Chapitre 33 : Sa Faiblesse

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Démétri la tenait dans ses bras, à moitié morte. Il avait failli broyer le téléphone quand il avait reçu l'appel. Il n'avait pas attendu Jane, qui l'avait suivi et était reparti. Il avait peur. Pour la première fois depuis le début de son existence en tant que vampire, il avait peur. Il avait peur qu'elle le quitte, peur qu'elle meure. Il ne pouvait pas le concevoir. Depuis qu'il l'avait "rencontré" dans le salon des Cullen, ses pensées toutes entières tournaient autour d'elle. Elle était devenue le centre de son existence et bien qu'il ait tenté de fuir, il n'était jamais allé très loin. Quand il était arrivé près de la maison, son corps entier s'était tendu. L'odeur de sang, son sang, qu'il avait goûté, l'avait pris à la gorge. Et il y avait une deuxième odeur. Un parfum masculin qu'il connaissait bien. Démétri savait qu'il ne ressortirait pas indemne de la maison. Il savait que la vengeance le poursuivrait. Jane avait dit quelque chose mais il n'avait rien entendu, trop concentré sur le trop faible battement de cœur. Il s'attendait à trouver Trevor, mais le lâche avait fuit. Il se promit de le trouver et de le faire souffrir.
Mais quand il vit ce que Mme Bennet, la concierge avait vu, son cœur se brisa.

Il s'était immédiatement précipité vers son corps, allongé et brisé. Il l'avait ramené contre son cœur et avait caressé ses joues en espérant qu'elle se réveille. Trevor l'avait mordu, et lui avait déchiqueté la gorge. Il l'avait poignardé et laissé sur le sol. Son visage laissait transparaître toute la souffrance qu'elle avait éprouvé. Elle était épuisée. Seule. Mourante. S'il pensait au mot, il avait l'impression d'être englouti et de ne pas pouvoir se relever.
Mais elle l'avait reconnu et avait soupiré son nom. Sa voix était  faible et tremblante. Démétri savait que cet effort était douloureux pour elle, il le sentait. Puis elle s'était évanouie. Ses beaux yeux s'étaient fermés. Il ne s'était jamais senti aussi seul qu'à ce moment. Où irait-il s'il ne pouvait plus contempler ses beaux yeux ?
Il avait toujours pensé qu'il ne connaîtrait jamais la sensation de cœur brisé mais il s'était trompé. Son coeur, qui s'était arrêté de battre depuis longtemps, se fissurait. Son âme sœur, sa magnifique et puissante sorcière avait souffert et il n'avait pas pu la protéger. Elle avait été toute seule, et avait été obligé d'endurer d'horribles souffrances. Il pouvait le sentir. La culpabilité l'envahissait. Démétri savait que s'il avait été humain, ses yeux déborderaient de larmes. Ils étaient d'ailleurs remplis de venin. "Tu es faible. J'avais raison depuis le début et tu le sais. Tu aurais dû la changer, elle était trop fragile" Démétri pouvait entendre Amun comme s'il était à côté de lui. Le vampire lui aurait certainement dit ça, avant de la transformer. De la brûler. De la faire souffrir. Démétri connaissait les enjeux de son geste s'il le commettait. Elle vivrait, comme elle le désirait mais il ignorait si la quantité de sang qu'il allait absorber suffirait à le soigner. Si elle ne suffisait pas, il mourrait. Elle s'en voudrait, il le savait.
Faible. Faible. Faible. Faible.
Ce mot se répètait dans son esprit alors qu'il embrassait pour la dernière fois ses lèvres humaines, comme elle en avait émis le souhait. Il regarda Jane, qui semblait désolée et triste. Lorsqu'elle croisa le regard du traqueur, elle s'approcha de lui et lui dit :
-Tu dois le faire.
Le vampire se pencha alors vers la gorge de Lili et aspira le sang restant dans son corps, en essayant de la blesser le moins possible. La sensation de bien-être apporté par son sang fit que Démétri se détesta. Elle n'aurait pas souffert s'il n'avait pas préféré chasser un objet peut être imaginaire. C'était de sa faute. Il se croyait invincible alors qu'il n'était que faible.
Faible. Faible. Faible.
Il avait été incapable de la protéger.
Son ego lui disait que Trevor ne les trouverait jamais.
Arrogant. Arrogant.
Et maintenant elle était mourante.

Quand il sentit que trop peu de sang venait à lui, il mordit sa clavicule. Il s'attendait à une réaction de Lili car le venin était censé la brûler mais il n'y eut rien. Son cœur ne battait plus assez vite. Démétri n'avait jamais connu la panique. Il était trop précis, trop doué, trop rapide pour paniquer.
Mais maintenant, avec son âme sœur, dans ses bras, il était paniqué. Il ne pouvait pas la perdre. Il mordit la peau près de son cœur, ses poignets et même l'autre côté de sa gorge.
Mais rien.
Pas un battement.
Il ne tenait qu'un corps.
Un corps qu'il venait de tuer.
Tueur. Tueur. Tueur.
-Lili, s'il te plaît, reviens-moi. S'il te plaît, tu me l'avais promis.
Il enleva son pull et la mordit à plusieurs endroits. Il ne pouvait pas la perdre.
Il la posa sur le sol et entreprit de faire un massage cardiaque avec ses mains pleines du sang de son âme sœur.
-Je t'en supplie, mon amour, reviens-moi.
La panique le consumait. Il avait peur. La vague s'approchait de lui pour l'engloutir. Il était seul. Il avait perdu sa moitié. Il l'avait tué.
Meurtrier. Meurtrier. Meurtrier.
-Elizabeth, je t'en supplie. Je ne peux pas te perdre.
Sa voix était tremblante. Démétri tremblait. Il ne savait pas si c'était des sanglots ou la peur qui le faisait trembler.
Il attira de nouveau la jeune femme contre lui, contre son cœur. Démétri se souvenait qu'elle aimait se mettre sur son cœur quand ils partageaient le même lit. Il la berçait. Elle allait vivre. Elle ne pouvait pas mourir. Il ne pouvait pas la perdre. Leur histoire se finissait comme ça. Il vivait, mais seul, comme il l'avait été pendant plusieurs siècles. Et elle, elle mourrait, tué par l'homme pour qui elle était prête à se sacrifier. Après tout, c'était de sa faute.

Démétri resta longtemps sur le sol, avec Lili, inanimée, dans ses bras. Où pouvait-il aller, après tout. Il n'avait nul part où se réfugier à présent. Il entendait la voix de Carlisle lui parler mais il ne l'écoutait pas. Il se concentrait sur le faible battement de cœur qu'il entendait. C'était le sien.
-Tu as réussi, Démétri. Tu l'as sauvé.
La vague reculait, même si la peur et la tristesse restaient. Ensuite, il avait vécu dans une sorte de néant. Il ne croirait pas Carlisle tant qu'elle ne se réveillerait pas. Carlisle l'avait aidé à  envelopper son corps brisé dans une couverture, puis Démétri l'avait porté. En regardant son visage endormi, sa culpabilité grandit. Il ne pourrait jamais effacer de son esprit, son visage tordu par la souffrance, peu importe le sort que Trevor lui ferait subir.
En la ramenant chez les Cullen, les mêmes mots se répètèrent dans son esprit.
Il avait vu l'air brisé d'Esmée, qui ne pouvait pas regarder le traqueur, qui avait les mains et les lèvres ensanglantées.
Meurtrier. Meurtrier. Meurtrier.
Emmet, bien qu'il s'attendait à des regards noirs, n'en fit rien et lui dit qu'ils auraient ce salop. Rosalie le fusilla du regard et le mena jusqu'à la pièce où Lili accomplirait sa transformation.
Bella et Edward lui accordèrent un regard de pitié. Ils avaient presque été dans la même situation.
Jasper n'était pas là. Will, lui était là et il lui dit que c'était de sa faute, il ne la méritait pas. Démétri savait qu'il avait raison.
La Garde ne dit rien. Ils appréciaient aussi la sorcière.
Jusqu'à la pièce, le traqueur garda la jeune femme serrée contre lui. Il la déposa dans un lit et Rosalie et Alice s'occupèrent de nettoyer la sorcière. Démétri avait l'impression qu'elles n'étaient pas assez délicates alors il prit l'éponge des mains d'Alice et le fit lui-même. Les deux vampires ne dirent rien et sortirent de la pièce. Démétri détestait cette attitude. L'empathie. Il enleva chaque trace de sang sur le corps de Lili méticuleusement. Il nettoya avec une infime douceur ses blessures, lui fit enfiler des vêtements qui n'étaient pas ensanglantés et coiffa ses cheveux. Une fois qu'il eut fini, il ajouta une couverture sur son âme sœur, même si ça ne servirait bientôt à rien, si tout allait bien. Sans le sang, elle avait l'air endormi. Loin de la souffrance qui aurait pu être évitée s'il avait été là.
-Ce n'était pas ta faute. Tu ne dois pas t'en vouloir. La voix d'Esmée brisa le silence et Démétri la laissa approcher.
-Si j'avais été là, ce ne serait pas arrivé.
-La culpabilité ne te mènera à rien. Tu l'as sauvé. Bientôt vous serez réunis. Tu devrais t'aérer l'esprit. Aller dehors.
-J'irais dehors quand elle sera avec moi.
-Bien. On est en bas si tu as besoin de quoi que ce soit.
Elle quitta la pièce et Démétri déposa un baiser sur le front de Lili avant de s'asseoir à côté d'elle.
-Je suis là, mon amour. On se retrouve  bientôt. Pour l'éternité.

DAWN II : THE LAST FALLOù les histoires vivent. Découvrez maintenant