— Est-ce que tu veux manger quelque chose ?À mon plus grand désespoir, sa tête se tourna d'une lenteur impériale de droite à gauche. Il avait perdu beaucoup trop de poids, c'en était presque affolant et je voyais, derrière le bar de la cuisine, Haneul se ronger les ongles.
J'avais réussi à amener Jungkook chez nous.
Sans que je n'y sois surpris, Taehyung avait cherché à le ramener chez lui coute que coute. Même s'il prétendait habiter à cent mètres et que moi, à plus de vingt minutes en voiture, je n'avais pas flanché. J'avais eu l'impression que l'on se battait comme deux enfants pour savoir qui avait la part de gâteau la plus grosse, et que l'on sortait des excuses pourries pour intimider l'autre.
En contrepartie, je lui avais expliqué que tout ça était de la faute de mon meilleur ami, qu'il ne l'aimait pas et qu'il avait fait une erreur à laquelle je tenais à m'excuser auprès de Jungkook. Son patron avait répliqué qu'il était le seul à pouvoir entrer en contact avec lui, et c'était un point qui m'avait coupé l'herbe sous le pied.
Alors celui-ci nous avait accompagné jusque chez moi, en compagnie de Jungkook que l'on avait allongé sur la banquette arrière de son Range Rover Evoque noir. Il n'avait pas parlé depuis son réveil, et encore maintenant, là, assis comme un pantin sur mon canapé, il ne disait absolument rien.
Son état de choc ne s'était pas non plus amélioré. Il semblait complètement déclaré dans le temps, ses réactions étaient d'une lenteur à en devenir fou, et ses muscles étaient tendu à s'en déchirer eux-mêmes. Il restait là, installé sur mon canapé, l'esprit complètement ailleurs, la raison complètement absente.
Et Seigneur, son regard me faisait tourner de la tête.
Ses yeux exorbités ne s'étaient pas détendu depuis son réveil, je me demandais même s'il avait cligné une seule fois des paupières, ses pupilles étaient dilatées, dénués d'éclat, semblables à ceux d'une bête abattue.
Ils étaient noirs comme la nuit, inanimée, où l'on ne voyait que le reflet des nuages car la lumière de la Lune qui animait ce ciel, elle, s'était éteinte.
Taehyung avait eu du mal à le quitter, et pour le rassurer, je lui avais proposé de lui donner mon numéro. Chose qu'il avait acceptée sans poser de question, avant de m'ordonner de lui donner des nouvelles le plus souvent possible. Je n'aurais jamais été capable de penser qu'en réalité, cet homme aux allures imperturbables et froides comme le Pôle Nord, était pourvu d'un cœur énorme.
Envers Jungkook en tout cas, car même s'il m'avait été d'une grande aide, je n'arrivais pas à vraiment l'apprécier.
Ce qui m'avait le plus choqué, c'était le fait que celui-ci ne réagisse aucunement au départ, ou même à la présence de Taehyung. Il était tellement absent qu'il ne se rendait même plus compte de qui l'entourait. Il fallait lui répéter plusieurs fois la même chose pour espérer avoir une réponse.
Habituellement, il réagissait lorsque son patron était dans les parages, mais là, rien. Et Taehyung l'avait lui aussi remarqué, une mine fermée et prête à exploser avait taillée son visage jusqu'à son départ.
Lentement, je le quittai pour rejoindre, non sans traîner des pieds, Haneul à la cuisine ouverte. Sur le plan de travail où l'on pouvait aussi manger en face à face, elle avait déposée trois couverts, dont un, qu'elle fut contrainte de ranger. Elle était bouleversée par l'état de notre ami, elle l'appréciait aussi énormément.
Je m'assis à ma place habituelle lorsque nous mangions seulement tous les deux, et distribuai mollement le couvert. Vêtue d'un simple poncho et d'un petit short, elle contourna le bar et vint m'entourer le torse de ses bras. Sa poitrine se colla à mon dos et son visage s'engouffra dans mon cou, comme elle aimait systématiquement le faire lorsqu'elle n'allait pas bien. Puis elle me berça doucement, dans un silence où seul le bruit des bulles éclatantes de la casserole remplie de ramens, sur la plaque de cuisson, résonnait.
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❝𝐓𝐎:𝐊𝐘:𝐎𝐎❞ ᵗᵏ
FanfictionToute personne née dans ce monde se doit d'être confrontée à la terreur, d'apprendre à affronter les atrocités des abîmes tout en comprenant l'évidence de la fatalité. L'Avenir n'est qu'un mot flou, une image fantomatique qu'aucune âme ne saurait dé...