Les Larmes Noires du Dragon Tome 1 - Écuyère /// v2/// Terminé

Chapitre 48 - Légate et Souvenirs, fin

– Mais je croyais qu'elle était partie sans que personne ne sache vraiment où et...

– Non, j'étais là. L'Impératrice a donné l'ordre à Saraphia d'y aller. Elles savaient très bien toutes les deux que c'était une mission suicide.

– Et ma mère a... accepté ?

Sa voix lui parut d'un coup très aiguë.

– Oui. C'est même elle qui l'a proposé. Athélis aurait pu lui ordonner de rester, souffla Rise en serrant les poings. Elle ne l'a pas fait, elle l'a envoyé à sa mort.

– Vous ne l'appréciez pas, réalisa Obscura. L'impératrice a tué votre camarade de bimarcisia.

– Je... lui en veux d'avoir volé ma vie et la sienne, hésita Rise avant de continuer. Si je n'avais pas été affectée au palais, j'aurais pu accompagner Saraphia. J'aurais pu l'aider, ou même m'occuper de toi, plutôt que de te confier à Andvin. Sauf que je suis Paladine et que je dois la défendre comme je protège le royaume. La vie est cruelle et injuste, et c'est ainsi.

– Vous pourriez partir ou demander une nouvelle affectation.

– Je ne sais pas, j'y ai déjà songé, mais il y a toujours quelque chose qui me retient ici. Une obligation morale, je suppose, et puis je devrais trouver un remplaçant. Athélis dirige bien le Royaume, bien mieux que son père à mon avis, et elle le fait efficacement. Thévus était un tyran, je peux te l'assurer car je l'ai servi plusieurs années avant qu'il ait eu la meilleure idée de sa carrière en se jetant dans le grand escalier. Elle a repris le boulot parce qu'elle savait qu'elle était la plus capable, même si ça l'emmerdait au plus haut point. Elle fait ce qu'elle peut pour maintenir son pays à flot. Et je la respecte pour son dévouement, fit-elle avec un sourire étrange. Elle savait aussi qu'envoyer Saraphia était la meilleure chose à faire.

- C'est ma mère, la Chevalière Inconnue ? demanda soudain Obscura.

– Évidemment. Elle est partie avec un petit groupe de Chevaliers triés sur le volet. Ils avaient tous compris qu'ils n'en reviendraient pas. C'est elle qui a mis fin à la guerre, en sommes. Athélis a tenu à lui rendre hommage en lui dédiant un jour. Ça doit lui faire une belle jambe, à Saraphia.

– Il y avait un valet, avec elle ? Quelqu'un pour porter les affaires ou ce genre de choses ?

– Qui t'en a parlé ? grogna la femme.

– Oh euh, quelqu'un...

– De toute façon ça n'a plus d'importance. Je ne sais pas où il se trouve à présent, fit-elle avec un regard fuyant qui interpella la jeune fille. Les Éternels reviennent, ils préparent quelque chose. Le sacrifice de Saraphia n'aura servi qu'à quelques années de répit.

Elle soupira en essuyant un œil humide d'un revers de la main avant de s'exclamer : « Ah merde, voilà, avec toutes tes histoires je finis par me ramollir. T'es vraiment comme ta mère. Tu fais parler les gens sans qu'ils s'en aperçoivent pour leur tirer les vers du nez.

– Je suis désolée, je ne voulais pas vous rappeler trop de choses douloureuses.

Rise haussa les épaules et sortit d'une poche de sa redingote une petite boîte en fer blanc. Elle l'ouvrit et piocha une pastille noire.

– Je suppose que t'en veux pas ?

- Si, bien sûr ! sourit Obscura en se laissant tenter par un réglisse.

Elle n'allait pas repousser tous ses maladroits signes d'amitié. Elle plongea la main dans la boîte et posa un bonbon sur sa langue. Aussitôt, la saveur âcre du tabac à chiquer lui brûla la bouche. Elle cracha la pastille dans sa paume en toussant. L'horrible goût lui collait au palais comme du goudron.