Les Larmes Noires du Dragon Tome 1 - Écuyère /// v2/// Terminé

Chapitre 2 - Blaireau et Papillons

– Vous êtes en retard.

C'est la voix morne de Maître Patelin qui les accueillit lorsqu'ils entrèrent dans la classe.

Obscura et Garudiel étaient pourtant arrivés pile à l'heure mais les couloirs labyrinthiques de l'école avaient eu raison de leur bonne volonté. Garudiel n'avait vraiment pas le sens de l'orientation.

– Mais Monsieur, on ne savait pas où...

– Il suffit. Un véritable Chevalier ne se cherche pas d'excuse ridicule, sermonna le professeur.

Avec sa robe de bure et son dos voûté, il ressemblait à un vieux blaireau ronchon et déjà fatigué de l'année à venir.

– Laissez-moi deviner... Écuyer Garudiel Alasran-Ithsiyss, marmonna-t-il en cochant sa liste. Et Écuyère... Obscura Luminis.

Ses petits yeux gris se plissèrent et firent des allers retour entre la jeune fille et le parchemin. Puis sur sa chevelure rouge. Puis son épée. Finalement il leva le regard au ciel et les envoya s'asseoir dans le fond de la classe.

– Et posez donc votre joujou. Vous n'en aurez pas besoin pendant mon cours.

– Mais c'est une vraie, monsieur !

– Bien entendu que je me doute que c'est une vraie. Vous êtes bien du genre à en avoir une spéciale avec des bouts pointus partout plutôt qu'une qui fasse simplement ce qu'on lui demande sans en rajouter, bougonna-t-il. Et j'imagine que c'est un objet ancestral avec une histoire et patati et patata. Vous vous en occuperez plus tard, vous n'en êtes qu'a votre première heure ici. À chaque jour suffit ma peine.

Le visage en feu de s'être fait remarquer dès le premier jour, Obscura s'excusa avant de traverser la pièce sous les ricanements de ses nouveaux camarades. Dans un silence pesant, elle s'assit à une place libre et glissa son arme dans le rangement dédié à cet effet après l'avoir bien évidemment fait tomber par terre dans un fracas retentissant.

Tout gêné, Garudiel s'installa à côté d'elle dans l'un des fauteuils en velours carmin aussi beaux qu'inconfortables qui garnissaient le petit amphithéâtre. Et dans chacun d'eux, un élève les fixaient avec une curiosité amusée. Il y avait quelques sidhes, deux centaures et bien d'autres profils venant de tout le royaume... Mais aucun métis wyvern comme Garudiel. Ils reportèrent leur attention sur le professeur lorsque celui-ci reprit son cours dans une toux mécontente et apathique.

Obscura tint deux bonnes minutes avant de reporter la sienne sur sa voisine qui n'avait pas l'air très concernée par la litanie marmonneuse de Maître Patelin: jouer avec les petits papillons bleus qui voletaient entre ses doigts était plus intéressant. Sentant le regard d'Obscura posé sur elle, la jeune fille tourna vers elle son visage rond d'un vert tendre et lui sourit. Les œillets et les fleurs de poirier qui ornaient ses cheveux rose pivotèrent eux aussi leurs pétales délicats. Un doux parfum l'enveloppait : celui du jasmin, du chèvrefeuille et des pergolines sucrées. Ce n'était pas courant de rencontrer une dryade en dehors de leur forêt originelle, et encore moins vêtue d'une robe multicolore à motif de flamants roses et d'éléphants jongleurs.

– Je te rassure, tu n'as rien manqué d'intéressant, chuchota-t-elle à Obscura. Il râle depuis tout à l'heure sur le fait d'être des écuyers modèles et tout ça. C'est incroyablement ennuyeux.

– Merci, j'ai craint de rater une cérémonie importante ou quelque chose du genre.

– Je m'appelle Elsya'mandier, mais tu peux m'appeler Elsya, c'est plus simple. Je suis une dryade, dit la dryade.

– Et moi c'est Obscura, répondit Obscura.

– Ah ? C'est pas courant comme prénom pour une humaine.