Chapitre 25 - Foire et Gardénia

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« Pense avec ton cœur et aime avec ton esprit. »
Chevalière Mutsuliah de Boussole Rose

Obscura se réveilla le lendemain encore habillée de sa robe de chambre, la cristographie serrée dans son poing. Elle la replia et plutôt que de la ranger dans son sac, préféra la garder avec elle comme le médaillon qu'elle avait perdu.

Elle retourna en salle de Rixemagie pour récupérer une fois encore son épée : elle l'avait laissé sur place pour ne pas éveiller les soupçons de son passage. Chevalière Douceliah était là avec ses énormes chiens, pestant contre le Chevalier de Poussière qui avait ravagé le bureau. Elle râla aussi sur une histoire de jardin détruit, et de vol de chaussettes dans sa commode (également un coup du Chevalier de Poussière car il ne respectait vraiment rien). Dame Modoe essayait de calmer la colère de sa collègue tout en aidant les domestiques à nettoyer le chaos. Selon elle, rien ne manquait et de toute façon ne s'agissait que de vieux meubles abîmés et d'un mur effrité, rien de bien grave.

Elle salua Obscura d'un grand sourire et la protégea d'un interrogatoire surprise de Douceliah. La jeune fille, rassurée que la professeure ne semblait pas la soupçonner du tout pour le massacre de son bureau, repartit avec son épée pour en direction de la Forge.

Dès qu'on passait la porte, l'haleine brûlante du foyer vous écrasait de toute la chaleur de ses flammes entretenues nuit et jour par la Maîtresse de Forge. Comme à l'accoutumée, Obscura revêtit un tablier de cuir mais n'enfila pas les chaussures renforcées réglementaires. Elle avait l'autorisation de garder ses grosses bottes en peau de salamandre, encore plus solides. Elle s'attendait à être la seule coincée derrière son établi pendant les vacances mais Louhan était là lui aussi, courbé sur son ouvrage. Contrairement aux apparences, il n'était pas puni : cela faisait quelques semaines qu'il bricolait des babioles, avec la bénédiction de la Maîtresse Esobel.

Celle-ci s'occupait des gigantesques soufflets qui maintenaient le foyer dans un vrombissement de flammes de l'enfer. Elle ferma la porte du four, donna un coup de poing dans des machineries qui reprirent leur ronronnement habituel puis s'essuya les mains dans un vieux tissu qu'elle jeta plus loin.

- Tu as l'air d'aller mieux, tu penses être capable de soulever un marteau ? lança-t-elle à Obscura.

Avec elle, inutile de faire de tergiverser. Si elle prenait de ses nouvelles, c'était surtout pour ne pas risquer d'accident durant son cours.

« Parfait, tu vas m'aider sur les pièges à ours, conclut-elle d'une mine exaspérée.

Chevalière Douceliah avait passé une commande urgente de gadgets pour attraper le Chevalier de Poussière ou tout autre fripon criminel, ce qui empêchait la Maîtresse de Forge de consacrer tous ses congés à ses petits projets personnels. Du coup, pour gagner du temps et faire travailler ses écuyers par la même occasion, elle les employait comme main d'œuvre pour les tâches les plus simples.

La Forge se divisait en deux parties. L'une, rangée avec soin, avec des outils classés par utilisation et ordres de taille, ne souffrait d'aucun manquement à son organisation. Les écuyers devaient se plier à ce procédé rigoureux sous peine de sanctions (comme l'avait appris Louhan à ses dépens). L'autre partie de la Forge, réservée à Maîtresse Esobel uniquement, était une fichue pagaille créative dont elle seule connaissait la logique. Il y avait des vélins avec des plans étranges un peu partout, des tas de ferraille d'anciens prototypes oubliés, et toute sorte de bazars pourtant utiles qui encombraient son grand établi. Elle était de celles qui réparent les machines d'un savant coup de pied, et savait comment améliorer un mécanisme avec un bricolage improbable avec un vieux ressort, un bout de chiffon et ce truc qui fait pouët et qui traîne dans un coin depuis une éternité.

Les Larmes Noires du Dragon Tome 1 - Écuyère /// v2/// TerminéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant