Chapitre 25 : Tu es spéciale.

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Jeudi 18 octobre 1984.

Je ne pouvais pas faire semblant d'être malade pendant plusieurs jours alors aujourd'hui je suis allé au lycée. J'ai passé la journée avec Steve et avec Billy, on s'est à peine lancé un regard. Steve m'a posé plusieurs questions, mais je lui ai juste dit que Billy était un abruti et il n'a pas cherché à en savoir plus.
Cela me déchirait le cœur, il a voulu me voir hier, et là, il m'évite complètement. Je ne le comprendrai jamais. Mais il me manque énormément.
Je ne sais pas vraiment ce que je ressens pour Billy, je suis perdue. Je n'ai jamais ressenti cela pour personne et je n'arrive pas à savoir si ce sont des sentiments amoureux ou juste de l'amitié. Évidemment, je préférais que ce soit la deuxième option, j'ai assez souffert.
Il est 16h, la journée vient tout juste de se terminer. Steve a un entrainement de basket, je ne vais pas y assister, je suis fatiguée. J'arrive sur le parking et je m'avance vers ma voiture quand je sens une main se poser sur mon épaule ce qui me fait sursauter, je me retourne.

— « Putain, ne me fais pas peur comme ça, Billy !
— Désolé. Je ne savais juste pas comment t'aborder sans que tu me dises d'aller me faire foutre.
— Va te faire foutre.
— Ok... Je le mérite.
— Tu pouvais venir me parler dans la journée tu sais, au lieu de me snober complètement.
— Y'avait Steve.
— C'est ça, ta putain d'excuse ?
— Il n'avait pas besoin de savoir.
— Effectivement, il t'aurait pété la gueule sinon.
— Ouais, enfin c'est plutôt moi qui lui aurais...
— La ferme. Écoute, tu m'as dit que tu ne voulais plus me voir alors, pourquoi tu ne me laisses pas tranquille ?
— Je ne peux pas, te laisser tranquille.
— Pourquoi ?
— Je suis juste désolé pour tout ce que je t'ai dit, je ne le pensais pas.
— Pourquoi tu m'as dit tout ça alors ?
— Parce que... Quand je suis énervé, je m'en prends à la première personne qui croise ma route.
— En l'occurrence moi, comme à chaque fois.
— Je sais, excuse-moi...
— C'est trop facile. Tu me lances des atrocités en pleine gueule et tu viens t'excuser ? Je ne suis pas ton punching-ball Billy. Dis-je en me tournant dos à lui. Va-t'en. Laisse-moi tranquille s'il te plaît. »

Il n'insiste pas et il s'en va tout de suite. Il traverse la rue, mais à ce même moment, une voiture folle fonce vers lui. Je me mets à crier : « Billy, attention ! » Il se retourne et se fige. Sans réfléchir, j'utilise mes pouvoirs pour stopper cette voiture à quelques centimètres de Billy et je cours vers lui.

— « Eh, viens avec moi. Dis-je en l'emmenant avec moi dans un coin tranquille. Ça va ?
— Comment... Je... Comment c'est possible... La voiture, elle allait beaucoup trop vite et elle s'est stoppée d'un coup...
— Je l'ai stoppé.
— Quoi ? Comment ?
— Comme ça... »

Une autre voiture arrivait assez vite. Je prenais une grande inspiration avant de lever le bras et de fermer les yeux pour l'arrêter net pendant quelques secondes et je l'ai laissé repartir.

— « Qu'est-ce que... Je ne comprends rien...
— J'ai... Des pouvoirs. Tu sais ce que c'est la télékinésie ?
— Oui, mais attends, quoi ? Des pouvoirs ?
— Je peux faire beaucoup de choses avec mon esprit. Je peux arrêter une voiture ou même la faire voler.
— Attends, tu te fous de moi là ? Disait-il en rigolant.
— Non...
— Putain t'es vraiment sérieuse... Fait chier, c'est...
— Choquant, je sais.
— Cait, tu saignes.
— Oh, c'est normal. Répondais-je en m'essuyant le nez.
— Normal ?
— Oui, quand j'utilise mes pouvoirs ça m'arrive de saigner, ce n'est rien. »

Il plongeait ses yeux dans les miens. Son regard était si intense et ses yeux brillaient. Il se jette littéralement dans mes bras. Je mets quelques secondes à réaliser et je le sers contre moi.

— « Je ne méritais même pas que tu me sauves la vie...
— Ne dit pas ça ! Dis-je en le poussant. Imbécile.
— Pourquoi tu me l'as dit ? Pour tes pouvoirs...
— Pour te prouver que j'ai confiance en toi et qu'il faut que tu me fasses confiance aussi. »

Il me prenait de nouveau dans ses bras, de façon si chaleureuse que je me sentais bien, tellement bien. Il posait sa main contre ma tête en me disant qu'il était désolé. Je me retirais de son étreinte pour prendre ses mains dans les miennes.

— « Je t'ai dit que j'étais prête à prendre le risque de rester près de toi. Lui dis-je.
— Et moi je t'ai promis d'essayer d'être moins...
— Con ? Répondais-je en rigolant.
— Ouais... C'est raté, on dirait.
— Ça dépend, tu t'excuses souvent ?
— Non.
— Donc, ce n'est pas complètement raté. Hum... Dis-je en regardant ma montre. Il faut que je rentre. On se voit demain ?
— Et pour les exercices ?
— Je les ai terminés.
— Oh... Je suis vraiment désolé.
— Ce n'est rien. Fais attention à toi en rentrant. »

Je commençais à vouloir partir, mais il me retenait en me prenant la main et me dit : « J'ai toujours su que tu étais spéciale. » En me faisant un clin d'œil, puis il s'éloignait pour rejoindre sa voiture.
Sans que je m'en rende compte, ma lèvre inférieure était prisonnière de mes dents. Il me trouve spéciale ? J'avais tellement peur... De l'effrayer avec mes pouvoirs.
Quand cette voiture lui a foncé dessus, j'ai eu si peur pour lui. Je ne peux pas m'empêcher d'imaginer ce qui se serait passé si je n'avais pas eu mes pouvoirs... C'est à ce moment-là que je me suis rendu compte que j'avais besoin de lui dans ma vie et que si je le perdais, je ne m'en remettrais sûrement pas.
Pendant le trajet, les paroles de Billy tournent en boucle dans ma tête. Mon sourire se dessine tout seul sur mon visage. J'ai l'impression que quoi qu'on fasse, on finira toujours par se retrouver, peu importe ce qu'il se passe entre nous.
Certes, il me fait du mal parfois, mais je commence à croire Maxine : il ne pense pas ce qu'il dit, sinon il ne viendrait pas s'excuser sans arrêt, sachant que de plus, il ne s'excuse jamais.
Il essaie de changer pour moi, je crois, mais je ne veux pas qu'il change. Je veux juste qu'il s'accepte. Qu'il accepte ses faiblesses, ses parts d'ombre, ses émotions, ses sentiments. Qu'il se laisse aller, qu'il soit juste lui-même et qu'il n'essaie pas d'être quelqu'un d'autre pour se protéger. Je ne suis pas son ange gardien, mais je veux vraiment l'aider.
Une fois arrivée chez moi, je fais rapidement mes devoirs avant de dîner et je ne tarde pas à aller me coucher, je suis épuisée, heureusement que le week-end approche.

Clair-obscur - TOME 1.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant