Rivière glacée

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« don't put me in a position where i gotta
show you how cold my heart can get »

Auteur Inconnu

Je me réveillai en sursaut, encore une fois perturbé par mes rêves concernant la vie d'Amara. Cela m'arrivait maintenant presque chaque nuit, c'était parfois des choses insignifiantes, mais à chaque fois j'en apprenais un peu plus sur cette mystérieuse jeune femme. D'habitude, je me serai accordée quelques minutes pour y repenser plus sérieusement et voir quelles informations je pouvais en tirer. Mais aujourd'hui, j'avais d'autres problèmes à gérer.

J'observai brièvement les lieux. Je savais où j'étais.

Ayaan m'avait fait visiter nos futurs appartements quelque temps avant notre mariage. J'avais été impressionnée par la chambre, spacieuse, mais également terrifiante. J'y étais à présent. Emmitouflée dans le grand lit double, j'avais une vue imprenable sur les jardins privés et sur les magnifiques dorures et fresques qui ornaient les murs.

Je me souvenais à peine de comment j'étais arrivée ici. Je me souvenais d'avoir pris la main d'Ayaan, je me rappelais l'avoir serré avec force. Il m'avait regardé, puis amené à bord. Il avait alors disparu, me laissant avec ses soldats. Arrivée à la Tour, des domestiques m'avaient emmené ici, et tombant de fatigue, je m'étais très rapidement endormie. Mais je les soupçonnais de m'avoir quelque peu aidé en versant quelque chose dans l'eau qu'ils m'avaient proposée. Peu importait.

Je n'avais pas revu Ayaan depuis. Tant mieux. Je ne savais pas si j'étais prête à cette confrontation. Je ne le serai peut-être d'ailleurs jamais. Mais à bien y réfléchir, avais-je été prête à quoi que ce soit dans ma vie jusqu'à maintenant ? Me marier avec Ayaan, avoir un enfant de lui, m'enfuir de la Tour, retrouver ma grand-mère en vie, apprendre à me battre, découvrir un autre monde, me trouver une famille, tomber amoureuse, et décider de tout abandonner pour ce même amour... Je n'avais été prête à rien de tout ça.

Je me levai lentement. Ma tête encore douloureuse après l'explosion causée par Lorenzo et ses hommes. Mes oreilles bourdonnaient encore et mon crâne me lançait. Mis à part ça, je me sentais ... bien ? Non, ce n'était pas le bon mot. En vie. J'étais en vie, pour l'instant, c'est tout ce qui comptait. Ça et le fait que mon enfant se portait bien. Une vive inquiétude m'envahit soudain, j'espérais qu'il n'avait rien...

Avant tous ces événements, j'aurais surement pris un peu de temps pour contempler les merveilles que contenait cette chambre. À présent, cela m'était égal. J'aurais préféré être dans mon ancienne chambre dans la partie réservée à la famille Eléazar, où j'aurais pu retrouver le journal d'Amara. Avec les connaissances que j'avais désormais en français, que ma grand-mère avait commencé à m'apprendre, j'étais sans doute capable de déchiffrer certains mots du carnet d'Amara. Sauf si Ayaan avait mis la main dessus. J'essayais de ne pas penser à la catastrophe que cela pourrait engendrer. Mon rôle était de protéger coute que coute ces précieuses reliques d'un monde perdu.

Tout en essayant de me souvenir de la visite que m'en avait faite Ayaan, je cherchai la bibliothèque ou son bureau. Je ne devais pas perdre de temps. Toutes informations étaient précieuses.

Je ne trouvais pas la bibliothèque, en revanche, le bureau d'Ayaan n'était pas difficile à dénicher ; à quelques pièces à peine de la chambre, et elle n'était pas fermée à clé.

Je n'étais pas assez stupide pour fouiller dans ses papiers personnels ou directement dans son bureau. Je savais qu'il était fort probable qu'il soit dans les parages, je n'allais pas déjà aggraver mon cas en me faisant prendre à fouiller dans ses affaires quelques heures seulement après mon arrivée. Je savais, en revanche, qu'il possédait une petite bibliothèque personnelle, certainement garnie de nombreux ouvrages interdits aux communs des mortels. J'entrepris de parcourir les titres, stupéfaites de constater qu'en plus de la mine d'informations que certains pouvaient m'offrir, Ayaan possédait également des œuvres écrites dans les langues d'avant la Tour, des œuvres parfois interdites, parfois non, mais la vraie délation était de les posséder dans ses langues proscrites. Je me figeai devant d'innombrables petits carnets noirs, je crus rêver en comprenant que j'avais là les mémoires de Maximilian Malkam.

La Tour d'Ivoire - Tome 3Où les histoires vivent. Découvrez maintenant