10.

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Je déglutis. 

- Allez, ma fille, un peu de courage... 

Mon téléphone en main et la carte de Ren posée sur le comptoir de la cuisine, incapable de composer le numéro, je lève les yeux au ciel. C'est simplement un appel à Alina. Pourquoi est-ce que ça me fait autant stresser ? Je sens bien qu'il y a un truc étrange derrière elle, qu'elle cache quelque chose de plus gros et de possiblement plus sombre, mais je n'arrive pas à savoir quoi ou même à rassembler les pièces du puzzle. Et ça, c'est flippant, moi qui est toujours très raisonnée et intellectuelle jusqu'à l'overdose. 

- Bon, Silene, on va pas y passer cinquante ans, tu te décides oui ou non ? je questionne à moi-même. 

Il me faut trente secondes pour me motiver un peu, et quand je tape les premiers chiffres sur l'écran, l'adrénaline me pousse à continuer. J'appuie frénétiquement sur le téléphone vert et colle mon portable à mon oreille, le coeur battant. Les premières tonalités résonnent sur mon tympan. 

- Idiote, débile, cruche, putain, je suis vraiment une débile, pourquoi est-ce que j'ai... 

Je suis coupée dans mes insultes. 

- Je ne pensais pas que vous appelleriez. 

- Bonjour, je dis en reprenant contenance d'un seul coup.

Le ton sec d'Alina me remet directement dans le bain et je me redresse soudainement, aux aguets de ce qu'elle va me dire et pourtant déjà confuse. C'est bien elle qui voulait que je la contacte, non ? Alors pourquoi ça l'étonne ? 

- Pourquoi ? Je croyais que...

- C'est parfait, murmure t-elle. 

Je déglutis, pas sûre de tout comprendre encore une fois - et c'est vraiment très frustrant. A chaque fois qu'on se parle, c'est toujours chacun de notre côté ; je mène une discussion toute seule et elle aussi, on a du mal à se comprendre. Peut-être que je ne suis pas assez claire et concise, il faut dire que la situation est tellement étrange que j'ai généralement du mal à trouver mes mots avec elle. 

-  Alina, si c'est au sujet de l'argent, sachez que je n'en veux pas, vous n'avez pas besoin de me payer. 

Il y a un petit silence à l'autre bout du fil. 

- Pour quoi que ce soit, votre accouchement ou Ren, je déclare. 

- Ce n'est pas au sujet de l'argent, Silene. 

Je grince des dents au dernier mot de sa phrase. C'est Ren qui m'apelle comme ça, par mon prénom, normalement, et pas elle. Ça sonne mal dans sa bouche, étrangement, je préfère quand elle m'apelle par mon nom de famille ou qu'elle ne m'apelle pas tout court. 

- Alors c'est à quel sujet ? 

Elle se tait pendant un temps. Les secondes deviennent des minutes et je regarde l'écran de mon téléphone en me demandant si elle ne s'est pas mise en silencieux par erreur ou si elle n'a pas raccroché sans le faire exprès, mais non. Puis soudain, sa voix tape contre mon tympan. 

- Dans cinq minutes, une voiture va se garer devant chez vous, j'aimerais que vous montiez dedans. 

- Ouh là, je dis en fronçant les sourcils. Pourquoi faire ? 

On m'a toujours appris à ne pas monter dans la voiture d'inconnus, et là, Alina vient de me proposer un chauffeur privé gratuit. Mes questions sont plus que nombreuses ; pourquoi faire ? Pour aller où ? Comment peut-elle m'envoyer une voiture pour me récupérer comme ça ? Peut-être est-elle riche, après tout, ça expliquerait cette immense somme d'argent qu'elle m'a donné - et je n'avais pas fait le rapprochement que j'avais peut-être affaire avec quelqu'un de pleins aux as. Du genre bourgeoise qui fait dans la charité, quoi. 

LE PLOMB DANS L'ÂMEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant