Chapitre 15. « Ma grenade est dégoupillée »

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La porte de l'immeuble se referme derrière Anaïs et je me retrouve comme un con dehors.

C'était ça sa daronne ? Vraiment ? 

J'ai pas trop eu le temps de l'analyser, et même si j'ai vu très peu de toxicos dans ma vie, je suis presque sûr que sa mère en est une : des cheveux blonds secs et sales parsemés de mèches grises et blanches, les joues creusées, les yeux cernés et un air hagard, j'aurais pas été étonné de la croiser aux abords d'un squat.

Je sais pas combien de temps je reste devant le bâtiment à réfléchir comme un débile, mais je me mets en marche dès que je me rend compte que je me suis perdu dans mes pensées.

Putain et ce qui m'emmerde le plus dans cette histoire, c'est que je crois que je commence à bien l'aimer l'autre. 

Y'a qu'à voir la réaction que j'ai eu face à celle qu'elle a désigné comme sa mère. Ça s'est passé trop vite pour que je comprenne quoi que ce soit, mais depuis qu'Anaïs a disparu dans la cage d'escaliers je suis ultra vénère. Et je suis pas seulement vénère parce qu'elle s'est barrée sans me donner de véritable explication.

Nan, je suis vénère parce qu'après cette après-midi, je sens que je commence à l'apprécier un peu plus, et j'ai pas du tout aimé la voir en galère face à la femme.

Et comme je sens que j'arriverai pas à me calmer avant de rentrer chez moi et que j'ai peur de péter un câble au moindre truc que pourraient faire mes darons, mon frère ou ma sœur, je décide de me poser sur un muret pour me rouler un spliff.

Putain mais elle vit avec qui du coup ? Son daron ? Un grand frère ou une grande sœur ? Un oncle ou une tante ?

De toute façon elle peut pas vivre seule, elle serait déjà à la ddas sinon. Surtout que les profs ont pas l'air de lui reprocher ses absences répétées, et j'ai pas l'impression qu'elle ai eu des problèmes avec l'administration du lycée.

Mon spliff roulé en deuspi, je continue de marcher en cogitant.

Et elle a vraiment quinze piges d'écart avec son frère ? 

Remarque, ma daronne a vingt-deux ans d'écart avec Zoé...

Mais je sais pas, je peux pas m'empêcher de penser qu'il y a un truc qui tourne pas rond. Je la sens pas cette histoire.

Et pourquoi bordel de merde je prends les choses à cœur au point de devoir me fumer un pète pour contrôler ma colère ? Je crois que ça m'énerve encore plus.

Au bout d'une quinzaine de minutes de marche, j'arrive devant ma résidence, un peu plus calme que quelques minutes auparavant. Je me suis fumé qu'un petit stick, alors j'espère que mes darons vont pas trop capter mon état.

Enfin ça, c'est s'ils captent que je suis là tout court. Parce que j'ai pas besoin d'avancer loin pour capter qu'ils sont en train de s'engueuler.

Mes parents s'engueulent jamais.

Curieux, je ferme la porte doucement et me déchausse ; ils murmurent avec animation dans la cuisine, sûrement pour éviter que Lou les entende.

Restant le plus silencieux possible, je traverse l'entrée pour m'approcher un peu plus de la cuisine. Faut pas que j'aille trop près parce que c'est une cuisine ouverte.

– Mel, s'te plaît, écoute-moi, entends-je mon père dire avec autorité. Tu peux pas leur cacher ça, c'est beaucoup trop gros.

D'où je suis, j'aperçois juste un morceau de la veste de mon daron derrière le bar.

– Tu te rappelles de ta réaction ? lui crache ma mère. De celle de Ken ? Et de Raph ? Dis-moi que tu te souviens de l'état de Raph quand il a su.

Toujours LàOù les histoires vivent. Découvrez maintenant