Chapitre 1 ~ Ava

2.3K 75 4
                                    




      Je remonte la rue sombre d'un pas rapide. Il n'y a pas grand-monde ce soir et je ne tiens pas vraiment à m'éterniser dans le coin, notamment à cause de la présence de plusieurs bars pas loin. L'écho d'une musique me parvient d'ailleurs. Le vent frais de ce début de soirée m'assaille, parcourant mon corps de frissons, tandis que la boule de poils que je tiens fermement contre moi ne fait que gesticuler.

« Arrête un peu de bouger Albator ! soufflé-je à l'intention de ce chien agité. »

      Malgré mon ton autoritaire qui le fait se stopper, je ne peux m'empêcher de sourire. J'ai beau le connaître depuis un an maintenant, son prénom m'amuse toujours autant. Ce cocker anglais noir aux yeux et au museau marrons appartient à mes voisins de palier. J'ai eu l'occasion de sympathiser avec eux juste après mon emménagement dans cette nouvelle ville. La première fois que nous nous sommes croisés dans l'immeuble, Albator m'a sauté dessus en aboyant joyeusement, ce qui nous a tous fait bien rire. Nous avons un peu discuté dans le hall, avant qu'ils n'aillent le promener. Depuis, Albator m'offre cet accueil à chaque fois qu'il me voit. Malgré le fait qu'il ait déjà dix ans, il semble toujours autant enthousiaste et joueur.

      Marc et Solange -mes voisins- ont fini par me proposer de le promener les week-ends, quand j'ai un peu de temps libre, ce que j'ai accepté sans hésitation. Je me rappelle encore de la fois où ils m'ont expliqué l'origine de ce nom. Apparemment, c'est leur filleul qui lui a donné ce nom très original étant petit, parce qu'il lui faisait beaucoup penser au personnage d'un manga qui passait souvent à la télé avant. Ne voyant pas trop à quoi il ressemblait, j'ai fait quelques petites recherches une fois rentrée chez moi. J'ai dû fixer ce personnage aux longs cheveux bruns, à la cape rouge et noire, et au cache-œil pendant plusieurs minutes avant d'admettre qu'il y avait en effet une pointe de ressemblance avec ce petit chien adorable, surtout au niveau de la crinière.

      Mais ce soir, Solange m'a appelé à 21h en panique, en disant qu'Albator s'était enfui et que son mari et elle ne savaient pas où il était. Apparemment, ils étaient en train de le promener, quand le chien s'est brusquement enfui alors que ses maîtres l'avaient laissé profiter du parc dans lequel ils étaient sans le garder en laisse. Voulant les aider, je suis sortie de chez moi pour partir à la recherche du fameux disparu en disant à mes deux voisins de rentrer chez eux pour se reposer un peu. Après presque une heure à arpenter les rues de notre quartier, j'ai fini par le retrouver, aux côtés d'un cavalier King Charles blanc et marron que j'ai déjà eu l'occasion de croiser durant mes balades avec Albator. Ce chien ou plutôt, cette chienne, a visiblement capté l'attention d'Albator.

« Non mais je rêve... vous avez vraiment voulu faire une pseudo-fugue entre amoureux, soupiré-je pour combler le silence. Bande de petits cachotiers... »

Albator m'offre un regard larmoyant qui en ferait craquer plus d'un et auquel j'essaie tant bien que mal de résister.

« Ah non, pas à moi ! Les larmes de crocodile ça ne marche pas Albator. Marc et Solange se sont fait un sang d'encre, pendant que toi tu roucoulais tranquillement dans ton coin ! Tu la reverras ta belle ne t'en fais pas. Pas besoin de faire le bad cocker pour l'impressionner, tu sais ? »

      Je réprime un sourire à mon très mauvais jeu de mots qui convient pourtant parfaitement à sa situation. Mon petit Albator a, de ce que j'en sais, toujours été gentil et adorable. Il n'a jamais pris la fuite comme il l'a fait aujourd'hui et quelque chose me dit que la chienne avec qui je l'ai retrouvé n'est pas étrangère à ce comportement. Alors ce n'est pas une petite femelle tout juste débarquée dans sa vie qui va l'influencer.

      J'arrive enfin devant mon immeuble et monte les marches quatre à quatre, trop pressée de ramener cette boule de poils à ses propriétaires. Devant chez eux, je reprends doucement mon souffle après avoir sonné. La porte s'ouvre quelques secondes plus tard à la volée sur une Solange en larmes et au regard paniqué. Je lui tends fièrement Albator.

Juste comme avantOù les histoires vivent. Découvrez maintenant