Chapitre 37

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Je me réveille le lendemain matin de mauvaise humeur. On est lundi, officiellement le pire jour de la semaine puisque le week-end suivant est dans très longtemps. Puis je me souviens soudain de l'existence de Martin et je me redresse d'un bond, soudain en meilleure forme. Oui, je vais voir Martin. 

Je me recouche aussitôt en fronçant les sourcils. Je relève ma couverture jusqu'au menton, contrarié. Pourquoi est-ce que le simple fait de voir Martin provoque-t-il en moi un tel enthousiasme ? En plus, je l’ai déjà vu hier. Et les jours d’avant. Et probablement tous les autres jours de ma vie, vu comme il est collant. Oui, il n’y a vraiment pas de quoi se réjouir, bien au contraire. 

Je bâille en m’étirant de tout mon long. Et si je restais au lit toute la journée ? Non, je ne peux pas. J'ai déjà séché trop de cours… Je dois être un élève studieux, maintenant. De toute façon, si je traîne trop, ma mère va venir tambouriner à ma porte pour me signifier de me dépêcher. Elle ne m'autoriserait jamais à manquer le lycée si je suis dans un autre état qu'à l'article de la mort. 

Je me lève de mauvaise grâce et me dirige vers la salle de bain en me grattant le derrière. Je jette un vague regard au miroir qui me renvoie mon regard maussade. Si Martin voyait un jour la tête que je fais tous les matins en sortant du lit, il partirait certainement en courant. J'ai un peu de bave sur le menton et une trace d'oreiller sur la joue. Sans compter mes cheveux qui rebiffent dans tous les sens. Je ressemble à un zombie, le teint cadavérique en moins, ce qui est toujours ça. 

Je secoue la tête en me débarrassant de mon caleçon pour entrer sous la douche. L'eau chaude me fait un peu de bien. Je ferme les yeux et laisse les gouttes glisser le long de mon corps. J'aimerais pouvoir rester ainsi jusqu'à la fin de ma vie, mais le devoir m'appelle. Je sors de la cabine à regret et enfile les premiers habits qui me passent sous la main. J'hésite un long moment, mon foulard à la main. Vais-je continuer à le porter longtemps ? Mes parents ont bien vu la marque du "moustique alpha". Et la plupart des gens au lycée semblent au courant de ce qui s'est passé. Et puis le printemps arrive et les jours sont de plus en plus chauds, et… 

Je repose le foulard avec un grognement. Je peux faire ce que je veux. Je n'ai pas besoin d'excuse pour arrêter de le porter. L'opinion des autres est le dernier cadets de mes soucis. 

Je dévale les escaliers avant de changer d'avis et pénètre en trombe dans la cuisine. Mes parents interrompent aussitôt leur conversation en me voyant arriver. 

Quoi ? je leur demande, méfiant. 

— Tu as passé une bonne nuit, chéri ? demande Maman, l’air de rien. 

— Hum… oui… 

Je m’avance en ayant la désagréable impression que mes parents me cachent quelque chose. J’ouvre le frigidaire pour prendre le lait. Un choux de Chine me tombe dessus et je le rattrape de justesse avant qu'il ne s'écrase sur le carrelage. Je regarde ce que j'ai devant les yeux, stupéfait. Le frigidaire déborde de victuailles. Au moins cinq ou six paquets de merguez sont empilés sur le premier rayonnage. Trois bouteilles de vin sont placées en équilibre douteux par-dessus. Les deux plaques au-dessus ne sont pas mieux loties. J'y aperçois des brochettes de viande, des champignons, un énorme paquet de pommes de terre et une boîte de marshmallows. Et tout ça dans des proportions suffisantes pour nourrir dix personnes affamées (ou deux ou trois Mirabelle, vu son appétit). Je finis par mettre difficilement la main sur ma bouteille de lait, comprimée entre un pot de ketchup et un autre de mayonnaise. 

— Tu prépares un siège ? je demande à ma mère. 

J’essaie en vain de remettre le choux dans le frigidaire mais il est beaucoup trop plein. Je ne sais même pas comment il pouvait s’y trouver avant. C'est un mystère qui me dépasse. 

Le loup et moi (bxb) [terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant