Cristal et Rubis

Fin : Cristal

- C'est bon, j'me casse, tu me saoules.

- Vas-y, c'est ça, barre toi.

Je claque la porte derrière moi, agacée, puis me mets à courir, sans me soucier une seule seconde de la direction que j'emprunte. J'ai simplement besoin de bouger. Soudain, je m'arrête, satisfaite de ma course, et m'aperçois que je suis allée jusqu'au jardin. Là, je pousse un long cri, comme un animal qui hurle juste pour le plaisir de hurler. Ça fait du bien. Mais un jardinier, occupé à tailler une haie, sursaute puis me dévisage, incrédule.

- Pardon.

Il fait comme si de rien était et se remet à son travail, effrayé. J'en rigole presque, tellement la situation est ironiquement hilarante.

Je rentre au palais, contenant une soudaine envie de tout casser sur mon passage. Bon, faut que je me change les idées. Mais avec qui ? Elles m'ont toutes agacée...

- Lucas !

- Votre Majesté Impériale va t-elle bien ? c'est Gustave, un valet, qui croise mon chemin.

- Trouvez moi Lucas Enric. S'il-vous-plaît.

- Bien, votre Majesté Impériale.

Il repart aussitôt dans un dédale de couloirs tandis que j'attends impatiemment en me mordant la lèvre. Il revient un peu plus tard, accompagné du jeune homme, quelque peu étonné par ma demande impulsive. Je remercie le serviteur.

- Que puis-je faire pour vous, votre Majesté Impériale ?

- Et bien Lucas, tout d'abord, nous sommes presque amis, alors tu peux me tutoyer.

- Presque amis ? Votre Majesté Impériale m'honore.

- Lucas, je te nomme ami de l'Impératrice.

- Vraiment ?

- Vraiment.

- C'est une grand faveur que vous me faites, votre Majesté Impériale.

Je rigole.

- Ça, je n'en sais rien ! Bon, voici le problème. Je viens de me disputer avec mes amies et j'ai besoin de changer d'air. Je ne peux pas faire ça toute seule sinon j'aurai Rubis en permanence dans ma tête. Je voudrais que tu me sortes d'ici, fais moi faire ce que tu veux, mais fais moi change-moi les idées.

Il sourit, mais garde une mine incompréhensive.

- Pourquoi moi ? Vous... enfin tu as plein d'amis !

- Je viens de te dire pourquoi. Si elles étaient disponible je n'aurais pas eu recours à toi !

- En gros, j'suis le bouche-trou.

- C'est ça.

Il rigole, étonné par ma sincérité.

- Alors, s'il-te-plait, juste pour aujourd'hui, oublie qui je suis et imagine que je suis ton amie de toujours. Juste aujourd'hui.

- Bon... Alors on va t'inventer une identité ! Hannah, quatorze ans, étudiante en sociologie.

J'aurais pu rire à cela, mais entendre mon nom me fait frémir. Comment ai-je pu m'oublier ?

Il m'entraine alors en dehors du palais, où deux vélos bleus nuit nous attendent.

- Comment ...?

- Pas de questions. Je fais, tu fais. C'est tout.

Nous enfourchons les bicyclettes, et nous mettons à avancer. Je le suis, sans savoir une seule seconde où est-ce que nous allons. Mais peut m'importe, j'aime les surprises. Je suis telle une fourmi suivant la file, ne se souciant que des trésors qu'elle peut rencontrer en chemin. Le ciel est bleu azur, parsemé de coussins blanc cotonneux. La ville est magnifique, comme un tableau de Van Gogh en mouvements. Nos cheveux volent au rythme du vent, les miens roux comme l'automne, les siens bruns comme un terrier de lapins. Nous regardons l'horizon comme si c'était la première fois, et j'adore ça.