Chapitre 3

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Nous passons le reste de l’après-midi à faire le ménage et à déplacer des meubles et des cartons. Les déménageurs partent après avoir vidé le camion de tout notre bazar. Ma chambre est maintenant pourvue de mon bon vieux lit, de ma bibliothèque et de ma commode encore vide. Je la remplierai demain, si j’en ai le courage. J’en ai déjà bien assez fait pour aujourd'hui. N’oublions pas que je suis supposé accompagner mon voisin à cette fameuse soirée qui ne me fait toujours pas envie … 

Je prends juste le temps d’accrocher un poster ou deux ainsi qu’une photographie prise l’été dernier devant la pyramide du Louvre avec Vincent, mon meilleur ami. Pour autant qu’il puisse continuer à l’être, à présent que nous habitons aussi loin l’un de l’autre. 

Je recule d’un pas avec un petit pincement au cœur. Même ainsi, je ne me sens pas chez moi. Tout est différent. Ma petite chambre parisienne donnait sur le boulevard Poissonnière et j'entendais le trafic automobile et le bruit de la foule des passants à chaque instant. Je trouvais cela rassurant, d'une certaine façon. Ici, tout est silencieux, comme si j'étais seul au monde. Cela me donne des frissons. 

Je pars prendre une douche, satisfait de disposer enfin de ma salle de bain privé. Je ne peux évidemment pas me rendre à une fête dans mon vieux survêtement tout crasseux. Puis je me mets en quête de quelque chose de potable à porter. Mes habits sont encore emballés et je dois ouvrir plusieurs cartons avant de trouver la tenue adaptée. Cela me demande une certaine réflexion. Je ne connais pas les codes vestimentaires du coin. Je ne voudrais pas avoir l’air snob ou trop négligé. Je me décide pour un jean ajusté et une chemise blanche. Après un instant d’hésitation, j’enfile à l’annulaire une grosse bague en forme de tête de mort que j’adore autant que ma mère déteste. Elle m’a toujours donné du courage.

— Tu es très élégant, m’assure Maman lorsque je descends l’escalier. 

Debout sur un escabeau, elle tourne une clef pour remonter la vieille horloge installée dans l'entrée. 

Je me mords la lèvre et tire sur ma chemise. 

— Trop tu crois ? 

— Mais non, mon lapin. Tu es parfait. Du moins tu le serais sans cette horrible bague. 

Je lève les yeux au ciel. 

— Maman, qu’est-ce qu’on a dit à propos du “lapin” ? 

Ma mère prend un air de martyre. 

— Mais j’ai le droit de t’appeler ainsi quand nous sommes juste entre nous, n’est-ce pas ? 

Je lui jette un regard sévère. 

— Non. Tu dois perdre cette mauvaise habitude au plus vite. 

La sonnerie de la porte retentit à ce moment-là. 

— Ça doit être ton ami, lap… Théo. 

Je vais ouvrir en traînant des pieds. C’est bien Émile, même si je ne suis pas certain de pouvoir déjà le qualifier d’ami. Je constate avec une certaine inquiétude qu’il n’a pas pris la peine de se changer par rapport à tout à l’heure. Bon, tant pis. 

— On y va ? 

J’enfile mes chaussures et mon manteau et dis au revoir à mes parents. 

— Ne bois pas trop, chéri, me recommande ma mère à mon grand embarras. Et fais-toi raccompagner s’il est trop tard. 

Dong ! Dong ! 

L'horloge sonne furieusement tandis qu'elle tourne les aiguilles. 

— Maman…, je grogne. 

Le loup et moi (bxb) [terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant