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Vous êtes-vous déjà demandé quelle était la raison de votre naissance ? Quelle était la raison de votre venue dans ce monde ?

Certains naissent pauvres, d'autres riches, dans une mauvaise famille où battre est synonyme d'amour, tandis que pour quelques-uns, leur arrivée dans ce monde est accueillie à bras ouvert et ce pendant toute leur vie. Ce genre de personne est rare, il y a bien un moment où l'on doit être confronté à la réalité, où l'on doit se battre contre les abîmes afin de les faire redevenir meilleures. Comme si l'on voulait remonter chaque minute dans le passé afin de pouvoir corriger ses erreurs.

Seulement, la plupart du temps, cette tentative échoue.

Comme elle a échoué avec moi, quatre ans auparavant, si l'on ne devait pas dire onze.

Certaines personnes viennent au monde et sont directement placés sous les lumières, d'autres restent cachés dans l'ombre sans jamais trouver la raison de leur venue. Ou encore, quelques-uns réussissent à guider leur vie comme ils l'entendent par une confiance en soi absolue, ou parce que l'âme leur a été ôtée avec souffrance, et ainsi deviennent idolâtré trop tard pour qu'ils aient le temps de remercier.

L'humain étiquette l'humain par des mots qui ne veulent rien dire ; psychopathe, pute, homosexuel... Au fond, ce n'est pas facile de se débarrasser de ses traumas sans avoir obligatoirement une étiquette collée dans le dos, indiquant un mot que l'Homme trouve sans réellement comprendre son sens.

Par mes très rares amis qui ont maintenant disparu de la circulation, on me disait « bizarre ».

Bizarre dans le sens où je riais peu, où je ne parlais que très rarement, et surtout, que je ne me sentais jamais à l'aise en compagnie d'autres personnes.

Et surtout, parce que depuis quatre ans, j'étais atteint d'haptophobie, la peur irrationnelle des contacts physiques. Enfin, c'était ma tante médecin qui me l'avait diagnostiqué. Seulement je ne pensais pas la même chose, car elle ne savait pas la vérité sur qui j'étais devenu.

La raison était que son touché, cette nuit, m'avait profondément traumatisé, ce qui faisait que depuis, je ne supportais plus que ma mère, seul être avec qui je me sentais en sécurité, et seul être qui me restait.

Dix-sept heures trente-et-un.

D'un clic sur l'écran du tableau de bord, je raccrochais à ma mère après l'avoir rassurée comme quoi j'arrivais bientôt à ma destination finale et poussai un soupir. Mes yeux commençaient à me piquer à cause de la fatigue qui affluait de plus en plus. J'aimais conduire, mais après quatre heures de route à se prendre en plus tous les bouchons, j'avais eu ma dose de voiture pour bien un mois.

Heureusement, il ne me restait plus qu'une vingtaine de minutes avant d'arriver à mon nouvel appartement. Et qui disait nouvel appartement, disait nouvelle ville, et disait en même temps nouvelles personnes à rencontrer. Contrairement à Busan, j'espérais que les habitants seraient plus disciplinés à Séoul et que je rencontre enfin quelqu'un qui me regarderait à ma juste valeur. Enfin, il ne fallait pas espérer trop vite, non plus.

J'avais acheté un sandwich un peu plus tôt à une aire d'autoroute mais en fin de compte, même si je commençais à avoir un creux, je préférais attendre d'être arrivé chez moi que de risquer d'avoir un accident dès mon premier jour en capitale.

Même si nous étions dimanche en fin de journée, les grandes routes principales restaient toujours aussi bondées de monde. Après tout, Séoul était une ville insomniaque.

A une sortie en direction du périphérique sud, je rencontrai enfin des feux tricolores ainsi que des stops, signe que j'étais désormais entré dans la ville en elle-même. Au fur et à mesure des routes parcourues, la beauté de la ville m'émerveillait. Le crépuscule se reflétait sur les nuages et les immeubles, les lumières des grands réverbères et des bâtiments créaient ensemble un tableau qui faisait envie à plus d'une personne. J'étais pourtant déjà venu plusieurs fois à Séoul, mais jamais en tant d'habitant. Compétition nationale de natation durant mon enfance, visites d'appartements avec ma mère, mais me dire que j'allais maintenant y habiter pour continuer mes études était une sensation agréable.

Arrêté à un feu rouge, je soupirai d'épuisement et me frottai les yeux avant de me préparer à redémarrer. Par simple réflexe, je lâchai un coup d'œil dans le rétroviseur intérieur. Seulement, je fronçai les sourcils. Une très grosse voiture noire attentait patiemment derrière moi, les vitres étaient teintées ce qui faisait que je ne voyais pas le visage du conducteur.

Je voyais juste un petit crâne.

Un petit crâne jaune fluo suspendu au rétroviseur. L'obscurité des vitres ne faisait pas face à la couleur atypique de cette sorte de porteclé. Une vague d'angoisse s'échoua au creux de mon ventre, j'avais l'impression qu'il me regardait.

Le feu passa au vert et je m'engageai rapidement afin de ne pas gêner la circulation, ou même de me faire klaxonner en tant que simple touriste qui passait plus son temps à regarder le paysage. Gardant naturellement un œil sur ce qu'il se passait derrière sans pour autant omettre les directions de mon GPS, je remarquai que le crâne me suivit jusqu'à la rue où se trouvait mon appartement. On avait un peu quitté le centre de Séoul mais je n'en étais pas du tout loin, tout comme des commerces, ni même de ma nouvelle école.

A une trentaine de kilomètres heures dans la rue, je cherchai à coups d'œil vifs une place où je pouvais me garer, et si possible sans être trop loin de mon bâtiment. Comme j'avais des tonnes de cartons à monter, une place assez proche ne serait pas du luxe.

Le crâne jaune fluo me suivait toujours.

Lorsque je vis une place libre, je n'attendis pas une seconde de plus pour mettre mon clignotant. Dieu merci, la voiture de derrière comprit et s'arrêta afin de me laisser faire ma manœuvre. Manœuvre qui s'avérait être un créneau, la pire de toutes.

Garé par miracle du premier coup, le moteur voisin ronfla, et le crâne disparut de la circulation sans plus de cérémonie. Quel drôle de porteclé.

Le contact coupé, je soufflai de soulagement avant de prendre mon long manteau noir sur la banquette arrière. Sortis, je rejoignis rapidement le trottoir pour m'étirer les muscles. Bon sang, que ça faisait du bien d'arriver à bon port.

Après avoir trouvé du regard mon bâtiment de l'autre côté de la chaussée, j'ouvris la porte côté passager et commençai à prendre quelques affaires tel que mon sac à dos et deux petits cartons. Puis je fermai ma petite KIA Morning rouge afin de débuter les allers-retours.

Dix-neuf heures dix-huit.

Exténué, je me laissai tomber sur mon lit double pour détendre mon dos. Ce n'était pas du tout mon fort les activités physiques. Et encore, j'avais de la chance d'avoir un ascenseur, je ne me serais pas du tout vu monter deux étages avec les bras remplit.

Mon lit était le seul meuble présent dans la pièce excepté la petite cuisine, il venait de ma maison de campagne à Busan. Alors ma dernière semaine de vacances avant que mon année scolaire ne débute allait se résumer à aller acheter des meubles, à les monter, et à ranger. Ma rentrée se faisait très tard par rapport à d'autres écoles ou université, je ne savais pas pourquoi.

Au bout d'une dizaine de minutes à me reposer, elle finit par y mettre à termes en apparaissant à mes côtés, là où, sur le sol de mon studio, se trouvait un carton scotché de tous les côtés, dans un état minable depuis quatre ans. Elle n'aimait pas que j'aie un instant de paix.

Alors, comme un pantin, je me redressai, allai vers ce fameux carton délabré, et le pris pour le faire glisser sous mon sommier, à l'abri de tous les regards. Il cogna la latte, et elle disparut.

Vade retro.

Mon regard se fit ensuite attiré par mon carton préféré. Un léger sourire étira mes lèvres et j'allai l'ouvrir. J'en sortis mes caméras, mon trépied, et la mallette où dormait mon stabilisateur. Le reste de mon matériel de cinéaste était autre part, mais je préférais vérifier s'il n'y avait pas eu de casse. A dire comme ça, cela pouvait paraître bizarre, mais pour un étudiant de cinéma, c'était tout un art qui se jouait.

Pour le reste de la soirée, je me contentais de manger mon sandwich que j'avais acheté plus tôt même si ce n'était pas fameux, de faire mon lit, et ainsi d'aller dormir sous ses regards méprisants comme chaque nuit depuis quatre longues années. Bien sûr, je n'avais pas oublié de prévenir ma mère de mon arrivée avant de poser mon téléphone. Je n'aimais pas ces engins.

Allons Jungkook, une nouvelle vie s'ouvre à toi.

Peut-être que tout peut repartir sur de bonnes bases.








Ou pas.

❝𝐓𝐎:𝐊𝐘:𝐎𝐎❞ ᵗᵏOù les histoires vivent. Découvrez maintenant