Chapitre 39

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La main réconfortante sur mon épaule me déleste immédiatement d'une partie de ma colère. Mon seul ami et véritable soutien que je n'avais pas vu depuis notre arrivée ici. Je le rejoins assis sur le bord du bassin.

- Comment vas-tu Thalya ? me demande Léandre compatissant.

Pourtant pas très tactile, je pose ma tête sur son épaule, et éprouve la sensation d'avoir trouvé un refuge pendant la tempête. Je ferme les yeux m'enveloppant de cette sensation de répit. Son bras fraternel passe autour de mon épaule meurtrie. Je profite de son réconfort ne pouvant lui répondre.

- Thalya, l'arène... hasarde-t-il.

Je me tourne vers son visage soucieux.

- Un véritable massacre, par ma faute, je le coupe sans plus oser le regarder. Je ne suis pas comme vous Léandre. Je ne suis pas d'ici, je ne suis pas préparée à tout ça.

- En es-tu sûre Thalya ? Je veux dire, je t'ai observée. Tu n'as tué personne alors même que c'est ce qu'on attendait de toi. Tu les as fait plier sans les tuer et tu savais parfaitement comment le faire. C'est comme si tu avais été entraînée pour ça, que ton corps anticipait, réagissait. En es-tu certaine de ne pas avoir ta place? m'interpelle le grand blond.

- Je ne sais plus rien Léandre, réponds-je perdue, les yeux rivés sur le surhomme au centre du bassin, responsable de mon tourment.

Le lendemain matin j'avais eu la surprise de trouver au pied de mon lit un baluchon avec une tenue d'entraînement. On était venu toquer à ma porte, m'avait conduite au cœur de l'arène où le bataillon de mon ami s'échauffait contre les palus, poteaux en bois faisant office d'adversaire. Le plaisir de le rejoindre fut de courte durée lorsque son instructeur me déposa sur les épaules un sac de dix kilos m'enjoignant de faire des tours de piste. La routine s'installa vite: petit déjeuner aux aurores, footing, salle d'armes, entraînements au ludus, déjeuner, de nouveau arène. Le premier soir m'avait harassé. Au moins ai-je eu le plaisir de ne pas cauchemarder et de ne plus me sentir isolée. Les jours suivants, je me rendis vite compte qu'on me faisait travailler deux fois plus. Les intentions de notre maître étaient claires: m'en faire baver pour me faire comprendre qu'il fallait que je prouve que j'avais ma place ici. Il alourdissait mes courses de poids, me mettait plusieurs adversaires en combat rapproché. Je n'avais aucun répit. Les hommes de ma division n'étaient toujours pas enclin à discuter. Ils persistaient à s'exprimer dans leur langue mais au moins n'émettaient pas de gestes déplacés. Certains déjeunaient même à notre table. Les autres m'ignoraient et après mes débuts chaotiques c'était disons un moindre mal.

Je repousse aisément les assauts de mon adversaire assigné à mon entraînement de l'après-midi. Toujours les mêmes enchaînements, toujours les mêmes adversaires. Au bout d'un mois tout était devenu si prévisible.

- Et toi Thalya qu'as-tu prévu de ta permission ce week-end ? N'y a-t-il personne qu'il te tarde de retrouver ? me demande Léandre dans mon dos.

Je repousse du pied une attaque ratée, pour faire face à mon ami et assimiler sa question. Je réalise seulement en cet instant deux faits. Le premier: que le week-end débute demain. Le second: que plus un seul instant depuis mon intégration je n'ai songé à repartir d'où je venais, retrouver un semblant de vie normale auprès de mes amis. Un énorme poids s'abat soudain sur mes épaules. Distraction que ne manque pas de saisir Félix, mon assaillant, pour m'asséner un coup dans les côtes.

- Thalya ? insiste Léandre qui perçoit ma déroute.

- Je...hum, je n'y ai pas encore pensé, éludé-je.

ArèsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant