Une vie, une renaissance

Chapitre 1 - partie 5

L'après-midi passa agréablement et à dix-sept heures, tout le monde partit en remerciant les parents d'Alicia d'avoir organisé la petite fête. Une fois seuls, les cinq amis rangèrent et nettoyèrent le salon. A dix-sept heures trente, c'était fini et ils sortirent. Ils se réfugièrent dans l'abri qui faisait à face à la maison d'Alicia, voulant profiter du peu de temps qui leur restait avant que chacun ne rentre. Ils avaient besoin de se sortir le tourbillon de musiques et de conversations de la tête et de se libérer de la présence omniprésente des parents d'Alicia. Ils profitèrent pour savourer le temps présent, le silence, la présence de l'autre et le sentiment de bien-être que tous ressentaient, même Christophe. Ils s'étaient trouvés et ils se sentaient bien ensemble.

David et Céline étaient sur le banc tandis qu'Alicia était assise par terre adossée au torse de Michaël qui avait les jambes écartées et les bras croisés autour du cou de sa camarade de façon à la maintenir tendrement contre lui. Il l'avait attendue si longtemps qu'il ne voulait plus la lâcher. Christophe, lui, faisait les cent pas.

En voyant les deux jeunes filles si tendrement blotties contre leurs amis, la mère de Bernard, Mamie, ressentit de la peine pour Christophe, qui restait seul, mais déclara toute attendrie :

— Ne sont-ils pas mignons tous les quatre ?

— C'est vrai, dit Bernard.

— Qui donc ? demanda le père d'Alicia, Jacques.

— Alicia et son invité, ainsi que son amie et le grand brun.

— Comment ? fit Michèle. Mais je vais la tuer.

— Nous étions pareils à leur âge, la défendit Jacques.

— Elle n'a que treize ans !

— Arrête d'être rabat-joie. Je sais très bien que tu es contente pour elle. Depuis le temps qu'elle parle de lui.

— D'accord mais elle est bien trop jeune pour avoir une relation avec un garçon.

— Ce n'est qu'un flirt. Et puis regardes-les. Ils ne font rien de mal. Ils sont juste assis à regarder la neige tomber.

— Va savoir ce qu'il se passe dans leur tête. En plus, il est bien plus vieux qu'elle. Il va vouloir des choses qu'elle ne voudra pas forcément lui donner. Il va la laisser tomber quand elle refusera. Et c'est qui va devoir ramasser les morceaux ? Ce n'est pas toi. Qui c'est qu'elle va venir voir quand elle aura le cœur brisé ?

— Céline. Pas toi. Alors arrête de dramatiser. Il a l'air d'être un gentil garçon. Il est propre sur lui et n'a pas un comportement de sadique, que je sache.

— Oui, mais on ne sait rien sur lui.

— Ne t'inquiète pas. Ta fille n'est pas stupide et elle le connaît. Elle ne resterait pas avec quelqu'un qui n'en vaut pas la peine. Fais-lui confiance.

— Mais...

— Il n'y a pas de mais qui tienne ! C'est un copain de David, qui sort avec Céline, donc on les verra souvent à la maison, ou alors ils seront chez l'un ou chez l'autre. Et puis si jamais tu veux en savoir un peu plus sur lui : demande à Eric.

Au dehors, la neige tombait déjà depuis une bonne heure et le paysage commençait à être d'un blanc qui ne laissait plus rien paraître de la nature qu'elle recouvrait. Les cinq jeunes gens la regardèrent œuvrer en silence, les deux filles se réchauffant dans la tendresse de leurs compagnons. La rapidité avec laquelle la neige cachait le paysage, après avoir été attendue si longtemps, semblait se moquer des deux couples en leur faisant comprendre que la patience était toujours récompensée.

Une subite envie de jouer s'empara de Michaël qui se leva en se dégageant doucement de son amie. Il se dirigea vers la neige et s'accroupit devant elle. Les quatre autres le regardaient sans comprendre ou voir ce qu'il faisait. Ils ne le comprirent que lorsque Alicia reçu une boule de neige. La guerre était déclarée et tous y participèrent, les camps se faisant naturellement : les filles contre les garçons. Les boules fusèrent des deux côtés en plein milieu de la route désertée par les voitures. Voyant Michaël se retourner pour prendre de la neige où il en restait encore, Alicia courut vers lui avec à la main la boule qu'elle avait faite tout en essayant, tant bien que mal, d'éviter celle de David et Christophe qui couvraient leur ami. Elle eût juste le temps de lui glisser la boule sous le blouson quand il l'attrapa par la taille et la bloqua contre lui. La proximité de son corps réveilla ses envies et il ne put se retenir l'embrasser. En profitant pour demander l'armistice, Céline s'approcha de David et se blotti contre lui.

C'est tous en ligne, au milieu de la rue, qu'ils regardèrent avec humilité, joie, plaisir et reconnaissance la nature travailler et reboucher les trous qu'ils avaient faits dans la neige lors de leur bataille.