"Finalement je n'aime pas la sagesse. Elle imite trop la mort. Je préfère la folie – pas celle que l'on subit, mais celle avec laquelle on danse."
Christian Bobin
Galaad
Galaad n'avait que très peu de considération pour la vie en elle-même. Selon lui, le pouvoir légitimait n'importe quelle action. Une personne gênait ? Elle devait être détruite. Une vérité mettait en péril la stabilité ? Elle tombait immédiatement dans l'oubli.
Des vérités et des secrets... Il n'aurait pas imaginé que la Tour en soi autant remplie, et encore moins qu'ils concernent parfois sa propre personne, sa propre famille. Il en était venu à la conclusion qu'on ne pouvait se fier à personne, et surtout, que certaines vérités n'étaient pas bonnes à dire.
Lorsqu'il descendit les escaliers menant aux cellules, il avait déjà pris sa décision.
L'homme d'En Bas attendait debout dans la petite pièce exiguë.
Galaad connaissait bien ces cellules, le nombre d'âmes qu'il avait torturé ici dépassait l'entendement. Cela ne l'empêchait pas de dormir, de vivre, ou d'aimer. Il savait qu'il n'était pas « normal » au sens commun du terme. Il le savait très bien et cela lui convenait. Sa « folie » avait pris de nombreux noms dans l'histoire.
Lorsque ses yeux croisèrent ceux de l'étranger, il se figea.
L'homme ne souriait pas, il se contentait de le regarder.
Galaad ne l'avait pas torturé. Pas encore.
Mais qu'il le fasse ou non, personne n'en saurait jamais rien. Peu de personnes venaient ici, et Ayaan ne voulait rien entendre concernant le Prince d'En Bas.
Ainsi, si ce que disait cet homme était vrai, c'était lui à qui Era avait donné son cœur. Galaad le trouvait banal. Des cheveux noirs en bataille, beaucoup trop longs pour être disciplinés, des cicatrices ça et là, des vêtements étranges... Le seul détail qui retenait l'attention était ses yeux. D'un vert captivant, lumineux, des yeux dignes des plus belles manipulations génétiques de la Tour.
Cela faisait quelques mois qu'il était là, à l'insu de tous, et il n'avait pas perdu de sa superbe. Il s'entrainait même tous les jours dans sa petite cellule pour conserver sa forme et ses muscles saillants.
Perte de temps que tout ça.
-Toutes mes condoléances, commença Galaad d'une voix mélodieuse.
L'homme ne put cacher sa surprise. C'était exactement l'effet que Galaad avait cherché à provoquer.
Il fronça les sourcils.
-J'ai cru comprendre que la reine Siora Sarkis, votre mère, avait trépassé, ajouta Galaad d'un ton calme.
L'homme d'En Bas l'observa longuement, puis hocha la tête.
-Il me semble que des condoléances vous concernant s'imposent aussi, répondit finalement le roi Émeraude d'un ton froid.
Galaad prit un air amusé.
Il était vrai que sa mère venait de mourir, mais ça, l'homme ne pouvait le savoir.
Il parlait donc de quelqu'un d'autre.
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La Tour d'Ivoire - Tome 3
Science FictionAlors qu'elle s'apprête à découvrir la tristement célèbre Nation de Rubis, Era n'a qu'une idée en tête : protéger les siens et empêcher son cœur de mettre le monde en danger. Attiré par ses yeux rouges sang semblables à ceux de son peuple et par le...