Chapitre 20 ~ Scott

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Les fenêtres baissées et le pied enfoncé sur la pédale d'accélérateur, je laisse le froid de la nuit emporter toute ma colère. Le vent me fouette de part en part, m'empêchant de penser à quoi que ce soit d'autre qu'à la route que j'emprunte. Heureusement pour moi, je n'ai pas beaucoup bu ce soir, notamment parce qu'aux soirées, je m'arrange toujours pour être le plus lucide, afin de pouvoir ramener Jared et sa sœur sains et saufs. Sinon, ce serait l'accident assuré avec ces deux-là. Après plusieurs minutes, je me range sur le bas-côté et éteins les phares. Je reprends lentement mon souffle et desserre ma prise sur le volant. Le silence de la nuit m'enveloppe doucement, tandis que je laisse mon regard se perdre à l'horizon de cette rue vide de toute présence que je ne connais pas. Les quelques lampadaires éclairent faiblement les trottoirs.

Cette conversation avec Ava m'a vraiment énervé et je n'ai pas trouvé d'autre moyen pour me détendre que de faire rugir le moteur de ma voiture. Maintenant que l'adrénaline est retombée et que ma colère s'est finalement estompée, je me donne enfin le droit de repenser à ce que nous nous sommes dit. Comment fait-elle pour me sortir de mes gonds aussi facilement ? J'ai pour habitude de toujours garder mon calme, même dans les pires situations, mais pour je ne sais quelle raison, tout ça s'envole dès que je suis près d'Ava. Je peux être pris d'une envie irrésistible de l'embrasser et d'un coup, vouloir tout casser autour de moi, comme si ça allait changer quelque chose.

Elle croit encore pouvoir faire revenir l'ancien moi, tout ça parce que j'ai été un peu gentil avec elle. C'est bien pour ça que je l'ai fait rencontrer Jared et Tessa. D'ailleurs, leur comportement de ce soir était encore pire que d'habitude, même moi j'ai presque eu envie de vomir quand Tessa faisait tous ses bruits bizarres. Qu'est-ce qu'elle était gênante... Mais je voulais qu'Ava voit, qu'elle comprenne celui que j'étais à présent et, même si je l'ai fait de façon brutale, j'espérais qu'elle prendrait conscience du danger que je représente pour elle. Mais ça a juste eu pour effet de l'inquiéter et de lui donner encore plus envie de me sauver des ténèbres dans lesquels je suis. N'importe qui d'autre aurait fui à toutes jambes et c'est bien pour ça qu'elle m'agace, parce qu'elle ne semble pas vouloir le faire, malgré tout ce que je peux dire ou faire. Elle n'est vraiment pas croyable...

Des rires tonitruants résonnent soudain près de moi, me sortant de mes pensées. Lorsque je tourne la tête, j'aperçois un groupe de garçons visiblement bien bourrés. Ils discutent de la soirée, de leur concours de beuverie, et des jolies filles qu'ils ont vues mais qu'ils n'ont pas pu avoir d'après ce que je comprends. Leur humour beauf me fait lever les yeux au ciel. Je décide d'attendre patiemment qu'ils s'en aillent pour reprendre le fil de mes pensées.

« Oh, vous avez vu la meuf là-bas ? Elle est canon, non ? Venez on va la voir. »

À la remarque de l'un de ces idiots, je tourne curieusement la tête vers la fille en question et ouvre de grands yeux en voyant qu'il s'agit d'Ava. Sa robe bleue fouette l'air autour de ses longues jambes qui foulent le trottoir d'en face avec détermination. Sa démarche est gracieuse mais aussi tellement imposante que je sens d'ici là que quelque chose ou quelqu'un l'a contrariée. Et ce quelqu'un, c'est forcément moi.

Mais je n'ai pas le temps de m'attarder sur sa silhouette que mon pied écrase la pédale d'accélérateur, me faisant démarrer en trombe. Je ne sais pas pourquoi je fais ça, mais quelques secondes plus tard, je me retrouve à rouler lentement sur la route à côté d'Ava qui continue de marcher, complètement perdue dans ses pensées. Elle finit par prendre conscience de la voiture qui roule près d'elle et tourne distraitement la tête vers moi, avant de lâcher un cri aigu de surprise et d'ouvrir de grands yeux. Je jette un coup d'œil dans mon rétroviseur et constate que le groupe d'étudiants d'il y a quelques secondes est en train de rebrousser chemin. Bon débarras. Je freine en même temps qu'elle s'arrête. Nous nous dévisageons le temps d'un instant, avant que je ne décide de briser le silence.

Juste comme avantOù les histoires vivent. Découvrez maintenant