Chapitre 37

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Après avoir réglé les documents stipulant les clauses de ma liberté, je rentre à l'appartement de Gwen, où je vais devoir passer les huit prochains mois.

Blottie contre moi, Maïa s'est endormie après ces derniers jours chargés en émotions.

J'ai remercié mes deux anges gardiens au moins un millier de fois pour ce qu'elles ont fait, même si elles n'ont pas voulu s'étendre sur le sujet. 

Les premiers mois sont compliqués, je n'ai vraiment pas l'habitude de rester à rien faire toute la journée et le faible rayon que m'autorise le bracelet électronique ne suffit plus à la lionne en cage qui sommeille en moi. Heureusement que Maïa est là pour me faire passer le temps. On a toutes les deux emménagé dans la chambre d'amis de Gwen, qui s'est plainte au début, mais qui en réalité adore nous avoir près d'elle. Nadia est en vadrouille à droite, à gauche, et ces derniers temps, ma copine rousse et elle sont très secrètes.

Les médias se lassent peu à peu de moi, pour mon plus grand bonheur. J'ai décroché définitivement mon boulot de kidnappeuse. Cette vie-là est finie pour moi. Je débute ma nouvelle vie avec Maïa. Elle commencera réellement dans six mois, quand je pourrais enfin me déplacer où bon me semble. Maïa veut ouvrir un restaurant dans le sud. Elle regarde dès établissement en bord de mer, et se projette déjà là bas.

Comme j'aime la voir heureuse. Elle est si belle quand ses yeux pétillent de bonheur. Et son rire est comme de la musique à mes oreilles.

▪︎▪︎▪︎

C'est bon, tu peux ouvrir les yeux!

Elle retire ses mains de devant mes yeux et je regarde l'écran d'ordinateur avec stupeur.

Tu l'as acheté?

Astrid hoche la tête en venant me prendre dans ses bras.

Avec quel argent? On n'a pas assez!

Bien sûr que si ma belle, ne t'en fais pas pour ça. Tu voulais ton restaurant en bord de mer, alors je te l'ai trouvé. Bon, bien sûr, il y a de gros travaux à faire, je ne l'aurais pas eu à un si bon prix sinon, mais…

Je ne lui laisse pas le temps de finir sa phrase et vient l'embrasser.

Merci, As! Tu es incroyable !

On frappe à la porte, mais on sait déjà qui est là avant même d'avoir ouvert cette dernière. C'est certainement Benjamin, le policier qui vient vérifier qu'Astrid respecte bien son assignation à domicile. Mais ce jour est spécial, il va la conduire au poste pour qu'on lui retire son bracelet.

Dans la voiture du policier, je n'arrive pas à m'arrêter de sourire. Notre nouvelle vie commence enfin, et ces huit derniers mois ont été éprouvants. On était ensemble mais on ne pouvait mener à bien aucune de nos envies. C'était une situation très frustrante. Mais aujourd'hui, c'est notre nouveau départ, à toutes les deux.

Un officier de police lui rappelle qu'elle ne peux toujours pas quitter le territoire pendant un an, avant de nous laisser enfin repartir dans le même véhicule où nous sommes arrivées.

Alors, vous allez faire quoi maintenant ? Nous demande Benjamin en se gardant devant l'immeuble.

On compte aller dans le sud, et on verra bien comment ça se passe.

On lui fait nos au revoir et on monte, toujours par les escaliers, à notre étage.

Dis, pourquoi tu veux jamais prendre l'ascenseur ? Demandais-je.

La dernière fois que j'ai pris l'ascenseur, je me suis retrouvée enfermée dedans avec un sociopathe, pendant au moins trois heures. Répond-elle en rigolant.

Non, mais sérieusement?

Elle se retourne vers moi ce qui nous fait arrêter notre ascension.

J'étais sérieuse.

Décidément, j'ai encore tellement de choses à apprendre sur elle.

▪︎▪︎▪︎

Alors aujourd'hui c'est le grand jour? On pourra passer vous voir hein? 

Bien sûr Gwen, vous êtes ma famille alors passez quand vous voulez.

Elle me serre dans ses bras comme si c'était la dernière fois qu'on se voyait.

Et vous avez intérêt à nous appeler ! Renchérit-elle.

Elle nous fait toutes rire et on dépose le reste de nos affaires dans le coffre de ma voiture.

Je n'étais jamais vraiment partie de Bordeaux, et me voilà en route vers une petite ville au bord de la plage où j'ai acheté un restaurant en piteux état pour la femme que j'aime.

Le moteur gronde, un dernier geste dans le rétroviseur, et nous voilà partis pour plus de quatre heures de route, en chemin vers notre nouveau chez nous.

Le téléphone de Maïa sonne et le numéro que l'on connaît que trop bien s'affiche.

Tu devrais répondre ma chérie.

Elle secoue la tête et regarde le téléphone sonner.

Si il t'appelle, c'est qu'il veut renouer avec toi.

Astrid, c'est trop tard.

Des larmes viennent embuer ses magnifiques yeux verts et je décide de m'arrêter sur le côté de la route pour pouvoir me consacrer à elle.

Je sais mieux que quiconque que les relations familiales peuvent êtres compliquées, mais ton père t'appelle plusieurs fois par semaine depuis le procès d'Antonio. Il t'a laissé un nombre incalculable de messages vocaux pour te dire de le rappeler. Il veut peut-être retrouver la fille qu'il a perdu.

Je ne suis plus la même! J'ai tellement changé et j'ai peur qu'il ne me reconnaisse plus. J'ai peur qu'il se rende compte que je ne suis plus la petite fille qu'il a perdu.

La sonnerie s'arrête enfin.

Je ne voulais pas te brusquer…

Je sais As, tu es comme ça et j'aime ça chez toi. Mais comprends que ça n'est pas facile pour moi. Même si je parviens à renouer avec ma famille, rien ne sera pareil. Ma mère m'a pratiquement jeté de la maison quand je leur ai fait mon coming out. 

J'attrape sa main, comprenant qu'à cet instant, les mots ne suffisent pas.

Au moment où je m'apprêtais à redémarrer, elle fait quelque chose d'inattendu. Elle rappelle le numéro appartenant à son père, et écoute, fébrile, la tonalité de l'autre côté de l'appareil. A voir son visage se crisper, son père a décroché. Maïa enclenche le haut parleur.

Maïa? Ma puce?

Oui… Répond-elle, la voix cassée.

Oh, Maïa ! Je me suis fait tellement de soucis pour toi! Tu vas bien? Où est tu?

Je… oui je vais bien. Ça faisait longtemps que je n'étais pas allée aussi bien.

Elle resserre sa main sur la mienne, la panique du début s'estompant de son visage.

Maïa, ma puce, je voudrais tellement te revoir. J'ai eu très peur pour toi! Je savais qu'Antonio n'était pas quelqu'un de bien.

Elle rit pour faire redescendre la pression.

Maïa relâche ma main, a présent plus sereine, et me fait signe de repartir. Elle discute pendant tout le trajet avec son père qui semble s'intéresser à toutes les aventures qui lui sont arrivées depuis qu'elle a coupé contact avec eux.

Entre deux mauxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant