? Il est déjà parti ? Je l'ai raté ?

Je secoue la tête, un peu agacée.

- Attends. Tu veux dire que même avec le look de bombe que tu avais hier, il n'a pas cédé à la tentation ?

Je soupire longuement et me laisse tomber dans le fauteuil. Josie s'assoit à son tour, scrutant mon visage pour essayer de comprendre ce qui se passe. Je détourne les yeux. Je n'ai pas envie qu'elle se doute de quelque chose.

- Bon, alors, tu m'expliques ?

- Il n'y a rien à dire, Jo. Il m'a embrassé, avant de me jeter. Fin de l'histoire.

Je sens peser sur moi le regard compatissant de ma meilleure amie. Non, putain, pas de ça. Je n'en veux plus. Je me redresse pour reprendre contenance et tourne vers elle mon plus beau sourire.

- Mais ne t'inquiète pas, j'ai quand même passé une bonne soirée.

Ses sourcils se froncent.

- Puisqu'il ne veut pas de moi. Je suis passée au plan B. Après l'avoir planté à la fête de l'autre poufiasse, je suis allé retrouver Mike. Au moins lui n'a pas eu d'état d'âme à la con.

Cette fois, ses yeux s'écarquillent et sa bouche s'ouvre en grand.

- Tu veux dire que...

- Oh oui ! ricané-je. Et franchement, ça en valait le coup.

- Mais Michelle... tu es sûre de ce que tu fais ? D'accord, il t'a fait prendre ton pied, mais ce n'est pas le genre de mec qui est prêt à se fixer.

- Et alors ? m'agacé-je. Je ne vois pas le problème. Je n'ai pas arrêté de courir derrière le prince charmant et regarde le résultat. Alors, j'ai décidé de changer mon fusil d'épaule.

- Michelle...

Son ton de maman fâchée me hérisse le poil.

- Putain, Josie, tu me saoules. Toi-même tu m'as dit de coucher avec lui et maintenant, tu me balances ce genre de regard !

- Quand je t'ai dit ça, c'était juste pour te pousser à mettre la pression au blondinet. Jamais je n'aurais cru que...

- Que quoi ?

Josie se renfrogne et croise les bras sur sa poitrine.

- Tu n'es pas ce genre de filles, Mickie. Toi, tu es une romantique. Tu cherches l'amour. Tu ne pourras jamais te contenter de parties de jambes en l'air, sans goût ni sentiment. Tu n'es pas...

Cette fois, c'en est trop. Je me lève d'un bond.

- Tu sous-entends quoi là ? Vouloir m'envoyer en l'air fait de moi une... trainée ? C'est ça, tu as raison. Comporte-toi comme ton père et sa grande ouverture d'esprit.

Josie blêmit d'un coup. Merde. Mes mots sont allés au-delà de ce que je voulais. Je voudrais les ravaler mais c'est déjà trop tard. Son regard se voile et elle baisse la tête.

- Jo, excuse-moi. C'était vraiment méchant de ma part. Mais je...

Ma voix se brise.

- C'était vraiment un coup bas.

- Je suis désolée. Je me suis vraiment trop nulle.

Je renifle et baisse la tête. Mais qu'est-ce qui m'a pris ? Jo est ma meilleure amie, celle qui m'a toujours soutenue. Et là, je déverse ma colère contre elle en m'en prenant à son point faible. Et si elle avait raison ? Si j'étais en train de me leurrer ? Je joue peut-être avec le feu ? Ma poitrine me fait soudain affreusement mal. Les sanglots montent à une vitesse folle. Je plaque les mains sur mon visage. Les larmes s'écrasent entre mes doigts et mon corps est secoué de spasmes. Tout à coup, une main apaisante vient caresser mes cheveux et je sens un corps élancé venir se blottir contre moi. Jo me prend dans ses bras et me berce doucement.

- Ce n'est rien, Mickie. Je suis là.

Mes doigts se referment sur son bras. Je m'accroche à elle, comme à une bouée. Josie, mon amie, ma protectrice, ma sœur de cœur. Elle est toujours là pour moi malgré mes bourdes et mes faiblesses. Et je serais toujours là pour elle. Comme on l'a toujours été, malgré les épreuves que la vie nous inflige.    

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