Faux semblant - Partie I

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"On dirait que, contraint par quelque lampe merveilleuse, un génie de l'Orient l'a enlevé pendant une des mille nuits, et l'a dérobé aux pays du soleil pour le cacher dans ceux du brouillard avec les amours d'un beau prince."

Alfred de Vigny

            La robe qu'Ayaan m'avait fait parvenir était à couper le souffle. D'une blancheur éclatante, faite du satin le plus pur, elle coulait le long de mon corps, miroitant aux endroits ou de minuscules diamants y avait été incrusté. Mes cheveux tombaient en une cascade de fines ondulations jusqu'au bas de mon dos. Quant à ma peau, qui avait un peu pris des couleurs dehors, elle avait été saupoudrée sur mon décolleté et aux épaules de milliers de paillettes dorées. Mon visage avait été également maquillé dans les tons or : mes yeux, mes lèvres et même mes sourcils avaient été peints. J'étais belle, mais sans que cela fasse artificielle. Je ne pouvais nier que l'idée d'Ayaan était brillante. Lorsque leur œuvre fut terminée, les domestiques posèrent sur ma tête la couronne qui faisait de moi la Princesse d'Ivoire, future reine. Cela me fit étrange. J'avais côtoyé rois et reine En Bas, et savoir qu'au fond, j'en étais également une me perturbait. En vérité, je l'avais presque oublié, je jouais dans la même cour que Seth, Constantin et Saef finalement. Un étrange sentiment pesait sur ma poitrine, je ne pouvais m'empêcher de penser que face à eux, je ne faisais tout simplement pas le poids.

Lorsqu'Ayaan me vit, il ne sourit pas, comme je me l'étais imaginée. Non. Il resta statufié, et lorsque je croisai son regard, je n'y lus que tristesse et regret.

Alors je me souvenais qu'il avait emprisonné Adina, Anna et Arianna, que ces dernières allaient probablement mourir. Je me rappelais qu'Iris m'avait trahi par sa faute, qu'Amidror et ses habitants avaient péri sous les flammes, que Seth m'avait regardé avec horreur et qu'à cause de son obsession pour moi, j'avais perdu tout l'amour de ma nouvelle famille. Je n'avais alors plus aucune once de pitié pour lui.

Quant à lui, il était habillé d'un costume noir. Que dire de plus ? Il était beau, comme toujours, et il le serait toujours. Le regarder me rappelait Seth sans que je ne sache pourquoi. Cela me faisait mal, bien trop mal.

Il posa les yeux sur le collier des Eléazar sur ma poitrine.

-Qu'est-ce que cela fait de le porter à nouveau ? me demanda-t-il.

-C'est comme porter les vêtements de quelqu'un d'autre.

-Que t'est-il arrivé En Bas, Era ? Tu n'es plus la même.

-J'ai appris à vivre, répondis-je d'un ton sec. Il n'y a rien à savoir d'autre.

-Tu me raconteras, un jour ?

Je ne comprenais pas pourquoi il insistait.

-Pourquoi est-ce que cela t'intéresse ?

-J'aimerais te comprendre, je vois bien que ce que tu as vécu là-bas a eu un impact sur toi.

-Tu n'aimerais pas savoir.

-Tu pourrais être surprise.

Je lui fis face. Il avait toujours son air calme.

-Tu n'as aucun droit sur moi.

Il sourit.

-Je sais. C'est bien pour ça que je t'ai choisi.

Il m'offrit son bras.

-Oublie ton ressentiment à mon égard le temps d'une soirée. Faisons équipe, tu verras, ensemble, nous sommes capables de faire plier le monde.

La Tour d'Ivoire - Tome 3Où les histoires vivent. Découvrez maintenant