Fix you.

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« Bonsoir NamJoon. Comment a été ta journée ? »

« Aujourd'hui, on m'a invité et suivant ton conseil, j'ai accepté même si l'envie n'y étais pas vraiment. » YoonGi sentit un sourire fleurir sur ses lèvres. Comme à leur accoutumée, il chercha à faire la conversation sans pour autant le brusquer ou donner l'impression de le forcer. En arriver à ce stade ne fût pas facile, il a dû s'armer beaucoup de patience. Ils parlèrent de tout et de rien. Il cherchait à maintenir le rythme de la discussion lorsque que son interlocuteur devint subitement silencieux.

« Dors bien NamJoon, je suis là quand tu auras besoin de parler, OK ? A tout moment, je suis disponible.» A chaque fois, la discussion se terminait avec cette rengaine où seule la formulation changeait. YoonGi contemplait le téléphone en pensant à cet étudiant. Leurs échanges téléphoniques duraient maintenant depuis plus de six mois.

Le commencement a débuté avec quelques mots alarmants : « Je veux en finir parce que je n'ai plus la force de continuer. » Il a dit, avec dans la voix, une chose que YoonGi a très bien reconnu : la renonciation.

Cette renonciation qu'on éprouve lorsque la douleur devient insupportable, lorsque les pressions s'accumulent et s'alourdissent, lorsqu'on pense que plus personne ne viendra à votre aide. Cette renonciation à la vie quand on croit qu'on n'a plus aucune raison valable de s'accrocher à elle. Cette résignation mêlée de déchirement et de désespoir. Cette voix cassée, ce murmure déchirant. L'image que cet étudiant pouvait être sur le toit d'un immeuble, ou au bord d'un pont, ou enfermer dans la salle de bain ou isolé dans sa chambre, sur le moment de cette appelle, YoonGi se souvenait parfaitement d'avoir pensé à ça. Pendant un court instant, il se réexpédia quatre années en arrière. L'année où tardivement dans cette soirée de Samedi, son frère l'a appelé avec exactement la même craquelure et le même anéantissement dans la voix. Ce dernier l'a appelé pour lui dire adieu, quelques minutes avant de s'enfermer dans sa chambre à attendre de mourir de suffocation de gaz carbonique. Jusqu'à l'heure actuelle, ce souvenir le hantait toujours. C'est cette perte qui l'a fait décider à fonder cette ligne téléphonique à la disposition de ceux et de celles voulant en finir. Perdre un frère ; un proche et un camarade de classe par suicide vous laisse des profondes marques émotionnelles. Avec l'aide d'amis fidèles et en possédant un capital assez important, il a mis en place ce numéro qu'on pouvait joindre à toute heure. Ils visaient tout type d'âge et tout type de personne mais ceux étant déterminés à en finir l'étaient vraiment ; donc, ils passaient directement à l'acte sans chercher à recevoir de l'aide. Lui et ses amis utilisaient tous les moyens existants pour répandre leur service : sur internet, sur les affiches, par les flyers, par des annonces dans les journaux...etc. Oui, des suicidaires les appelaient, surtout les lycéens et les étudiants, ceux étant compris dans une tranche d'âge entre 16 ans et 30 ans. A croire qu'à passer la trentaine, les gens ne souhaitaient plus changer d'avis...ou pensaient qu'ils n'ont pas besoin d'aide ; par fierté ou simplement, parce qu'ils n'en pouvaient plus.

YoonGi se leva et en profita pour s'étirer. Ces derniers temps, les appelles se faisaient rares et NamJoon restait son client régulier. Au fil du temps, YoonGi percevait comme un rapprochement entre eux bien qu'ils ne se connaissent que par leurs prénoms, rien de plus. Par moments, NamJoon a laissé filtrer des minimes informations personnelles, contrairement à YoonGi. Il ne l'a pas fait, pas parce qu'il ne voulait pas mais parce que la discussion ne tournait pas autour de lui, et parce que c'est encore moins lui qui nécessitait de l'aide. Il savait que NamJoon allait à l'Université, mais lequel ? Il ne savait pas et ne l'a pas demandé. Il a appris que ce dernier était intelligent et qu'il suivait des cours en Informatiques et en Mathématique appliqué, et de ce fait, il pourrait aisément barrer nombreuses Université mais encore, il n'a rien fait. Il savait également que l'étudiant avait peu d'ami parce qu'il préférait rester chez lui ou lire au lieu de sortir. Une fois, quand ils ont parlé d'émission télévisée, NamJoon avait imité avec perfection l'accent d'un des présentateurs originaire du sud du pays, alors, soit il venait aussi de là-bas, soit il excelle dans les imitations pensa YoonGi. Et pas plus tard que la semaine précédente, l'étudiant a mentionné son frère, disant qu'il lui manquait beaucoup et à son ton, YoonGi sut qu'heureusement, le frère en question devait juste habiter ailleurs au lieu d'être dans un endroit inaccessible.

Au cœur de la fiction (Seconde partie) ⁿᵃᵐᵍⁱ Où les histoires vivent. Découvrez maintenant