Alive.

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­ [Narration de Min YoonGi ; 2020]

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La pauvreté et la misère, nous avions connu ça.

La famine, le froid et le manque de sommeil. Ce sont les états qui ont bercés nos longues nuits d'insomnies. Durant ces nuits, on se contentait d'eau afin de calmer nos ventres qui gargouillaient bruyamment en signe de protestation contre la famine qu'on imposait sans qu'on le veuille.

Une fois par mois, on se permettait de se gaver des aliments de rues que nous raffolions. C'était dur, vraiment dur. Notre maison tombait en ruine et nous n'avons pas le luxe de le remettre sur pieds. J'ai fui l'orphelinat parce que je pensais m'en sortir mieux en étant tout seul. A l'époque, la condition dans ces lieux n'était pas fameuse comme on laissait entendre : du moins, dans celui où j'ai été placé ; la privation, une rude discipline et la maltraitance régnaient en maître. Toujours à l'époque, les gens ne se bousculaient pas pour t'adopter chez eux car après tout, qui voudrait recueillir des gosses de quatorze ans chez eux ? J'ai eu quinze ans lorsque j'ai déserté ce lieu qu'on désignait comme 'foyer'. J'avais tout juste une identité, un maigre viatique qui m'aurait à peine permis de tenir deux mois, un sac à dos remplis de vêtements propres mais usés, et rien d'autres. Mes possessions matérielles ont été maigres et heureusement, en contreparties, j'avais la tête sur les épaules, l'esprit débrouillard et comme ils le disent, j'avais une grande potentielle intellectuelles. Pourtant, malgré cela, j'ai dû vite me désenchanter. La charité ne revêt pas la richesse ni la propreté. Les gens fortunés sont ceux les plus avares mais les humbles non plus n'ont pas beaucoup de bonté comme on le pense. J'ai failli ne pas m'en sortir. Ce fût une rencontre qui m'a sauvé. Une rencontre sous forme d'un garçon de même âge que moi. Lui il venait de tout perdre, mais au moins, il a gardé des biens matérielles. A l'époque, c'était un révolté, un genre d'indiscipliné qui voulait prouver à tout le monde qu'il était capable de vivre par lui-même et qu'il n'avait besoin de personne. Nous étions seuls et c'est cette solitude qui nous a rapprochés. Lui, il était également animé par la colère et le chagrin tandis que moi, c'est par l'aigreur et la rancune. Entretenir une aussi grande maison n'est pas chose aisée, alors, il l'a vendu et a mis en épargne l'argent. C'était à la fois drôle et dramatique : nous vivions dans la misère alors que quelque part, un petit capital était au chaud quelque part...

Vivre dans un sous-sol miteux qui empestait des odeurs le plus horribles, un minuscule endroit qui grouillait de rats et de cafards et d'autres insectes immondes, une minuscule surface qui ne nous tenait même pas chaud et dont les bruits nous empêchaient de nous reposer. Rien n'y marchait : que ce soit la canalisation ou l'électricité. Mais après-tout, cela correspondait à la somme miséreuse qu'on nous demandait...

Je n'étais pas assez intelligent pour me focaliser dans les études, néanmoins, j'ai persisté. Mais il faut avouer que vivre dans des telles conditions ne développe pas sainement le morale ni le mental. Il m'arrivait de rêver, de me perdre dans un futur brillant, mais à chaque fois, la réalité me revenait en pleine face à grand coup de poing.

Trimer durement n'a pas suffi parce qu'à chaque fois que je pensais m'en sortir, je retomber plus profondément...Mais heureusement qu'on me tendait toujours la main afin de m'en extraire. J'ai pratiquement expérimenté plusieurs types de besognes, que ce soit physiquement éprouvant ou non.

La pauvreté vous colle à la peau et la misère s'affiche sur votre visage. Il m'a fallu longtemps pour m'en débarrasser. Pendant certaines nuits, les visions cauchemardesques me taquinaient et ne me laissaient pas de répit. Je me réveillais brutalement, le ventre noué d'inquiétude. Il me fallait me rassurer : je palpais le velouté des draps et je fixais la lumière tamisé du plafond en reprenant mon souffle. Je me sentais terriblement seul dans cette grande maison. Le climatiseur maintient une température ambiante, cependant, j'ai froid...Comme lors de ces nuits où on devait se tenir l'un contre l'autre pour produire de la chaleur... Je frisonne et finis par me lever et vêtir une robe de chambre. Je déambule dans la maison avec une tasse de thé chaude dans la main. Je parcoure la maison et repense à certains épisodes qui me tenaient à cœur. En arrivant devant le grand miroir de la salle de bain, je m'inspecte. L'image renvoyée me plaît : j'ai muri ; le maigrichon d'autre fois a disparu pour laisser place à un jeune adulte au corps fin et sain. Les traces de pénuries se sont effacées, à présent, je donne l'air d'un homme ayant triomphé dans la vie...Ce n'était pas réellement faux, sans toutefois être la vérité totale. Je suis persuadé que je n'aurais jamais été dans cette somptueuse demeure sans lui... En gros, je lui dois tout, absolument tout.

Vers minuit passée, les paupières alourdies, je retournais dans le lit et m'assoupissais rapidement. Le soleil pénétrait à flot dans la chambre lorsque je fus réveillé. Par la fenêtre, cette journée printanière s'annonçait magnifique. Les diverses couleurs des fleurs mêlées avec la verdure ainsi que l'éclat lumineux du soleil et la clarté du ciel me donnent un certain sentiment d'euphorie. C'est grâce ce genre de journée que le passé n'est plus qu'un vague ombre qui s'éloignait lointainement. Je fus d'humeur à développer mon projet et j'étais tellement absorbé que j'ai à peine remarqué l'heure qui tournait. J'ai avalé une soupe et je me suis remis au travail. Ce n'est que quand le soleil commençait à se décliner que je me stoppais et en contemplant mon œuvre, la satisfaction m'a fait pousser un petit soupir.

« Coucou, je suis de retour. » Entendis-je murmurer. Mes yeux s'ouvrent subitement, puis une immense satisfaction me délivre et une joie sincère me remplit.

« Mais ne devais-tu pas ne rentrer que demain ? Quelle belle surprise. » Dis-je en me calant contre lui. Contre mon gré, je me suis mis à dépendre de lui : de sa présence, de sa voix, de ses yeux...De tout de lui en fait, même les plus minimes. A un moment, je n'étais plus capable de m'autonomiser ; j'éprouvais constamment la nécessité de l'avoir à ma proximité pour pouvoir faire quelque chose de lucratif, j'avais besoin qu'il me motive et qu'il me félicite et m'encourage afin que je puisse avancer pas à pas. Lorsque sa situation s'est améliorée, j'ai eu tellement peur qu'il me laisse. Mes peurs sont restées des peurs parce qu'il n'est jamais parti, au contraire ; il a expressément manifesté son soutien. Plus tard, j'ai réalisé que la nature de notre relation est ambigüe et je n'ose pas la clarifier car ça pourrait tout gâcher...

« Demain, donne-moi ta journée. » Me dit-il.

« Je te cèdes même ma semaine si tu le veux. » Et il fait mine de réfléchir profondément avant d'hocher la tête.

La pauvreté et la misère, nous avions connu ça et jusqu'à maintenant, ces états restent des vifs souvenirs mais je me suis rendus compte qu'avec lui, tout au long, ça a été moins dur.

Mais même si à présent nous vivons dans l'opulence, il me semble que quelque chose manquait... Je dispose des choses matérielles dont j'ai besoin, alors, pourquoi j'ai l'impression d'être infortuné ? Je suis attristé...Mais par quoi exactement ? Je n'arrive pas à situer clairement la réponse.

Au cœur de la fiction (Seconde partie) ⁿᵃᵐᵍⁱ Où les histoires vivent. Découvrez maintenant