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En pyjama, je descends les escaliers de chez moi. 

Je suis enfin en repos, et ces jours où je n'ai ni cours ni stage sont vraiment une bénédiction. Je prends mon petit déjeuner en regardant la télé et je m'active pour faire le ménage dans toute la maison. Je passe le balais, la serpillère, fais la poussière, nettoie et range jusqu'à ce que la propreté aie effacé les traces de ces derniers temps. Je monte ensuite pour aller faire ce que je dois faire pour lundi, puis je me fais à manger. En réalité, c'est un bien grand mot pour dire que je fais cuire du riz et du poulet que je met dans une assiette et mange en lisant les dernières pages de mon livre. La journée passe tranquillement, et avant de me coucher le soir, je me rappelle que je n'ai pas été voir à la boîte au lettres pour ce colis que j'attends depuis déjà trois jours. Mais en ouvrant la boîte aux lettres, ce n'est pas mon carton de vêtements que je découvre, c'est une simple enveloppe en papier craft à mon nom. Sûrement les impôts... Je retourne à la maison, ferme la porte à clé et ouvre l'enveloppe, déjà sûre de ce que je vais y trouver ; les fiches à remplir pour me faire taxer le maigre salaire que je gagne. Mais l'enveloppe est étrangement épaisse et l'écriture manuscrite est inhabituelle, alors je déchire précautionneusement la partie collante et regarde à l'intérieur. 

- Putain, je souffle. 

C'est sortit tout seul. Le choc qui suit ce que je découvre dans l'enveloppe me cloue sur place pendant de longues secondes durant lesquelles je suis incapable de bouger, de dire quoi que ce soit ou d'enlever mes yeux du contenu de l'enveloppe. Il y a quatre liasses de billets de l'épaisseur d'un livre chacun, et ce sont des billets de cinquante dollars. Je fais rapidement le calcul de combien se trouve devant mes yeux ; à raison de cent billets de cinquante dollars ( je prends une marge à la baisse ) dans chaque liasse, il y a au moins vingt mille dollars dans cette enveloppe. Je déglutis. Et je suis pratiquement sûre que c'est une erreur d'adresse, parce que personne n'est mort dans ma famille, parce que je gagne bien moins que ça en général, parce que je n'ai rendu service à personne, parce que je ne vends rien du tout - que ce soit des meubles ou de la drogue. Ce paquet ne m'est pas destiné, et sans toucher à l'argent, je me dépêche de cacheter à nouveau l'enveloppe pour ne pas continuer à voir ces liasses de billets. Ça va être retour à l'expéditeur, et j'observe l'adresse derrière pour savoir qui a envoyé ça chez moi. Sans réfléchir une seconde de plus, je me jette sur mon ordinateur et ouvre le navigateur satellite avant de taper l'adresse. 

Ça indique seulement une rue passante à dix minutes de chez moi, où pleins de commerces se succèdent ; deux restaurants, un bar, une boutique de vêtements, un club de strip-tease,  un salon de coiffure, une épicerie... Une rue du centre-ville comme il y en a des dizaines à Albuquerque, une rue que je connais même assez bien. Je fronce les sourcils. Cette histoire n'a aucun sens, mais je laisse l'enveloppe posée sur le comptoir de la cuisine pour aller à la poste demain la redonner. C'est avec la fâcheuse impression que toute ma vie a pris une tournure très peu appréciable et anormale que je vais me coucher. Je m'endors d'une traite. Le lendemain, je me réveille engourdie et me rappelle que je dois aller en cours aujourd'hui ; je me dépêche de me préparer et de mettre toutes mes affaires dans mon sac. Je quitte la maison plus tôt que prévu pour passer à la poste et fais la queue en espérant ne pas arriver en retard, jusqu'à ce que mon tour vienne et je ne donne l'enveloppe au monsieur.

- Bonjour, je commence. Je viens renvoyer cette lettre à l'expéditeur. 

- C'est une erreur de destinataire ou de distribution ? questionne t-il. 

- De destinataire, c'est bien mon nom sur l'enveloppe et je l'ai reçu chez moi mais je suis sûre qu'elle ne m'est pas destinée. 

Il hoche la tête, me fait signer le papier et emporte l'enveloppe avec lui. Soulagée, je sors par la porte coulissante et monte dans ma voiture avant de conduire jusqu'à la facculté. Je me gare sur le parking, prends mes affaires et rentre dans le bâtiment avant de gravir les escaliers et de trouver ma salle. Essoufflée, je m'installe à côté d'Hadidja qui m'attendait, déjà prête à prendre des notes. 

LE PLOMB DANS L'ÂMEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant