La Tour d'Ivoire - Tome 3

Amour perdu

« Et nous pensions que le temps ne nous atteindrait pas, mais il a pas fini par nous surprendre, et l'amour avec lui. »

MM

« And the most painful part was, you were my best friend. »

A.Sharma

            J'étais sortie de la chambre que nous partagions avec Seth vêtue d'une chemise de nuit en satin rose pâle. Seth était si fatigué qu'il ne m'avait pas entendu sortir du lit.

Je m'ét ais réveillée en plein milieu de la nuit. Manquant d'air, j'avais eu besoin de sortir. Je ne savais pas vraiment où j'allais, mais il fallait que je sente la caresse de la nuit sur ma peau et l'éclat de la lune sur mon visage. Je trouvai sans mal le jardin où nous déambulions tous les jours avec Clara.

Je m'assieds au centre, sur un petit banc de pierre à côté duquel un petit cours d'eau filait doucement. Laissant ma tête basculer en arrière, je me perdis dans la contemplation des étoiles, de ces astres immémoriaux. Soudain, sans crier gare, je fondis en larmes. Les larmes coulèrent, coulèrent sans que je puisse les arrêter. Je commençai bientôt à sangloter.

Je savais pourquoi.

La soirée et la nuit que j'avais passées avec Seth avaient été merveilleuses. Parfaites. Comme je l'avais rêvé. Pourquoi fallait-il que tout ce bonheur ne soit qu'éphémère ? Pourquoi fallait-il que tout s'arrête ? Pourquoi n'étais-je pas simplement Lévana Sildek ?

Je pleurais égoïstement sur mon sort, j'en avais pleinement conscience. Je pensais accomplir bientôt un acte courageux, mais ce serait bien le seul de ma maudite existence. J'étais une lâche doublée d'une égoïste. Je pleurais Seth, son amour, la vie que nous pourrions créer et le monde qu'il pourrait façonner et que je ne verrai probablement jamais. Je savais que je le quitterais sans savoir ce qu'il adviendrait de lui. Mais j'avais l'impression que tout était mieux que le danger que je faisais peser sur eux.

J'avais peur. Je n'étais en fait qu'une enfant. Une petite fille. Une fillette avec une couronne trop lourde sur la tête et un enfant maudit en son sein.

J'aurais aimé que ma grand-mère soit là, j'aurais voulu me serrer contre elle et la laisser me protéger. Mais j'étais trop fière pour aller la chercher, et je savais qu'elle ne pouvait plus m'aider. Elle en avait déjà assez fait, c'était à moi de poursuivre mon chemin. Toute seule.

Enfin, pas tout à fait.

Je posai une main sur mon ventre.

Je suis désolée...

-Partager les appartements de Seth est vraiment si terrible que ça ?

Je me retournai.

Ce n'était que Myriam. Comme drapée de ténèbres, elle avança vers moi de sa démarche féline.

J'essuyai rapidement mes yeux.

Gracieusement, elle s'assit à côté de moi.

-J'ai toujours détesté cet endroit.

Je ne pus empêcher un rire de m'échapper.

-Pourquoi viens-tu ici, alors ?

-Pour me souvenir de continuer à haïr cet endroit.

-Pourquoi ? Il t'arrive de l'aimer ?

Elle soupira.

-Trop souvent à mon gout, répondit-elle d'un ton amer.