Engendrement [Tome 2]

63. Quadruple date

Je coinçai le stylo entre mes dents tout en tapotant du bout des doigts sur ma cuisse, plongée dans une énième lecture du contrat. Ma décision était prise ; j'allais le signer. Mais avant cela, je souhaitais en discuter avec Chris. Je voulais clarifier certaines pratiques, obtenir des assurances et, finalement, apposer nos signatures en même temps...

— Votre thé, Isabella.

Je sursautai en levant les yeux sur Marie. Par réflexe, je pressai les feuilles contre ma poitrine pour dissimuler leur contenu, puis je lui adressai un sourire nerveux. Elle fronça les sourcils, tenant la tasse chaude dans sa main.

— Qu'est-ce que vous faites ?

— Oh... rien de spécial... juste de la paperasse pour le boulot, mentis-je, embarrassée.

Sérieux Isabella, le boulot ?

— Comme je reprends bientôt, je voulais être à jour, continuai-je d'improviser.

— Ah ! J'ignorais que le BDSM était un terme commercial.

Merde. Mes yeux s'arrondirent et mon sang ne fit qu'un tour. La gouvernante posa mon thé sur la table basse avant de prendre place sur le canapé à côté de moi. Je la fixai, paralysée par la gêne.

— Je ne suis pas stupide Isabella. En rangeant votre chambre l'autre jour, j'ai découvert vos jouets... Je n'ai pas fouillé, je vous assure ! Le dernier tiroir de la commode était simplement resté ouvert, vous l'avez oublié...

Mon Dieu. Elle avait tout vu ? Le martinet, les plugs, les godes-ceinture ? J'étais tétanisée, c'était un cauchemar !

— Je sais que cela ne me regarde pas, mais si vous avez besoin d'une oreille attentive, je suis là, je ne vous jugerai pas, poursuivit-elle avec gentillesse.

— Marie, je... je suis vraiment désolée...

Pourquoi m'excusais-je ? Après tout, j'avais le droit de faire ce que je voulais chez moi ! Mais je respectais Marie et cette situation était gênante pour nous deux.

— Ce n'est pas nécessaire, me sourit-elle. Je suis peut-être vieux jeu, mais je ne suis pas fermée d'esprit. Les marques sur votre corps l'année dernière, c'étaient des marques de fouet, n'est-ce pas ? Vos familles sont au courant, mais elles sont si choquées que personne n'ose en parler...

Je clignai des yeux, désorientée. Il se passait quoi là ? Que cherchait-elle à faire ?

— Marie, je ne veux pas parler de ça avec vous, grimaçai-je.

— Je comprends, mais je sais que vous n'avez personne avec qui en discuter. Votre famille ne comprendra pas, ni même votre frère ou vos cousines. Alors je veux que vous sachiez que je suis là si jamais vous en avez besoin... C'est important de vous confier à quelqu'un d'autre qu'à votre époux, Isabella.

La brune posa tendrement sa main sur mon épaule, me souriant avec bienveillance, puis se leva pour retourner à la cuisine. Je l'appelai avant qu'elle ne s'éloigne trop :

— Comment connaissez-vous le BDSM ? l'interrogeai-je, curieuse.

Elle se retourna lentement vers moi :

— La romance. Je ne paie pas de mine, mais j'ai un goût prononcé pour les histoires... osées.

— Vous fantasmez secrètement sur ça ? m'enquis-je.

— Pas vraiment. Je viens d'une famille catholique, où mes tantes sont des nones. Elles ne me laissaient pas fréquenter de garçons, et lorsque le moment de me marier était venu, je suis parti de chez moi pour échapper à un forcé. Aujourd'hui, je suis une vielle fille, ayant pour seule famille ma demi-sœur, et je travaille pour votre famille depuis quinze ans. C'est ma vie, je l'accepte, mais si je pouvais revenir en arrière je changerais beaucoup de choses ; la première serait d'affronter ma famille au lieu de fuir lâchement comme je l'ai fait, et ensuite, je sortirais avec beaucoup de beaux garçons.