Chapitre 20 : N'oublie pas que la vie n'est pas un long fleuve tranquille
Drago reçut une bonne note pour le travail que Granger lui avait complété ; ou plutôt pour le travail de Granger qu'il avait complété.
La matinée passa lentement et, lors du déjeuner, pour la première fois, il remarqua qu'il n'était pas réellement agacé de la présence de Granger, du moment qu'elle se taisait.
Drago avait essayé de comprendre d'où venait ce revirement si brutal ; il avait finalement admis que c'était parce que Granger avait été à sa table lorsqu'Angelina lui avait fait croire être enceinte de lui et qu'elle avait remis les points sur les « i », que désormais il la tolérait. De plus, elle l’avait débarrassé d’une personne dont il ne savait que faire.
Il mangeait une part de tarte à la rhubarbe quand Nott, entrant dans la Grande Salle, lança une œillade suggestive à Granger.
Généralement, Drago se moquait bien de tout ce qui se passait de ce genre à la table – il ne nota pas la pointe d'amertume qu'il ressentit - mais voir la Gryffondor rabrouer le jeune homme l'amusa et il tendit l'oreille.
- Hey, Hermione, salua Nott en s'asseyant à ses côtés.
- Nott, salua-t-elle poliment en retour, sans même lui accorder un regard.
- En général, quand on se voit, tu es plus réceptive.
Elle parut déridée mais, lasse, ne rétorqua rien, continuant de discuter avec Pansy. Discussion à laquelle se joignit Tracey après un coup d'œil hostile de la part d'une Poufsouffle, quelques tables plus loin. De toute évidence, Angelina n'avait toujours pas assimilé sa défaite. Sa défaite immense et la totalité de l'école en avait été témoin !
- Kathlins te méprise, lança Nott en posant son bras autour des épaules d'Hermione.
Elle le retira avec froideur avant de le fixer comme si c'était la première fois qu'elle le voyait.
- Au fait, Théodore, débuta-t-elle et une fois qu'elle eut son entière attention, elle poursuivit. Lundi dernier. Lundi sept février, rajouta-t-elle devant son air surpris. Sais-tu quel jour nous sommes ? s'exaspéra-t-elle finalement.
- Heu… Mercredi neuf ?
- Bravo ! s'exclama-t-elle sèchement et l'irritation transperçait dans sa voix. Lundi dernier, j'ai moyennement accepté ce que j'ai vu lors de ma ronde.
- Et quoi donc ? s'enquit Tracey Davis en se penchant.
- Il avait laissé toutes ses affaires étalées dans une demi-dizaine de couloir. J'ai dû tout ramasser. Son sac, ses habits, sa baguette… Ainsi que – elle grimaça, dégoûtée- ton caleçon !
- Mais lundi, je ne suis pas sorti ! s'écria Nott en jetant un coup d'œil dans la salle comme si quelqu'un allait approuver ce qu'il disait ; mais personne ne le fit, sûrement parce que personne n'écoutait.
Les élèves de Serpentard qui les percevaient et qui avaient été présents ce lundi-là dans la salle commune des Serpentards, soit Blaise, Pansy et Tracey, eurent l'air sceptique :
- Tu es sorti lundi, Théo, rappela Blaise en le scrutant attentivement.
- Mais non, bien sûr que non…
- Tu avais rendez-vous avec Brown !
Il y eut un blanc et chacun l'observa consciencieusement. Finalement, Granger rompit le silence et parla lentement, articulant distinctement, comme si elle avait peur qu'il ne comprenne pas ce qu'elle disait :
- Nott, en tout cas, la prochaine fois n'oublie pas ce genre de choses !
Granger se leva en consultant sa montre et s'en fut aussitôt, souhaitant arriver en avance au cours qu'ils avaient pourtant en commun. Drago, franchement intrigué par ce fameux trou de mémoire de Théo, s'approcha de lui et vit son hypothèse confirmée :
- Putain, vous ne pouviez pas me laisser faire semblant que je ne me rappelais pas de lundi devant Granger ? siffla-t-il. J'ai l'air de quoi, moi, à fréquenter des baleines comme la Brown pour combler le manque ?
La cloche sonna, coupant court aux jérémiades agaçantes de Nott et ils repartirent pour une après-midi relativement courte de cours ; c'était mercredi et Drago n'avait que potions et défense contre les forces du mal, assuré par le professeur Lupin, revenu en début d'année.
Il se plaça face à son chaudron, attendant que Granger fasse de même à ses côtés. Elle s'avachit avec un soupir et bailla lourdement.
- Tu devrais dormir Granger, lui intima-t-il avec un sourire cruel.
Il connaissait parfaitement les raisons de sa fatigue, veillant lui-même à ce qu’elle perçoive le chahut dont il était responsable chaque soir. Certes, elle l’avait épaulé lors du mensonge d’Angelina, certes Blaise était vivant et lui avait pardonné, certes, elle avait été sous l’emprise de la magie noire… Il ne pouvait oublier de sitôt.
- Dès que mon idiot de colocataire arrêtera de faire venir des femmes dans sa chambre tous les soirs et qu'il arrêtera d'oublier malencontreusement de mettre un sort d'insonorisation sur cette maudite pièce, répliqua-t-elle. Je pourrai.
Drago considéra ses grands cernes et afficha une moue goguenarde.
Ils commencèrent à préparer la potion affichée au tableau sans un mot alors que Rogue parcourait les allées entre les bureaux, les examinant tout aussi bien eux que leurs chaudrons. Bientôt, la punition fusa :
- Monsieur Weasley aura certainement l'indulgence de laisser Miss Parkinson travailler sérieusement quand il saura que je retire dix points à sa maison. Concentrez-vous, bougre d'idiot !
Drago afficha un sourire narquois en direction du rouquin qui lui renvoya un geste vulgaire de la main, sous le bureau. Le professeur Rogue se retourna brutalement dans un mouvement de cape qui claqua sèchement.
- Monsieur Weasley, susurra-t-il de sa voix doucereuse. Non seulement vous distrayez Miss Parkinson mais en plus, vous vous pensez assez intelligent pour provoquer un élève…
- Mais professeur, Malefoy m'a insulté ! Demandez à Hermione, elle l'a vu !
Weasley tourna vers elle un regard empli d'espoir mais ne croisa qu'un vide à glacer le sang.
- Miss Granger a-t-elle réellement vu ceci ? s'enquit faussement le professeur.
- J'ai seulement vu Mr Weasley envoyer un geste grossier à Mr Malefoy, assura tranquillement Granger en observant sa potion et en la mélangeant suivant la notice.
Weasley écopa de deux semaines de retenues. Potter dévisagea Granger tout le reste du cours, inquiet, les sourcils froncés.
Les élèves se levèrent et rejoignirent d'un pas lent la classe de cours du professeur Lupin. Pas un mot ne fut échangé entre les maisons mais un certain rouquin ne cessait de bougonner et de jeter des coups d’œil vénimeux en direction d'un certain blond. Enfin, ils arrivèrent devant la classe et patientèrent.
La tension était palpable et à son apogée. Chacun attendait que la première réplique haineuse fuse. Ce qui, au gré des regards échangés, des menaces informulées et des groupes qui se rapprochaient, allait sans plus tarder.
Drago vit du coin de l'œil Potter s'avancer vers Granger et elle eut aussitôt un geste de recul. Il parut vexé mais ne s'en formalisa pas.
- Hermione, chuchota-t-il si bas que Drago dut incliner sa tête pour que son oreille le perçoive.
- Quoi encore ? demanda-t-elle sèchement.
- C'était vrai en potion ? Pour Malefoy et Ron ?
- Qu'en sais-je ? s'exaspéra-t-elle. Vous n'avez qu'à travailler !
- Mais le geste grossier de Ron tu l'as –sois-disant- vu, Hermione ! s'exclama Lavande Brown en s'avançant – et de toute évidence, c'était elle qui allait démarrer les hostilités. Pourquoi n'aurais-tu rien vu avant ? Tu es pour qui ? Serpentard ou Gryffondor ?!
Elle ne répondit pas et adressa un regard vide au sol de marbre. Potiron adressait des airs paniqués dans tous les sens, oppressé par l'atmosphère agressive.
- Hermione, il nous faut des réponses, tonna Ron.
- Oui, Hermione, donne-nous-en ! ajouta Lavande.
Drago remarqua une sorte de proximité de Brown vis-à-vis de Weasley mais il n'en était pas sûr. Elle semblait le protéger avec un peu trop d'ardeur et renforçait ses dires à chaque fois qu'il ouvrait la bouche.
Il se questionna sur leur relation car elle ne semblait aller que dans un sens ; il en conclut qu'elle devait être amoureuse de lui et que lui, ne voyait absolument rien. Cette pensée lui arracha un sourire méprisant.
Il constata aussi que Brown n'osait pas regarder Théo dans les yeux et s'en amusa franchement.
Pansy paraissait très agacée de ce qui se passait et elle restait dans un coin, les bras croisés sur sa poitrine, les yeux lançant des éclairs.
- Tu as honte de nous ou quoi ? renchérit Parvati Patil.
- Laissez-la, ordonna calmement Blaise.
- Zabini, on t'a rien demandé, répliqua Londubat. Qu'est-ce qu'il se passe ici ? Tous les Serpentards prennent ta défense maintenant ? cracha-t-il, haineux, en désignant d'un coup de menton l'attroupement autour d'elle.
- Neville, soupira Granger en rehaussant ses yeux et en les plantant tels deux poignards dans les siens. Aujourd'hui, je trouve plus mon compte avec les Serpentards qu'avec vous, c'est tout. Si tu ne comprends pas cela, alors, tu aurais dû aller à Poufsouffle.
Tracey et Nott ricanèrent froidement.
- Tu n'as pas le droit de dire ça, après toutes ces insultes, ces moqueries et le reste ! s'écria Brown d'une voix suraigüe. Tu nous trahis !
- Il s'agit de grandir, Lavande, d'arrêter de passer son temps devant son miroir à vérifier qu'on s'est bien épilé les jambes, de glousser bêtement quand Ron t'accorde un regard ou de suivre n'importe qui et de faire n'importe quoi avec, le lundi soir, mon soir de ronde, lança froidement Granger et il y eut un mouvement de stupeur chez les Gryffondor ; l'une des leurs les attaquait.
Il y eut un rire mauvais qui s'élevait de la gorge de Pansy.
Plusieurs élèves examinèrent attentivement Lavande, afin de voir si elle était touchée par ces remarques et de comprendre le sous-entendu sur le lundi soir. Sa lèvre tremblait et elle semblait sur le point de pleurer.
Contre toute attente, Ron s'avança rapidement vers Hermione et, l'air troublé, un rictus peint sur la bouche, leva sa main et l'abaissa à une vitesse alarmante. La gifle résonna dans le couloir soudain vide de bruits malgré les élèves présents.
Le retour fut encore plus rapide.
Un quart de seconde n'était pas passé que Weasley était plaqué au mur, la baguette de Granger pointée sur son torse.
Il frémit quand la miss-je-sais-tout s'approcha encore et gémit quand le bout de bois s'enfonça dans l'extrémité inférieure de son sternum ; l'appendice xiphoïde.
Son souffle se fit plus court et il haleta, pâlissant sous la douleur et la peur, visionnant à peine la marque cuisante qui ornait la joue de Granger ou ses yeux fous.
Sa respiration se fit plus hachée et il haleta difficilement contre le visage de la brune.
- Je te déconseille de m'approcher à nouveau ; Weasley, murmura-t-elle avec froideur.
Elle relâcha la pression et se détourna avec un air de conquérant vers la porte de la salle de cours qui s'ouvrait dans une parfaite synchronisation.
Drago, loin d'être impressionné, mais amplement satisfait, la suivit allègrement. Granger commençait vraiment à mettre des distances avec ses amis, et cela n'était que bon pour la mission. Si elle commençait à les appeler par leurs noms de famille et à les menacer, alors oui, ils étaient en bonne voie.
Une dose d'amour, et elle serait sur un petit nuage. Un petit nuage qui la conduirait jusqu'au Seigneur des Ténèbres.
Du coin de l'œil, il aperçut les Gryffondor qui demeuraient sur place, choqués. Brown s'était rapprochée du rouquin, qui, tout pâle, se massait la poitrine, en fronçant ses sourcils.
Les Serpentards suivirent la miss-je-sais-tout en envoyant des gestes obscènes de la main aux élèves qui restaient dans le couloir.
Alors que la moitié de la classe était déjà installée et que l'autre stationnait dehors, le professeur Lupin sortit et les convia à rentrer en leur demandant si tout allait bien. Ils acquiescèrent.
HHHH
Drago héla son équipe et tous arrivèrent vers lui, le balai à la main.
- Ce soir, commença-t-il. L'entrainement sera dur.
- Ce ne sera pas du cheesecake ! conclut Blaise en observant attentivement chacun des joueurs.
- Blaise ; c'est moi le capitaine alors tu te tais ou je te vire.
Le jeune métis se rangea aux côtés des joueurs sans rien ajouter. Butcher lui envoya une bourrade qui manqua de lui déboiter l'épaule.
- De septembre à décembre on a revu toutes les bases ; depuis deux mois on travaille la technique. A partir de maintenant, on va faire en sorte que lors des matchs, ce qu'on a vu reste dans vos têtes. Les bases étant parfaitement acquises, dans tous les cas, lors d'un match, aucun de vous ne faillira à sa tâche. Vous savez vous rattraper si vous tombez et vous travaillez tous de manière synchronique. Si Blaise tombe, Ham le rattrape. Si Crabbe rate le cognard, Goyle l'aura rattrapé. On ne peut pas perdre comme ça. Si on ne gagne pas, on ne perd pas. Maintenant, on va gagner. Samedi, nous avons le premier match de l'année contre Pousfsouffle. On va les battre. Je vais énumérer les points à travailler.
Tous l'écoutaient avec attention et pas le vol d'une mouche ne brisait le soudain silence.
- Ham, Butcher, si cette année j'ai pris deux hommes en Attrapeurs c'est surtout pour une raison ; aucune des attrapeuses des autres équipes n’est lesbiennes. Vous comprenez ce que je veux dire ?
Ils répondirent par le négatif et Blaise pouffa dans sa main. Il reçut des regards agacés.
- Les filles doivent être déstabilisées ! Quand vous prenez le souaffle, au passage, vous caressez leur cuisse, posez vos lèvres sur leur épaule. Elles ne s'approcheront plus de nous après.
- C'est bas, remarqua Pansy.
- Depuis quand tu deviens Gryffondor ? s'enquit Drago en la considérant avec stupeur.
Elle haussa ses épaules avec un sourire désabusé.
- On pourrait peut-être gagné avec nos vraies valeurs. Je veux dire…
- Justement ! Ce sont nos valeurs ! Nous devons atteindre cet objectif, la victoire ! s'exclama Drago, les yeux brillants, le poing tendu. Dès que le premier pied sera posé sur le terrain, le but est clair, GAGNER ! On enfourche nos balais et nos regards croisent ceux des adversaires. Ils doivent trembler, savoir que toute technique qui pourrait être utilisée pour gagner, y compris la déstabilisation, sera utilisée ! S'il faut que Blaise se mette en caleçon, il le fera ! Le souaffle tel un souffle magique, traverse nos mains, on ne garde jamais la balle avec nous, on passe on passe ! Et on MARQUE ! Point ! hurla-t-il en frappant son bureau avec le plat de sa main. Le souaffle arrive ? Qu'importe comment, Pansy, il ne passera PAS ! Et Crabbe, et Goyle ; chaque cognard vous devez l'utiliser ! Vous frappez puis vous suivez la balle pour la relancer aussitôt ! On gagne !
Le discours enflammé les laissa muets. Ils fixèrent leur capitaine, chacun sentant son cœur battre la chamade, une envie irrésistible d'être déjà sur le terrain et d'appliquer l'exercice.
- Pansy, qu'importe la balle qui passe, tu l'arrêtes ! Il faut revoir ton équilibre sur le balai car il est des plus médiocres. Tu dois être plus mobile, anticiper. Les garçons, visez le souaffle directement sur elle aujourd'hui. Je veux voir comment tu vas réagir. Crabbe, Goyle, arrêtez de confondre vos têtes et le cognard, on aura plus de chance de gagner, railla le capitaine.
D'un geste éloquent de la main, il les intima à se rendre sur le terrain. Il les suivit, fier de son discours et de l'état dans lequel il les avait mis.
HHHH
Le lendemain soir, jeudi 10 février, Drago se tenait debout dans sa chambre, scrutant sombrement l'obscurité du ciel, empreinte de magie.
Dans près de dix minutes, il devrait rejoindre son homologue pour une longue ronde de trois heures.
D'un accord tacite qu'ils n'avaient même pas eu besoin de formuler à voix haute, ils ne se parlaient pas, ne se voyaient pas et ne s'entendaient pas. De ce fait, ils étaient efficaces et c'était comme s'ils faisaient la ronde seuls.
Drago fut dérangé dans ses pensées par un « toc !toc ! » irritant et il releva sa tête. Il croisa deux yeux jaunes perçants et un pelage roux aux extrémités ambrés. Son plumage scintillait dans le clair-obscur argenté que prodiguait la lune en cette fraiche soirée.
Il ouvrit la fenêtre au hibou, qui, en habitué, secoua sa patte et laissa la lettre tomber. Il s'envola et partit sans demander son reste.
Drago savait ce que signifiait cette lettre. Tout ce qu'elle représentait et l'oiseau majestueux lui avait aisément indiqué la provenance de la missive. Pourquoi le Seigneur des Ténèbres lui écrivait-il ? C'était lui, à ne pas en douter. Que le hibou soit aux couleurs de Gryffondor n'était qu'une ironie.
Le souffle court, il décacheta l'enveloppe et fit glisser le papier glacé hors d'elle. Il le déplia hâtivement et lut enfin les quelques lignes qui lui étaient adressées, les mains tremblant d'inquiétude :
« Cher M.Malefoy,
Comme chaque année, l'illustre famille Malefoy a l'honneur de vous convier au diner annuel de la Saint Valentin.
De ce fait, nous vous prions de bien vouloir vous rendre au manoir Malefoy ce dimanche 13 février, aux alentours de dix-huit heures, seul ou accompagné, à préciser à l'avance. La soirée se terminera à minuit exactement afin que les couples puissent profiter de l'intimité que cette fête offre.
Notre invité d'honneur cette année : Le seigneur des Ténèbres.
Dans l'attente d'une réponse affirmative sous peu,
Famille Malefoy. »
Il avait réussi à éviter sa famille et le Lord toute l'année et voilà que bêtement, il allait devoir les voir pour passer une fantastique soirée avec eux ! Aucun doute, il allait être soumis au véritaserum ou à la Légilimencie… Il devait à tout prix voir Dumbledore car là, ce n'était plus la vie de Granger qui était en jeu – et dont il se moquait- mais la sienne.
Drago se leva d'un bond et courut vers la porte de sa chambre, la lettre enfoncée dans sa poche. Le battant s'ouvrit au même instant et il évita de justesse de s'y cogner.
Granger face à lui, le toisait avec agacement.
- Il est vingt-heure quarante-cinq, nous sommes en retard pour la ronde alors tu te bouges, Malefoy !
Drago se rapprocha d'elle, furieux pour diverses raisons ; déjà, qu'elle ait ouvert la porte sans son autorisation, qu'elle lui parle ainsi et enfin, qu'elle se croit supérieur à lui. Il sortit sa baguette et la vit esquisser le même geste. Ils se fixèrent quelques instants, puis relâchèrent la pression et se dirigèrent d'un même pas vers le tableau.
- Il faut que j'aille voir Dumbledore, Granger, annonça Drago.
- Et pour quelles raisons ?
Il la considéra comme si elle était folle. En quoi cela la concernait-elle ? Il décida de l'ignorer mais elle répéta sèchement sa question.
- Je ne crois pas que cela te regarde.
Elle pinça ses lèvres et leur ronde commença. Ils parcoururent plusieurs couloirs en trainant des pieds et en baillant.
Tour à tour, ils consultaient leurs montres ou l'écho des cloches afin de savoir l'heure.
Leur ronde s'éternisait et ils s'irritaient d'être si près l'un de l'autre. Finalement, l’affaire Kathlins avait à peine arrangé leur relation. Après tout, Blaise n’avait-il pas failli mourir de la main de Granger ? Qui aurait pu espérer un rapprochement ?
Enfin, il fut vingt-trois heures trente et comme chaque soir de ronde, ils terminèrent devant le bureau avec la Gargouille du professeur Dumbledore.
Granger, sans lui adresser un mot de plus, s'enfonça dans les ténèbres qui masquaient les couloirs et Drago se dirigea vers le bureau après avoir énoncé le mot de passe et gravi les escaliers.
Il fut invité à se présenter, puis, ouvrit la porte.
Le directeur était assis derrière sa grande table, recouverte de piles de dossiers dont certaines fois, la hauteur le dépassait ; d'ailleurs, les évènements semblaient eux-aussi le dépasser. Il paraissait totalement épuisé.
Ses lunettes étaient posées à côtés de ses coudes et ses mains soutenaient sa tête. Du bout des doigts, il frottait ses yeux cobalt vitreux. Il releva à peine ces derniers alors que Drago s'installait dans un fauteuil moelleux, face à lui.
Intraitable et se moquant bien des problèmes du directeur, Drago sortit la lettre et la déplia. Il l'étala devant le professeur qui la lut sans commenter, en relevant son front.
A la fin de sa lecture, il grimaça avant de froncer ses sourcils. Il ne dit rien pendant près d'une dizaine de minutes.
Puis, il se redressa enfin, posa ses lunettes devant ses yeux et de ces derniers, étudia le jeune homme qui lui faisait face.
- Alors ? s'impatienta Drago en réprimant un bâillement.
- Je ne vois qu'une solution, annonça-t-il d'une voix rauque qui témoignait de séances répétées de mutisme.
- Laquelle ?
- Tu vas te rendre à cette réunion ; et si Voldemort découvre quoi que ce soit, tu lui donneras toutes les informations que tu as.
Drago eut un ricanement méprisable.
- Les informations que j'ai ? Quelles informations au juste ?
Le directeur affectionna de ne pas l'avoir entendu et tapota d'un air songeur, du bout de ses longs doigts noirs dû à une brûlure certainement, son bureau.
- M'avez-vous écouté ?! Et que dois-je dire pour Granger ?
Une fine pellicule de transpiration apparut sur le front du professeur Dumbledore. Un pli s'y incrusta alors qu'il pinçait ses lèvres d'un air ennuyé et coupable.
- Drago, la situation est bien plus difficile qu'elle ne s'y prête à croire. De par ce que tu m'as dit… Je… Je ne pense pas qu'il y ait une chance que nous puissions l'épargner.
Le jeune blond releva aussitôt la tête comme s'il était directement concerné ; ce qui était légèrement le cas.
Depuis des mois qu'ils étaient, Blaise et lui, chargés de cette mission, tous les plans foireux s'enchainant à une vitesse alarmante, plus le fait que Dumbledore soit au courant et qu'il se charge, soit de la protection de Granger, soit de l'avancée de Potter pour battre Voldemort, soit de le sauver lui, tous ces faits lui assuraient inconsciemment qu'il n'arriverait jamais à réaliser ce pourquoi il côtoyait Granger.
Il avait sottement pensé sans le reconnaître que Dumbledore était responsable et que lui seul s'occuperait de tout cela, organisant et réfléchissant en un temps record pour une multitude d'hommes.
Soudain, il se sentait comme une vile ordure.
Depuis le début, il supposait qu'une échappatoire apparaitrait dans l'esprit farfelu du directeur.
Il n'avait jamais imaginé que Granger puisse réellement tomber enceinte du Seigneur des Ténèbres – peut-être aussi parce qu'il le voyait plutôt dépourvu d'organes sexuels mais cette pensée n'était pas prioritaire- ou que lui ait à la ramener.
Il savait bien que Dumbledore devait partir à la recherche des horcruxes et d'ailleurs, au vu des endroits où ils se trouvaient, Drago avait été persuadé que Dumbledore les aurait vite éliminés.
Mais voilà, le directeur était complètement ignorant. De ce fait, le trépas de Voldemort était retardé et les solutions qui s'offraient à lui s'amenuisaient et devenaient improbables.
Il pouvait fuir comme un moldu.
Il pouvait mentir au Seigneur des Ténèbres. Obéir aux deux hommes.
Prendre du polynectar jusqu'à la fin de la guerre en priant pour que l'Ordre triomphe car il ne serait traité que de traitre.
Trahir l'Ordre pour être leur prisonnier et être sauvé par son père et leur maitre en cas de victoire de ce camp-ci…
Tout reposait sur ses épaules.
Il pouvait tout révéler à Dumbledore, l'emplacement des horcruxes, la façon de les achever, la raison des choix de ces objets en particulier, tout.
Et ainsi, Voldemort deviendrait vulnérable. Mais se posait un problème certain : les sang-pur étaient forcément les sorciers les plus forts et Drago doutait de la victoire de l'Ordre du Phénix.
De ce fait, comment survivrait-il s'il choisissait le camp de l'Ordre et que celui-ci perdait ? Certes, personne ne saurait réellement qu'il aurait trahi mais Voldemort tilterait. Comment aurait-on su pour ses horcruxes ? Il devinerait avec aise qu'un Malefoy l'avait trahi et alors, il serait découvert.
C'était quitte ou double s'il avouait à Dumbledore.
Le problème était qu'il n'était pas aussi généreux ou spontané qu'un Gryffondor ; ses actes à lui étaient plus réfléchis et bien trop calculés.
Jamais il ne s'abaisserait à se mettre dans une situation si délicate. Et risquée.
Pour sauver des gens dont il se moquait royalement, n'étant lui, dans aucun cas, concerné.
Seul persistait le problème de Granger. Non…non, bien sûr que non, il ne s'était pas attaché à elle !
Seulement, désormais, elle lui accordait un petit peu de sa confiance et il avait toujours considéré sa mission comme un plan foireux et un sujet désopilant.
Il n'avait jamais pensé qu'il devrait réellement l'emmener voir le Seigneur des Ténèbres ; c'était plus une menace mentale qu'il aimait à faire planer sur elle ainsi qu'un pouvoir sur elle, qu'elle ignorait mais qui plaisait à Drago.
Non, c'était plus une question de principe ; tant qu'il ne faisait rien de concret, il n'était pas vraiment impliqué dans cette guerre à la tension palpable – une étincelle et elle exploserait. Mais s'il devait faire quelque chose, et que cette chose consistait à apporter Granger… Surtout qu'avec le philtre d'amour… Il serait définitivement marqué. Marqué comme un homme aux actes accomplis.
Il se résigna à accepter la vérité telle qu'elle était. Voldemort était actuellement en position de force et Drago n'arrivait pas à se décider entre ces deux partis aux manières d'agir totalement opposées.
C'était inquiétant de penser que l'univers du monde magique et moldu reposait sur ses frêles épaules ; il s'en serait bien passé.
Mais selon ce qu'il dirait ou pas, tout se passerait.
A ses yeux, sa vie valait bien plus que celles de milliards de gens dont il ne connaissait que très peu d'entre eux.
Un silence s'était de nouveau joint à la quiétude qui régnait dans la pièce, chacun étant parfaitement plongé dans ses pensées, loin d'être apaisantes.
Durant tout ce long moment, malgré les songes déplaisants qui l'assaillaient, Drago avait veillé à garder son esprit clos.
- Donc, commença le professeur en soupirant dans sa barbe. Une idée m'est venue.
Le jeune blond haussa ses iris gris et plongea son regard dans celui, morne, du directeur qui l'épiait.
- Elle est médiocre, mais je n'ai aucune autre solution.
Drago se sentit blêmir.
- Si à un quelconque moment, le Lord se questionne, tu avanceras ton ami Zabini sur un piédestal, je me doute qu'il doit être invité. Voldemort n'aura aucune raison de t'interroger, tu n'as pas à t'en faire.
- Et s'il le fait ? s'agaça Drago.
- Il n'en fera rien. C'est Blaise qui est chargé de corvée, Drago, rectifia le directeur d'une voix lasse. Par contre, je note avec attention que tu te moques de ta camarade préfète-en-chef, releva-t-il sèchement.
- Vous-même avez baissé les bras. Et son sort ne m'intéresse pas plus que cela. Elle a des amis, non ?
Drago mentait.
Il le masquait habilement.
Mais s'il agissait ainsi, c'était pour une bonne raison ; il ne souhaitait pas que le directeur sache que Drago trouvait Granger sympa – par moment seulement.
Moins il s'attacherait aux gens, moins il souffrirait. Surtout quand ces gens-là étaient destinés à de tels exploits. Et surtout, lorsqu’ils avaient failli mettre fin aux jours d’un ami.
Toutefois, le directeur n'insista pas. Il se contenta d'hocher la tête.
- Pour t'y rendre, je suppose que …
- Je transplanerai ; j'ai le permis, ajouta Drago sous le regard sévère que lui adressait un ancien directeur de Poudlard depuis son tableau. Et pour Granger, que dois-je dire ?
- Je… eh bien… je suppose que le sacrifice d'une personne pour des milliards de personnes n'est pas vain ?
Drago sentit sa mâchoire se décrocher. Il n'avait pas réellement cru que le directeur était sérieux quelques instants plus tôt.
Enfin, il avait espéré surtout. Parce que si l'Ordre gagnait mais que malgré cela, Granger était enceinte et qu'elle ne pouvait avorter, il ne donnerait pas cher de sa peau face à Potter, aux Weasley et au reste.
- Mais elle le sait ou pas ? murmura Drago, horrifié de voir Dumbledore trahir ainsi un membre de son équipe.
- De toute façon, vous lui annoncerez, je suppose ? Il faudra bien, si elle doit vous suivre. J'ai fait tout ce qui était en mon pouvoir. Je suis âgé Drago, et rien ne se passe comme je l'aurais voulu.
- Mais ça va achever Potter ! s'exclama Drago en se levant d'un bond.
- Je ne vous savais pas si proches, tous les deux, souligna le directeur et le blond sentit sa main le brûler d'envie de s'abattre sur la joue du vieillard. Oui, c'est vrai, reconnut-il peu après. Avec un peu de chance, il ne le saura pas avant que nous ayons gagné…
- Et en admettant cette fameuse victoire, qu'advient-il de l'enfant ? s'étrangla Drago qui voyait déjà le monde débarrassé d'un tyran pour que le fils de ce dernier le gouverne.
- J'ai dans l'idée qu'elle pourrait avorter. Ou alors… Serait-il si mauvais avec une mère telle qu'elle ?
Le Serpentard jeta un coup d'œil circulaire dans la pièce, huma l'air. Il ne sembla pas y avoir la moindre trace d'alcool.
Le directeur devait donc être sobre – logiquement. En tout cas, quiconque l'aurait vu, l'aurait pensé. Quiconque l'aurait entendu, aurait soigneusement cherché les packs de whisky pur feu, bien dissimulés.
Car cela ne pouvait pas être vrai. Dumbledore ne pouvait pas parler ainsi. On ne pouvait décemment pas être si candide, si innocent !
Si l'on partait dans cette voie, alors oui, l'enfant de Voldemort serait un chou, adulerait littéralement les moldus et deviendrait président de ces derniers en pleurant de joie. Et il aurait des cheveux sur le caillou.
Drago se sentait ridicule de penser ainsi ; non que ses songes soient injustifiés, mais plutôt devant l'incrédulité que provoquait en lui cette situation. Dumbledore se faisait vieux, il devenait et marteau et sénile.
Le pauvre homme.
Mais en attendant, c'était ce pauvre homme qui prenait les directives, insufflant au monde la marche à suivre – ou pas.
- Le plus important, poursuivit Dumbledore, plongé jusqu'au cou dans son délire selon Drago, est d'exterminer Voldemort, l'enfant ne sera que secondaire. Je suis certain que Miss Granger se sacrifiera. Ce sera dur pour elle mais objectivement, c'est ça ou la mort pour beaucoup de gens. Il faut que Voldemort nous laisse du temps, or, nous ne l'aurons pas autrement –le temps. De toute façon, personne ne verra qu'elle est enceinte et avec un peu de chance, on aura exterminé l'enfant avant qu'il ne soit trop tard.
- Trois points restent obscurs, soupira Drago. Elle pratique la magie noire ! Moins qu'avant, mais elle pratique. Et si au final, elle venait à devenir notre adversaire ?
Le visage du directeur se contracta brusquement et il fronça ses sourcils, la bouche entrouverte. Il ne paraissait plus le voir. L'hébétude avait envahi ses traits et elle ne les quitta qu'au bout de longues secondes d'intense réflexion.
- C'est possible… Toutefois, je doute qu'elle aille si loin dans ce domaine. Pour quelles raisons l'étudie-t-elle, d'ailleurs ? Drago, c'est important, le sais-tu ?
- Aucunement, répondit aussitôt le jeune homme. Le second point, commença-t-il, hésitant.
- Qu'est-il ?
- Et si elle s'attache à l'enfant et qu'elle veut le garder ?
- Eh bien, elle le gardera ! Il ne peut pas être autant maléfique que cela…
Sa période de lucidité semblait à nouveau réduite à néant. Drago gémit mentalement.
- Et Potter dans tout cela ? Saint Potter, il va me tuer ! s'exclama le Serpentard.
D'un côté, si un combat devait éclater, Drago ne doutait en aucun cas de son éminente victoire, son triomphe qui redorerait son blason. Cela n'aurait pas été si mauvais en soi mais si Drago tuait Potter, qui était né pour vaincre Vous-Savez-Qui, il ne serait pas longuement apprécié. Enfin, du côté de l'Ordre surtout.
- Pourquoi saurait-il quoi que ce soit, Drago ? s'enquit le vieil homme.
- Vous allez lui dire. Ou alors, il le verra !
- Je doute franchement que cela se voit dès le départ, Drago. Maintenant, nous allons nous mettre d'accord sur cette soirée à laquelle tu vas te rendre, de préférence guilleret.
Devant le regard assassin de Drago et sa moue meurtrière, il crut bon de rajouter :
- Enfin, c'est ta famille, c'est toi qui vois ! Bon… Cessons de formuler nos objections. Tu vas aller à cette soirée ainsi que Blaise. S'il s'avère qu'on veut connaître l'ampleur de l'avancée, tu avances Blaise. Mis à part cela, concernant miss Granger, tu vas l'amener à ton maitre le plus tard possible, mais oui, tu vas l'y conduire… Ce n'est qu'une question de gagner du temps.
Drago repoussa le dossier de son fauteuil et se leva. Il s'épousseta pensivement et d'un geste souple, serra fermement la cape contre lui. Il acquiesça vaguement et après s'être salués, les deux hommes prirent congé l'un de l'autre.
Drago se sentait plus confus que jamais alors qu'il arpentait silencieusement les couloirs.
Sa respiration était si basse, et son allure si souple, qu'il se fondait dans la nuit sombre sans transparaitre une seule fois. Ses pieds se moulaient avec perfection sur le sol et seul demeurait, de temps à autre, le hululement des chouettes de la volière, au loin.
Seule la brume que créait son souffle à chaque expiration permettait de deviner sa présence. Les couloirs étaient glacés.
La lune orientait sur les murs des ombres mystiques. Des ombres qui se courbaient, s'inclinaient et s'affaissaient. Des ombres qui murmuraient entre elles, qui se reflétaient sur les tableaux somnolents. Mais des ombres muettes.
La quiétude régnait.
Ce fut le soudain contraste, le brusque changement d'atmosphère qui fit remarquer à Drago les critères précédents.
Il sortit aussitôt sa baguette, songeant avec plaisir qu'il devait s'agir d'élèves qui leur avaient échappé lors de leur ronde. La faute à Granger, elle pensait trop fort. Ils l'auraient entendue.
Il y avait, un léger mouvement feutré et des ronronnements de chat, semblait-il.
Le Serpentard continua sur sa lancée, et ses pieds glissèrent sur le marbre. Pas un râle ne devait être perceptible.
Les ronronnements s'intensifièrent et se rapprochèrent les un des autres alors que Drago arrivait à une intersection. Trois couloirs se présentaient à lui.
Penchant l'oreille, il suivit tant bien que mal la provenance de ce son vague. Puis, il le reconnut pour l'avoir tant entendu. Des gémissements.
Il poursuivit à allure lente et enfin, il lui sembla n'être qu'à quelques pas du couple secret. Il huma l'air sans le vouloir, réflexe instinctif.
Un parfum flagrant embaumait l'air.
Une délicate fragrance vanillée et cannelée agrémenté de l'odeur de l'herbe fraiche du matin, recouverte de rosée. Qu'il adorait.
Pointant sa baguette vers la source des ébats, il pensa : « Lumos. » Et la scène fut nimbée d'un halo d'or.
Drago observa avec une horreur considérable ce qui s'offrait à lui.
Granger, plaquée contre le mur, le chemisier grand ouvert et le soutien-gorge mal positionné laissant apercevoir la moitié de sa poitrine, sa jupe remontée sur ses hanches, agrippée Nott contre elle.
Il était presque entièrement habillée, seul sa braguette de pantalon était abaissée, où la main de Granger s'était faufilée insidieusement. Celle de Théodore était à peu près au même niveau et ses doigts disparaissaient dans la culotte de la jeune femme.
La première chose qui frappa l'esprit de Drago fut de se demander comment il avait noté autant de détails en si peu de temps.
La seconde fut de se questionner sur l'état mental de Granger ; Nott était quelqu'un de dégoûtant et désastreux au lit.
La troisième fut de s'enquérir sur les risques qu'il courait à les avoir interrompus à une phase si poussée des préliminaires.
Il remarqua que Granger virait au rouge avant de se cacher prestement derrière Nott.
- Eh Drago, ça roule ? le charria Théo en affichant un sourire goguenard – c'était un peu sa revanche de montrer qu'il pouvait coucher avec l'ex de Blaise et que celle-ci était consentante, s'entend.
- Pour toi, ça ne va pas rouler longtemps, répliqua le jeune blond, perturbé par l'effluve qui chatouillait ses narines. Tu dépasses le couvre-feu.
- Il est avec moi, Malefoy, rétorqua sèchement Granger, alors qu'elle boutonnait hâtivement sa chemise.
Drago ne se sentait plus réellement conscient de ce qu'il se passait.
Il voyait la bouche sensuelle d'Hermione s'ouvrir et délivrer un tas de paroles sans doute acerbes mais ne les entendait plus.
Sa tête était vide de tout et dans tout son être, seul son cœur tambourinait fiévreusement. Il le percevait, qui bondissait dans sa poitrine, qui mugissait dans ses oreilles…
Il ne s'expliquait pas son état car il n'était pas apte à remarquer qu'il n'était pas normal.
Il était fiévreux, des vagues de chaleur le submergeaient, s'attardaient dans son bas-ventre, le laissant pantois sans que, toutefois, aucune trace de ce combat intérieur ne s'affiche sur les traits détendus de son visage.
Il avait la rage de voir Granger et Nott ici, dans cette position, à faire ce qu'ils faisaient.
Ils n'avaient pas le droit !
Si Drago avait dû être franc envers lui-même, il se serait avoué que ce n'était pas rapport à la mission qu'il était si haineux. Il se sentait… dépossédé ? Sans savoir pourquoi.
Comment cette ordure de Nott pouvait toucher Granger ?
De quel droit se permettait-il cela ?!
Et elle, cette idiote, pourquoi donc se laissait-elle toucher ?
Ils ne pouvaient pas faire ce genre de choses, ici, comme ça, devant lui ! C'était indécent. Granger était déjà réservée et ils… non !
- Fichez-le camp ! ordonna froidement Drago dans un état de semi-conscience avant de tourner les talons.
Il regagna sa salle commune avec les nerfs à vif, la rancune le dévorant littéralement. A peine arrivé, il se précipita sur la terrasse et, observant le lac, se mit à trembler.
Quelques instants plus tard, Granger le rejoignait, les lèvres serrées.
Drago éprouva un léger soulagement en comprenant qu'elle n'avait pas pu aller jusqu'au bout de sa démarche. Pourquoi ? Il n'en avait aucune idée.
Peut-être que la raison de sa colère, était qu’il se préoccupait de sa destinée avec Dumbledore, et que, elle, durant ce temps, ne songeait qu’à fricoter.
- Pourquoi ? répéta Hermione en écho à ses pensées.
- Quoi donc, Ganger ? soupira Drago en prenant un ton exaspéré, fixant un point imaginaire.
- Pourquoi a-t-il fallu que tu viennes ? Que tu le vires ? s'exclama-t-elle en brandissant sa baguette sous son menton et en l'agitant.
- Granger, il n'avait rien à faire là ! s'impatienta Drago.
Il fouilla frénétiquement la poche de sa cape, à la recherche d'un paquet de cigarettes qui l'aiderait à évacuer le stress de risquer d'être mis à nu d'un instant à l'autre.
La Gryffondor lui tendit pensivement le sien et il s'empara d'une cigarette qu'il alluma rapidement.
Il tira une longue taffe dessus, se sentant s'alléger au fur et à mesure que la fumée le pénétrait. La jeune femme l'imita en rangeant sa baguette au passage.
- Les cas auraient été inversés, je n'aurais rien dit.
- Tu es une fille. Logique. Tu aurais été mal à l'aise.
- Et toi ?! s'exaspéra-t-elle. Tu ne pouvais pas faire semblant de l'être ?
- Non, certainement pas.
Une vague de pitié le traversa en songeant que cette personne, au regard vif et troublé, au caractère de feu, au corps dynamique, avait sa destinée toute tracée par la faute de Dumbledore.
Dans quelques semaines, elle serait morte ou enceinte.
Il était responsable et cela lui déplaisait énormément. Il ne pouvait décemment pas être cruel avec elle, même si c'était une sang de bourbe, une miss-je-sais-tout, une personne qu'il n'appréciait pas, son défouloir, alors qu'elle serait vite soumise à un philtre d'amour.
- Quoi ? Tu voulais que Blaise reste le seul à m'avoir touchée ? Parce qu'il n'a pas été le premier ni le dernier.
- Tu n'as pas le droit ! lui retourna brutalement Drago en aspirant une nouvelle fois la fumée de sa cigarette.
- POURQUOI ? s'écria Hermione au bord de l'hystérie.
- Parce que. Je t'interdis de le revoir.
- Tu sais ce que j’en fais de tes interdictions ? jura posément la brune.
Elle pointa à nouveau sa baguette sur son torse, le regard fou, ses yeux noirs agrandis par l'horreur.
- Qui es-tu, misérable être, pour te croire en mesure de me soumettre ? siffla-t-elle.
- Obéis-moi et tu te porteras mieux ! trancha Drago en la repoussant violemment.
Il partit à grandes enjambées.
Ce soir, il venait de prendre en compte beaucoup de choses. Mais l'une d'entre elles, plus que les autres, l'inquiétait.
De par ce qui attendait Hermione et dont il était responsable, de par la soudaine solidarité d'Herrmione avec les Serpentard, de par sa pratique de magie noire qui la rendait mauvaise, de par cette attirance qu'elle avait des hommes de Serpentard et qu'elle faisait naitre chez lui.
Une proximité ambiguë naissait. Bonne ou mauvaise ? Il ne savait plus trop quoi en penser.
Devait-il la repousser ou se laisser aller ? Profiter d'elle ? Pour quelles raisons s'était-il mis en travers de la route de Nott ? C'était de la soumission. Il voulait qu'elle soit dépendante de lui, qu'il n'y ait pas d'interférence avec sa mission. Oui c'était cela.
De la protection autour de Granger, pour qu'elle reste intacte pour le Seigneur des Ténèbres.
Le mensonge qu'il avait inscrit en lettres de feu dans son cerveau lui tira un soupir de soulagement.
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La descente en enfer d'Hermione Granger
FanfictionDisclaimer : Rien de l'univers d'Harry Potter ne m'appartient. En revanche, l'histoire et les personnages créés sont les miens. Contient des scènes à caractères sexuels. En débutant cette fanfiction, vous pensiez tomber sur une histoire OC, sans fon...