Le cri d'Ethan a résonné, mais il s'est vite arrêté. Gusoyn m'a affirmé qu'il était vivant, pour le moment... Des frissons me parcourent le corps, je suis à deux doigts de tourner de l'œil. Je ne sais même plus ce que je ressens : de la panique, de la peur, de l'impuissance, de la colère. Un mélange bien épais de tout ça, j'ai l'impression que mon corps va céder sous la pression.
— D'où sort ton pouvoir démoniaque ? insiste le démon très loin de se préoccuper de mes états d'âme.
— J-j-je sais pas, réponds-je.
— Tu mens.
Je n'ose pas le contredire, alors je baisse le regard.
— Est-ce que tu as déjà entendu parlé de moi ? demande-t-il comme sorti de nulle part, comme je secoue la tête de négation, il continue. Je suis un démon de haut rang et j'ai décidé de servir Belzébuth, beaucoup me surnomment Gusoyn le cruel, parce que je ne suis tendre ni avec les démons ni avec les humains. Mais sur votre terre, je suis connu parce que j'aime charmer les femmes et une fois que j'ai eu ce que je voulais, je les pousse au suicide.
Son rire fend le silence nocturne, mais je n'ai pas le temps de répliquer qu'autre chose vient déchirer le calme de la nuit, c'est un nouveau cri d'agonie d'Ethan.
Mon corps est pris de violent tremblement, une rage froide émerge de ce marasme de sentiments et sans réfléchir, je me jette sur Gusoyn le cruel.
Mes poings martèlent son torse et je hurle pour évacuer ce qui boue en moi. Gusoyn ne tressaille même pas et il m'envoie une gifle du revers de la main qui me fait tomber par terre. Dans ma chute, je me suis mordu la langue.
Mon élan de bravade s'essouffle, mais j'ose lever les yeux vers lui pendant que je crache la bave et le sang.
— Tu as un instinct de survie défaillant, se moque le démon. Je perds patience, c'est la dernière fois que je demande. Comment es-tu arrivée à dégager autant de puissance ?
J'aimerais tuer ce salopard. Je sais que si je réponds, je condamne Nathan et par extension, moi. Ils n'ont toujours pas deviné que ma puissance c'était la sienne. Personnellement, ça me paraitrait évident à leur place, parce que c'est le seul démon avec lequel ils peuvent me lier. Mais, j'ai bien compris que ce n'était pas possible de leur point de vue qu'un démon parvienne à cacher une telle puissance. Tant qu'ils ne l'envisagent pas, ça nous sauve. Sauf que je suis en train de réaliser que sauvés ou non, personne ne va nous secourir et que ce sursis ne nous sert à rien.
Après une inspiration tremblante pour évacuer ma terreur, je ferme les yeux et je cherche le pouvoir au milieu du lien entre Nathan et moi. Peut-être que je peux me servir de sa puissance pour neutraliser le connard barbu qui me sourit avec sadisme.
La masse grouillante de la force de Nathan s'engouffre en moi, ma peau chauffe comme soumise a de la lave en fusion.
— Qu'est-ce que tu fais ! hurle le démon en me soulevant par les épaules.
Dans sa prise, je suis ballotée comme un prunier au milieu d'une tornade et je perds l'afflux magique. La poigne et de plus en plus brutale et m'arrache une plainte.
— Si tu trouves que là je te fais mal, c'est que tu n'as rien vu ! Qu'est-ce que tu as essayé de faire ?
J'essaie d'ignorer ses cris, ses ordres, la douleur, mais furieux de me voir l'ignorer ce bâtard commence à m'étrangler. Le sang malmène mes tympans, je n'entends même plus ses questions. Ma gorge me brûle, l'angoisse pure qui dope mon cœur me donne le sentiment de vibrer. À chaque fois que je me manque glisser dans les ténèbres, il me libère juste ce qu'il faut pour approvisionner mes poumons affamés. Puis alors que je prends une énième goulée d'air déchirante suite à son bon vouloir, Zavebe arrive en balançant le corps d'Ethan juste à côté de moi. Gusoyn me lâche, je m'effondre contre le vampire.
Pendant quelques instants, je ne mesure même pas la situation trop heureuse de respirer plus ou moins correctement. Puis les geignements d'Ethan, le sang qui m'accule les lambeaux d'habits qui lui reste, tout prend sens. Tremblante, les mains devant le visage, mon cri d'horreur reste coincé dans ma gorge.
— Tu me réponds, ou je le guéris pour le mettre dans un état encore plus minable, annonce Gusoyn d'une voix plus grave que précédemment.
Un coup d'œil à l'homme barbu et je comprends que ce ton, c'est celui de la personne déterminée et qui en a marre de jouer.
L'odeur ferreuse du sang noie ma gorge à chacun de mes halètements, mon cerveau, ma raison elle-même, tout a rendu les armes. Tremblante, je fixe le corps tout juste vivant de mon ami.
— Dernière chance, Alexandra !
Gusoyn s'est avancé, un petit couteau dégainé. Il se taille le bras dans le sens de la longueur et laisse le tout goutter, sur le corps supplicié.
Comme en transe, Ethan se décale et lape le filet vermillon qui s'écrase sur lui. J'assiste sans y croire à la réparation de chair rougie qui comble le trou qui l'avait dans l'abdomen et qui offrait une vision insupportable sur ses viscères.
Zavebe devance Gusoyn et sans avertissement, il se baisse prestement attrape un bras du vampire, maintient le reste de son corps et applique une torsion inhumaine à son épaule. Un bruit écœurant résonne et à raison de mon estomac. Une bile acide éclabousse l'herbe et la mousse, pendant qu'Ethan cri d'une voix déchirante.
— On va finir par le couper morceau par morceau si tu ne réponds pas, s'amuse Zavebe.
— Elle ne parlera pas, constate Gusoyn avec colère. Même si on le tue.
Zavebe éclate de rire et invite son comparse a utiliser une méthode plus radicale.
Gusoyn, qui n'a pas rangé sa lame, s'accroupit devant moi, m'offre une moue qui m'aurait paru adorable n'importe où ailleurs, mais à l'instant, elle est juste annonciatrice de l'acier qui épingle ma main au sol meuble.
La surprise, la douleur intense, l'incrédulité, le tout offre au bois qui nous entoure une plainte inédite, je m'en déchire la voix. Je tremble, j'ai chaud, mon corps devient tout cotonneux et la douleur pulsatile dans mon membre mutilé me dégoûte. Le seul avantage, c'est que ce magma d'horreur me connecte avec la puissance de Nathan et sans même le comprendre, une sorte d'explosion semble me quitter pour se répandre dans l'air sous la forme d'une vague violente et une puissante détonation qui propulse Gusoyn, Zavebe et Ethan loin de moi.
— Cette puissance, commente l'ange incrédule. Elle n'est pas possible, c'est pire que ce que je pensais.
— En effet, si un démon si puissant existait, il règnerait seul sur l'enfer, argumente Gusoyn en se relevant. Il faut avertir le sire.
Horrifiée, affligée par la douleur, je ne peux être que spectatrice de ce qui arrive. Peut-être que j'aurais dû parler, ça n'aurait pas pu être pire j'ai peut-être tout fait foirer.
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Ne Jamais Dire Jamais
ParanormalQuand le chemin d'Alexandra croise celui de Nathan, les choses se compliquent pour tous les deux. Alexandra n'est qu'une simple préparatrice en pharmacie qui aime passer du bon temps avec ses amis. Nathan cache sa nature démoniaque pour espérer viv...