Chapitre 78

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Jeudi 26 octobre 20h00

LUKAS – chanteur de Sweet Poison


J'ai d'abord vu seulement les boucles grises émerger du wagon bleuté. Ça formait comme un petit nuage cotonneux tout mignon sur ciel uni. Puis, j'ai reconnu la permanente de Gis et son sac à main en cuir tressé qu'elle agitait à bout de bras pour attirer notre attention et j'ai sprinté pour la serrer dans mes bras. Elle embaumait encore le shampoing à la fleur d'oranger malgré le voyage et la gare et j'ai su qu'elle allait me porter bonheur pour les prochaines heures.

Sur le trajet, Gis et moi avons beaucoup discuté. Elle voulait connaître tous les détails de notre semaine et, comme Arthur se concentrait seulement sur l'itinéraire et que Gwen bougonnait à cause du poids des bagages, c'est moi qui les lui ai racontés. J'ai relaté notre drôle de première matinée, la rencontre avec notre ingé son, combien le patron était toujours aussi bizarre et à quel point je me sentais plus léger que l'air chaque fois que j'enregistrais même juste pour une phrase. Gis avait l'air aussi enthousiaste que moi et je me sentais très fier en lui annonçant qu'AC était d'accord pour qu'elle assiste à notre session de demain après-midi sous condition qu'on commence plus tôt le matin.

— Vraiment ? s'est-elle exclamée.

— Oui !

Je souriais jusqu'aux oreilles.

— Oh, merci ! Merci du cadeau, mes chéris ! C'est tellement adorable de votre part.

Elle nous a embrassé tous les trois (y compris Gwen qui proteste qu'il n'a rien à voir dans l'histoire).

— Je suis impatiente de découvrir tout ça avec vous ! Ça va être fantastique !

— Content que ça te plaise, Mamie, a souri Arthur.

Elle lui a tapoté l'avant-bras avec sérieux :

— Évidemment ! Mais en attendant, ne vous inquiétez pas. Moi aussi, j'ai une surprise pour vous...

C'est la surprise en question qui m'embarrasse un peu.

Pour l'annoncer, Gis nous a réunis tous les huit dans le hall de l'hôtel et a solennellement déclaré qu'elle nous invite, SKIN et nous, au restaurant pour dîner.

Bien sûr, j'adore l'idée. Les repas du soir à l'hôtel tous ensemble sont déjà des bons festifs, alors avec notre première fan Gis et dans un véritable établissement, ça me fait forcément envie. Cependant, que ce soit la grand-mère d'Arthur qui paye pour nous, un groupe nombreux d'ados en croissance, ça me met mal l'aise.

— Vous êtes sûre de nous vouloir tous à votre table, Madame Genêt ? interrogent Hadrien et ses bonnes manières. C'est très généreux de votre part de nous le proposer, mais je n'appartiens pas à votre famille ou à vos proches. Il n'y a aucune raison que vous dépensiez votre argent pour moi.

— Tst, tst, tst, rétorque Gis, intraitable. Je sais ce que je veux, jeune homme, et vous réunir tous me fait plaisir. Mon argent, je n'ai pas l'intention de tapisser ma tombe avec.

— Sauf que dans l'idée Mémé, on ne t'aurait pas enterré avec, marmonne Gwen à voix basse. Il aurait plutôt fini dans nos poches après lecture du testament.

— Désolé, m'excusé-je aussitôt. Je te rembourserai ce qu'il faut et...

— Wow, je plaisantais ! m'arrête-t-il, les yeux ronds. Jamais je demanderais un truc pareil à quelqu'un, t'es malade ? C'était juste une vanne. Je me fous du compte en banque de l'aïeule, elle fait ce qu'elle veut ; j'établis pas mon avenir en fonction de son héritage.

Skin vs Sweet Poison - let's rock !Où les histoires vivent. Découvrez maintenant