" Les nombreux écrits qui nous restent du 46ème siècles laissent à penser que les personnes d'Era Eléazar et de Lys Evaren ont été les femmes de leur génération les plus talentueuses et les plus influentes. Certains auteurs disent qu'Iris Dolora et Ilayana Desrose sont sous estimées, et qu'elles ont eu plus de poids que Lys Evaren, mais je ne suis pas d'accord. On lit très souvent que les deux femmes étaient opposées, je crois surtout qu'elles étaient similaires en de si nombreux points qu'elles en sont venues à se détester. Ce que l'une est devenue, l'autre aurait pu le devenir. Elles le savaient. Un miroir peut être cruel, nous sommes tout d'accord là dessus ? Lorsque les deux femmes se regardent c'est la misère de leur condition de femmes à une époque où la gente féminine n'a aucune valeur. Ce qu'elles voient est insupportable. "
Mémoire de la Tour d'Ivoire,
Par l'Inconnu au visage de cendre
Lys
Cela aurait dû être elle.
Lys Evaren regardait sa plus grande rivale d'un œil neuf.
Era Eléazar, le ventre arrondi, un grand sourire aux lèvres, discutait avec certains membres de sa cour rapprochée, des crétins pour la plupart.
Depuis le jour où la nouvelle du retour d'Era avait commencé à se répandre dans la Tour, Lys avait senti une rage immense l'envahir. Une haine viscérale. Une haine qui ne datait pas d'hier, elle avait toujours détesté la jeune femme, Era avait toujours représenté un danger pour Lys, elle était la seule à pouvoir la supplanter. Jusqu'à sa disparition, Lys restait sereine, Era Eléazar n'avait pas l'étoffe d'une reine ni d'une princesse, elle haïssait Ayaan, les responsabilités et le pouvoir. Tant mieux pour Lys. Mais maintenant... maintenant, Era était devenue une autre, encore plus dangereuse, encore plus imprévisible.
Lys avait souhaité de toutes ses forces que plus jamais la princesse aux cheveux blonds ne revienne dans la Tour, en vain. Elle était là, à nouveau. Ayaan brûlant encore plus d'amour pour elle, si cela était vraiment possible d'aimer plus qu'il l'avait aimé jusque-là. Le monde était encore plus à ses genoux, même Melech avait péri pour qu'elle vive. Tout ceci n'était que pur folie. Tout ça pour elle. Tout ça... pour ça. Une lâche doublée d'une traitresse, qui n'avait jamais su voir en quoi le pouvoir pouvait sauver les femmes comme elles.
Ses yeux bleus dérivèrent vers le ventre de son ennemie.
Cela aurait dû être elle.
Voilà maintenant des années qu'elle partageait le lit et les nuits d'Ayaan Malkam, et jamais elle n'était tombée enceinte de lui. Ils avaient pourtant peu pris de précaution : Lys, sur les conseils de sa mère, avait fait croire à Ayaan qu'elle s'occupait de tout ce qui était contraception. Faux, bien sûr. Avec horreur, les médecins – qu'elle avait consulté en cachette – lui avaient appris qu'elle était très certainement stérile.
Stérile. Pour la future plus grande Dame de la Tour ? Inconcevable.
Elle avait alors tout fait, suivi des dizaines de traitements. En vain. Toujours en vain. Son ventre restait vide, et la promesse de devenir une Malkam avec.
Puis Ayaan avait passé une nuit. UNE misérable nuit avec cette trainée, et voilà que cette peste blonde portait son enfant. Le futur prince, roi sous les cieux, seigneur des seigneurs. Propulsée tout en haut, Era avait le monde à ses pieds.
Cela aurait dû être elle.
Non pas que Lys ressentait le moindre sentiment pour Ayaan. Oh, à bien y penser, si, Lys ressentait pour le prince de la Tour une haine profonde.
La haine, toujours la haine. Elle et Lys étaient d'anciennes amies.
Lys n'aimait pas Ayaan, mais elle aimait le pouvoir, seule chose qui pouvait lui assurer une vie confortable et décente dans ce monde impitoyable. Elle était une femme, belle qui plus est, son avenir se résumait au néant. Elle s'y refusait. Elle voulait être reine. Et elle le serait.
Era Eléazar avait tout. Le sang, le pouvoir, le charisme et un destin.
Lys Evaren n'était personne. La putain d'Ayaan Malkam, sœur d'un mort, et héritière d'une lignée en perdition.
Avant sa naissance, ses parents avaient dépensé des millions, toute la richesse familiale avait été mise en jeu pour rendre Lys plus belle que toutes les femmes de la Tour. Afin qu'on la remarque, pour qu'elle marie un jour un fils des Quatre Familles. Elle avait été élevée pour cela, et juste pour ça.
Seulement, elle n'avait jamais été la plus belle.
Avec dégout, elle détailla Era du regard. Il n'y avait rien à dire. Rien. Elle était parfaite. À son plus grand regret. Comme si ça ne suffisait pas, Era était intelligente. Elle le cachait bien, mais Lys avait toujours su. Era Eléazar n'était pas comme les autres, malheureusement, Ayaan l'avait aussi remarqué.
Mais maintenant, elle savait. Il y avait d'abord eu les rumeurs, auxquelles Lys n'avait pas prêté attention. Puis elle s'était renseignée, parlant avec autant de personnes que possible. Puis, elle avait eu confirmation en observant Ayaan : Era Eléazar n'avait pas été enlevée. Elle était partie. Elle avait fui. De son plein gré. La Princesse d'Ivoire n'était pas celle que tout le monde croyait. Une traitresse. Une Souffleuse de Rêve dans l'âme.
Et pourtant, Ayaan, Galaad, Azel, tous s'escrimaient à la maintenir en vie, quitte à éliminer le roi en personne.
Ils faisaient erreur. Lys en était persuadée, son esprit était brillant et pragmatique. Era ne devait pas vivre. Era était le plus grand danger de la Tour. Ce que personne ne semblait voir. Lys avait pourtant prévenue Ayaan, mais ce dernier remettait cela sur le compte de la jalousie. La jeune fille n'avait aucune crédibilité. Oui, elle était jalouse, mais elle était assez lucide pour mettre son ressentiment de côté pour analyser froidement la situation. Era était un putain cheval de Troie, et personne ne semblait le voir.
Quelle ironie. Lys désirait plus que tout la vie d'Era, tandis que cette ingrate souhaitait plus que tout en sortir. Elle pariait que même son fils, elle n'en voulait pas, au fond d'elle. La vie était injuste, Lys Evaren l'avait bien compris.
Mais elle aussi était injuste, cruelle et sans pitié. Elle ne s'arrêterait pas tant qu'elle n'aura pas tout pris à Era, tant que sa vie ne sera pas la sienne.
Un jour, Lys Evaren régnera seule sur la Tour d'Ivoire, elle s'en fit la promesse.
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La Tour d'Ivoire - Tome 3
Science FictionAlors qu'elle s'apprête à découvrir la tristement célèbre Nation de Rubis, Era n'a qu'une idée en tête : protéger les siens et empêcher son cœur de mettre le monde en danger. Attiré par ses yeux rouges sang semblables à ceux de son peuple et par le...