Ne Jamais Dire Jamais

21 : Alexandra

Nathan est de mauvaise humeur. Alors que pendant qu'il préparait le repas j'avais eu l'impression que nous arrivions à mieux nous comprendre. Depuis qu'il est revenu de sa discussion avec le vampire ; il est en colère. Je la sens bouillir au fond de moi. Elle vit. Me grignote petit à petit.

Je prends le risque d'essuyer ses foudres et je me jette à l'eau :

— Ça ne va pas ? Tu es plein de rancœurs.

— Ice m'a mis de mauvais poils, ça va passer.

Je suis tellement surprise qu'il ait répondu que je reste plantée à le fixer.

— Quoi ?! attaque-t-il avec brusquerie.

— Rien.

Je me réinstalle et regarde n'importe où ailleurs pour ne pas le provoquer à nouveau. Après tout ce mec a pété le bras de Benz sans forcer et son meilleur ami semble pouvoir soigner tout et n'importe quoi. Même si le fait de le savoir ne m'aide toujours pas à le croire et à l'accepter. Quoi qu'il en soit, il pourrait me faire du mal sur un coup de sang, puis me faire soigner. Je suis coincée ici, me le mettre à dos semble être l'idée la plus mauvaise de ma vie.

— Arrête de flipper ! crie-t-il à nouveau.

— Désolée, c'est que... tu es ce que tu es.

— Un démon, ce n'est pas un gros mot.

J'acquiesce, pas rassurée du tout. Il soupire et se calme.

— Tu me désires ?

Je pique un far. Je ne savais même pas qu'il était possible de passer aussi vite de la peur à la gêne. L'appétit que j'aie éprouvé en voyant son superbe corps se rappelle à moi par une désagréable pression au bas ventre. Génial.

Il hausse un sourcil en ne me lâchant pas de ses prunelles marronnes.

Il sait, sens de démon, lien entre nous, les deux, ou autre chose, il sait.

— C'est réciproque, finit-il par déclarer, sinon on ne serait pas dans cette situation.

Si mes yeux avaient pu quitter leurs orbites, ils auraient échoué sur le comptoir. Nathan a repris sa cuisine, comme si de rien n'était, et moi je n'ai pas la moindre idée de ce que je dois faire de l'information qu'il vient de lâcher.

— Et ? soufflé-je sans le vouloir.

— Et quoi ? Tu as envie qu'on baise maintenant ?

— J-je... Non, évidemment que non.

— Parfois, je ne comprends vraiment pas les humains et pourtant je suis obligé de vous supporter depuis longtemps.

Je reste muette jusqu'à ce que nous mangions et à part un remerciement, je ne desserre pas les lèvres.

Adnan ne se joint pas à nous, je n'ose pas en demander plus sur le fonctionnement de son espèce, mais je brûle de curiosité. Sauf que si je veux que mon cerveau ne se transforme pas en gruyère, il me faut éviter.

Je finis par échouer sur le canapé le plus loin possible de Nathan pendant qu'il zappe en grognant et en insultant à tout va les émissions et les gens.

— Choisis, je ne comprends toujours pas l'intérêt de la télévision. C'était novateur au début, mais ça me lasse. Vivement qu'Ice me ramène de la lecture.

Il n'est pas très loin de midi, les programmes ne me font pas envie non plus, même s'il y a quelques chaînes supplémentaires en plus des classiques. J'ai hésité entre un animé et de la musique, je tranche pour le second choix.

Nathan n'est pas ravi, mais il se tait, il semble perdu. Non, en fait, je le sens, il est nostalgique. Je ne sais pas si la mélodie que nous écoutons y est pour quelque chose, mais je culpabilise un peu, c'est plus fort que moi.

— Tu es incorrigible, tes émotions sont vraiment montées en boucle.

— Je ne le fais pas exprès, me défends-je.

— Oh, je le sais bien, c'est ça le pire. Je préfère quand tu as envie de moi, c'est plus agréable et en plus c'est flatteur.

— Tu étais aussi lourd pour draguer la première fois qu'on s'est parlés ?

— Je n'essaie ni maintenant ni quand on s'est rencontrés, tu étais tellement saoule que c'était gagné à l'instant où tu m'as vu, réplique-t-il avec un naturel déconcertant.

— T'es pas irrésistible !

— Certes, mais je te plais. Ce n'est pas être arrogant d'en être conscient. Et je suis le genre de beaucoup de personnes.

— Jusqu'à ce qu'ils t'entendent, grommelé-je pour moi-même.

— Je suis d'un autre âge, mais les années ne m'ont pas rendu sourd. Je sais être agréable, quand il faut.

Je lève les yeux au ciel, je ne comprends pas ce que je lui ai trouvé, outre son physique à faire se damner un saint, évidemment.

Le temps va être long...