CHAPITRE QUARANTE-SEPT

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CHAPITRE QUARANTE—SEPT

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        00h14, et je n'ai pas sommeil. Je crois que je ne le trouverai pas de si tôt, au vu des circonstances. Livaï s'en va aujourd'hui. Son vol est à 20h30. Ça y est. Le moment tant redouté est arrivé. Celui que je voulais à tout prix éviter et que je ne pouvais pas me résigner à voir se produire. Mais il faut croire que mes espérances et mes souhaits n'allaient pas changer la donne. Livaï est vraisemblablement destiné à partir, c'est ainsi. Je n'ai d'autres choix que de m'y plier, à mon plus grand dam. Ce fameux jour de malheur est finalement venu à une vitesse folle et bien trop brusque. J'avais beau tenter de m'y préparer, je continue de me dire qu'une certaine partie de moi me sera arrachée avec Livaï si ce dernier s'en va. Tragique. Mais c'est le triste sort qui m'est manifestement réservé. Ce n'est qu'une question d'heures avant que je ne me vois accepter de force la dure réalité que mon petit-ami me quittera et que la distance qui s'imposera injustement entre nous se comptera par plus d'une dizaine de kilomètres. J'ai mal rien qu'en y pensant. C'est sans nul doute pour ça que je n'arrive pas à dormir.

Livaï quant à lui dort profondément, toujours aussi insouciant qu'à son habitude. Contrairement à moi, il ne semble pas le moins du monde affecté par le fait que d'ici ce soir, nous serons séparés pour une date encore indéterminée. Je trouve ça injuste. Moi je peine à m'endormir parce que je songe à la fin imminente et tragique de notre couple, alors que lui roupille tranquillement, sans se préoccuper de la souffrance qu'il risque à tout moment de m'infliger, une fois installée dans sa nouvelle université, auprès de son ex et entouré de toutes ses étudiantes qu'il rencontrera et dont je ne soupçonne pas l'existence. Embrouillée par un flot de pensées, plus négatives les unes des autres, j'enfouis rageusement ma tête dans mon oreiller. Je me retourne ensuite dans mon lit, de sorte à être allongée sur le dos, fixant désespérément le plafond rendu sombre dû à la pénombre dans laquelle est plongé la chambre. Nerveusement, je me mets à triturer le bracelet qui orne mon poignet. Je pourrai aller me faire une partie de jeux-vidéos. Mais je ne suis pas sûr de vouloir quitter Livaï alors que c'est la dernière fois qu'on dort ensemble dans ce lit que je ne partagerai déjà plus avec lui ce soir.

Je réprime un soupir, remonte la couette jusqu'à ma tête et pivote vers le corps endormi de Livaï en prenant appui sur mon flanc gauche. Fort heureusement, il ne me fait pas dos puisque celui-ci fait office d'appui sur le matelas, mais sa tête est légèrement tourné dans l'autre sens, alors que je voudrais que son beau visage soit face au mien, que je puisse profiter de l'admirer tant que je peux encore le faire. Mais je décide de lui faire dos, me forçant à trouver sommeil, en sachant que je n'y parviendrais pas si je me mettais à contempler le faciès parfait de celui à côté de moi. Livaï va partir. Il va s'en aller. Et il ne lui faudra que peu de temps pour se lasser de moi et me quitter définitivement pour de bon. Ses déductions ne cessent de se répéter, de se développer, et de me torturer l'esprit. Impossible que je m'endorme.

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Le lendemain, je peine à garder les yeux ouverts et c'est loin de m'arranger. Cela ne fait qu'accroître la crainte psychotique que je me suis créée et qui me tenaille le ventre à l'idée que si je me permets durant ne serait-ce qu'un quart de seconde à abaisser mes paupières, je n'aurai pas le privilège de voir Livaï partir. Et c'est bien la dernière chose que je souhaite. Même si je ne veux pas qu'il s'en aille, son départ reste ma seule et unique occasion de lui exprimer tout ce que je n'ai pas pu lui faire savoir jusque-là.

Lui confier tout le bonheur et la joie qu'il m'a conféré, du peu que nous ayons été en couple. Mais surtout du changement positif qu'il a inconsciemment apporté dans ma vie depuis que nous n'étions qu'au simple stade de colocataires, avant d'être des camarades, des amis, puis un faux couple, jusqu'à réellement en devenir un. Il faut avouer que notre relation a connu un certain cheminement d'évolution dont je m'en souviendrais pour sûr durant un bon bout de temps, ou en d'autres termes, toute ma vie. Car c'est bien la première fois que je passe de la haine à l'amour avec quelqu'un. Chose que j'étais à des années lumières de soupçonner lors de ma première rencontre avec lui.

COLOCATION DIFFICILE | LIVAÏ x OCOù les histoires vivent. Découvrez maintenant