21. Tout ira bien

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Point de vue de Chris :

— ... Il y a un problème avec notre fille ?

Caroline secoua négativement la tête.

— Non, ne vous en fait pas, elle est là.

Elle ajusta lentement la sonde et nous parvînmes à voir la petite dans une drôle de position.

— Alors, pour votre fille, les choses sont un peu plus compliquées. Elle est au-dessus de son frère, tête-bêche. Elle est en position transversale dorso-postérieure, c'est-à-dire que comme le petit, elle est en horizontale, avec les jambes repliées haut sur sa poitrine et le menton rentré... Regardez, elle suce son pouce... Elle pèse et mesure presque comme son frère, leur développement est pratiquement identique, tout va bien de ce côté-là...

— Pourquoi dites-vous que les choses sont plus compliquées ? grimaça Isabella.

— En fait, cela concerne le placenta et le col de l'utérus. Ils sont partiellement espacés, comparés au placenta de votre fils qui est normalement attaché à l'utérus. Et regardez bien la position du fœtus, ses mouvements sont restreints. Votre fille est un peu à l'étroit, tandis que son frère a plus d'espace et bouge plus fréquemment. Il est plus actif, et la plupart du temps, les coups de pied que tu ressens viennent probablement de lui. Ton ventre est comme un terrain de jeux pour eux et le petit domine la partie, en quelque sorte... Pour l'instant, ils sont tous les deux dans une position impossible pour un accouchement naturel, seule une césarienne est envisageable. Mais, si d'ici deux semaines, le garçon se retourne la tête en bas, on peut procéder à un accouchement par voies basses et s'il se présente par le siège, on peut tenter de l'aider à se retourner, sinon un accouchement par le siège est faisable s'il s'agit d'un siège décomplété, avec une péridurale obligatoire dans ce cas. Notez bien que la naissance du premier jumeau se déroule comme lors d'un accouchement normal, mais là, c'est surtout pour la petite que je m'inquiète.

— Comment ça ? fronçai-je les sourcils.

— Si on opte pour un accouchement naturel, c'est le petit qui naîtra en premier. Lorsque son frère sortira, la petite aura suffisamment de place pour se retourner à son tour, mais si elle ne le fait pas, et que par malheur, le décollement de son placenta devient critique, une intervention chirurgicale sera nécessaire. Croyez-moi, le plus difficile pour Isabella serait d'en arriver là...

Je déglutis. Isabella souhaitait ardemment les mettre au monde tous les deux naturellement pour avoir droit à son contact peau à peau avec eux, mais là, je commençais à douter de la réalisation de son rêve de jeune maman - en tout cas avec notre fille. Ses yeux se remplirent de larmes, mais cette fois-ci, ce n'était pas de la joie. Elle était effondrée. Mon cœur se pressa douloureusement dans sa cage thoracique.

— Qu'est-ce qu'on peut faire pour les aider à se retourner ? tentai-je alors.

— Compte tenu de la fragilité de l'un des placentas, Isabella devra limiter au maximum ses mouvements et restée allongée. Tout effort, aussi minime soit-il, pourrait être dangereux, répondit-elle.

— Il y a forcément un moyen ! refusai-je d'abandonner.

— En dernier recours, les médecins pourront essayer de retourner votre fils eux-mêmes, mais c'est très douloureux et ce n'est pas faisable avant l'accouchement. En attendant, vous pouvez envisager l'haptonomie, en communiquant avec vos bébés à travers des gestes et des caresses, vous pouvez guider votre petit pour qu'il change de position... Sinon, une sage-femme vous montrera des exercices qui, j'insiste, ne demandent pas beaucoup d'efforts pour la maman.

Je hochai la tête, un peu plus confiant, puis souris à mon épouse qui s'était heureusement calmée. J'embrassai le revers de sa main toujours dans la mienne et lui murmurai que tout allait bien se passer.

Engendrement [Tome 2]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant