22 : Nathan

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Le temps s'est étiré, je m'ennuie. Les jours identiques se sont succédé. Avant que je ne devienne fou, Adnan m'a relevé auprès de notre invitée forcée. Donc je prends l'air et ce serait presque parfait, si je ne ressentais pas tout ce que vit Lex. C'est comme vivre deux vies en une, c'est fatigant. Surtout que les émotions chez elles, c'est toujours les montagnes russes. Elle n'a plus de grand accès de panique, mais elle subit une angoisse sourde qu'elle parvient à agrémenter de tout le reste. Si je n'attendais pas qu'elle trouve un moyen de nous libérer comme on attend le Messi, parfois je rigolerais de ses tentatives pour briser cette connexion entre nous. Parce qu'il faut se le dire, elle passe par des moments de pure détermination à de la colère, puis à de l'abattement, jusqu'à ce qu'elle finisse par s'énerver contre moi de voir que je ne tente pas d'agir. Elle s'est mise en tête que pour utiliser mes pouvoirs il fallait qu'elle atteigne une sorte de transe, alors elle s'assoit en tailleurs en fermant les yeux et elle rage de ne pas me voir faire pareil. Elle est ridicule, le lien, autant elle que moi, nous le sentons sans avoir besoin de méditer ou je ne sais quelle autre connerie. Il est devenu une autoroute entre nous, je ne sais pas le rompre, mais impossible de le rater.

Pour me changer les idées et arrêter de tout ramener à Lex, je décide de me rendre dans une librairie, le taxi m'a laissé en plein centre-ville de Perpignan et j'ai bien l'intention d'en profiter. Je n'ai pas remis les pieds dans cette ville depuis une éternité. Il me faut retrouver mes marques, mais ce n'est pas désagréable de flâner. Il y a de la vie et je me régale. Il fait vraiment bon.

Outre la présence des sensations de l'humaine, un point finit par me chiffonner, je croise beaucoup de démons. Ils ne sont pas vindicatifs, ils ne me remarquent même pas. Sauf que c'est curieux, Perpignan est, certes, une grande ville, mais croiser autant des miens, ce n'est pas usuel. Normalement, les démons qui parviennent à quitter l'enfer, le font soit parce que quelqu'un de puissant les a missionés sur terre pour dénicher une âme spécifique ou deux et les marquer, soit il les envoie ici à la recherche d'un « ennemi », sauf qu'il n'y a plus d'ennemis, les sorcières ont simplement disparu de la surface du globe et leurs Somnores avec. Ce n'est pas faute d'avoir moi-même cherché. Les villes se sont évaporées. Pouf. Un jour elles sont là et le lendemain plus rien. Il n'y a que le Somnore français, à ma connaissance, pour lequel il reste des ruines. Donc qu'est-ce que la mauvaise engeance fait ici ?

La question tourne en fond de ma conscience, je reste sur mes gardes et entre dans une nouvelle boutique. Je réalise que je n'ai pas envie de faire le plein de nouveaux habits, ceux achetés avec Ice suffisent pour l'instant. Je décide donc d'aller me faire plaisir !

Après avoir trouvé d'ouvrages, je choisis de rentrer, mais je m'autorise avant une douceur à la terrasse d'un café. Le bruit des va et viens, le soleil, c'est agréable. J'inspire et je savoure jusqu'à ce qu'un groupe de trois de mes semblables me passe à côté. Les démons sont excités, leurs auras sont agitées et ça m'embête de l'avouer, mais je ne suis pas tranquille. Ce n'est pas normal. Pour éviter de possibles ennuis, je ne m'attarde pas.

Une fois de retour à la maison, je découvre Lex en train d'imiter Ice. Tous les deux au milieu du salon se faisant face. Mon ami lui montre des postures pour se défendre.

— Pourquoi vous faites ça ? demandé-je en grimaçant devant le ridicule de la situation.

— Je veux plus me faire enlever à l'avenir. Ou emmerder par un connard comme Benz ! déclare Alexandra avec assurance.

— J'espère qu'on restera pas ensemble assez longtemps pour que Ice te rende opérationnelle !

— C'est sûr qu'il y a du travail, ce moque le vampire. À croire que sa seule activité physique ces dernières années n'a été que de lever les cartons à son travail.

Ne Jamais Dire JamaisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant