Devant le miroir, je me regarde.
Comme l'a demandé Alina, je me suis mise sur mon trente-et-un, et j'ai l'impression d'aller à un gala de charité alors que je vais simplement à un diner convivial ; ma robe robe verte, fendue au niveau de la cuisse, et mon collier en or me donnent l'impression d'en avoir trop fait. Sans compter mes yeux maquillés en noir, et un gloss, avec lesquels je me sens un peu trop... Elégante. Je devrais vouloir passer inaperçue, me faire petite pour ne pas déclencher une quelconque réaction chez Alina, et j'ai fait tout l'inverse, pitoyable créature que je suis. Après m'être insultée mentalement pendant au moins cinq minutes, je fais mon sac, range ma chambre et ré-ajuste mes cheveux en priant pour que tout se passe bien. Je quitte la maison, m'installe au volant et rentre l'adresse d'Alina dans mon téléphone avant de fixer mon portable au tableau de bord, et je prends la route les mains tremblantes. J'ai la vague impression que cette soirée va finir dans un bain de sang...
- Tournez à gauche dans cent mètres, déclare la voix dans mon téléphone.
Je hoche la tête comme si j'avais un co-pilote et tourne à gauche pour rentrer dans un des quartiers les plus aisés d'Albuquerque. Les magnifiques maisons se succèdent unes à unes et finalement, je vois la voiture de Ren devant une maison. Je m'y gare, le souffle court, et attrape la bouteille de vin que j'ai apporté avant de sortir de ma voiture. Je prends mon sac puis je claque la portière, franchis les derniers mètres qui me séparent de la porte et frappe.
- Silene, sourit Alina en ouvrant la porte.
Elle est vêtue d'une magnifique robe rouge à bustier, qui la met beaucoup en valeur, et je mentirais si je disais que je ne la trouve pas belle dans cette tenue. La couleur, pourtant, ne me rappelle que trop bien le sang que les Woodward ont versé plus d'une fois pour cette femme, et j'ai un sourire maladroit en retour.
- Alina.
Je lui tend la bouteille.
- Tu n'aurais pas dû. Rentre, je t'en prie.
Je rentre dans l'immense demeure, dont l'entrée débouche directement sur un salon comportant deux canapés et deux fauteuils. Il y a un écran plat, une table dressée qui fait la taille de ma voiture, et je salue Teddy, en train de fouiller dans son manteau.
- Tu as mis le paquet, ricane t-elle.
Elle est habillée d'un pull crème, d'une jupe en cuir noire et d'escarpins. Elle a relevé ses cheveux bruns en un chignon tiré à quatre épingles.
- Je suis contente de n'être pas la seule.
Elle me prend dans ses bras, une fois n'est pas coutume, et je déglutis en observant Ren dans la cuisine en train de déboucher une autre bouteille de blanc. Alina la dépose à côté de lui et il finit par se retourner, mais à ce même moment, Marcus sonne à la porte. Ce dernier a revêtu un pull noir avec un pantalon de la même couleur et une veste de costume grise et hausse les sourcils quand il m'aperçoit.
- Et ben...
Il tend à la maîtresse de maison un dossier et une boite de chocolats, qu'elle me refile en me demandant de la mettre dans la cuisine. Je traverse donc le salon pour rejoindre la cuisine à moitié ouverte, et je peux enfin poser mes yeux sur l'homme-ténèbres. Il est habillé d'une chemise blanche et d'un pantalon de costume noir, très élégant et très sobre.
- Salut, je murmure en posant les chocolats sur l'îlot central.
Il ne répond pas.
Je sais que tu m'entends, Ren.
Sans rien dire, il repart au salon pour aller voir Marcus et je me retrouve seule dans la cuisine. Richard arrive ensuite et nous sommes très vite au complet ; c'est Alina qui nous sert la première coupe de champagne et on trinque au travail. Je la regarde dans les yeux pour ne pas éveiller les soupçons, mais si je pouvais lui faire avaler mon verre en petit morceaux, je le ferais sans une once d'hésitation. Assis sur les canapés, la discussion s'engage autour de sujets divers, j'arrive à rire un peu même si je tiens un rôle - dont je n'espère plus jamais être l'actrice principale. Mais surtout, je cherche du regard celui qui m'a poignardé il n'y a pas plus tard qu'il y a une semaine et demi, sans le trouver. C'est frustrant. Il est là, je suis sûre qu'il sait que je le regarde parfois, que j'ai des choses à dire, mais il ne m'offre rien. Ni son attention, ni son temps, ni un regard, ni une parole, comme si j'étais un fantôme désormais.
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LE PLOMB DANS L'ÂME
RomanceQuand elle prend un coup de couteau pour un inconnu, l'existence de Silene bascule. Mais cet homme étrange l'intrigue et l'entraîne dans sa noirceur. Alors, qui est l'ange gardien de qui ?