23/35 Défaut de mémoire [partie 1]

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9 septembre 2018


J'avais entendu le bruit de la porte claquer et l'avais sentis s'allonger à mes côtés dans le lit. Il m'avait dit qu'il rentrerait une heure après moi, maximum, cela en faisait six. J'étais déçue, mais pas tellement étonnée. J'avais écourté la soirée hier, me sentant nauséeuse et fatiguée. 

J'étais angoissée en ce moment, mon mémoire était à rendre dans un mois et je faisais face à un blocage aussi bien psychologique que physique. L'achèvement de cet exercice me faisait peur. Pourtant mon directeur de mémoire était confiant. Mon travail était efficace et adéquat, je devais arrêter de me mettre des barrières.

Mais depuis une dizaine de jours, j'avais des douleurs de têtes affreuses, je dormais à peine et je n'arrivais plus à avaler grand chose.

Daniel passa son bras autour de ma taille et me caressa le ventre. Il avait le culot de me réclamer de l'affection. Je grognai légèrement en me reculant. Cela ne l'empêcha pas de se serrer contre moi et de m'embrasser dans le cou.

– Tu pues l'alcool et la clope, râlai-je.

– Mh, désolé, répondit-il d'une voie endormie.

Tout à coup, je me relevai précipitamment et dus courir jusqu'aux toilettes pour y vomir le peu de choses que j'avais dans l'estomac. J'entendis Daniel s'approcher de moi et passer sa main dans mon dos, inquiet. Je ripostai violemment, lui criant presque de sortir. Les haut-le-coeur me secouèrent pendant plusieurs minutes.

Je m'adossai haletante au mur quand je le vis, l'air perplexe, sur le pas de la porte avec un verre d'eau entre les mains. Je le laissai entrer. Il s'assit en face de moi sur le carrelage froid en me tendant le verre frais.

– Ça va mieux ?

– Pas vraiment... Hier aussi, j'étais dans cet état-là.

– Il faut que t'arrêtes de stresser comme ça, Sarah.

– À qui le dis-tu, marmonnai-je.

Du bout de la main, il vint chatouiller ma jambe à côté de la sienne.

– On retourne se coucher ?

– Ma nuit est presque finie, persiflai-je.

– Me fais pas croire que ta nuit s'arrête à sept heures du matin le week-end, répondit-il un sourire goguenard sur les lèvres. Tu m'en veux ?

– Malheureusement non.

Il sourit franchement. Il me tendit une main réconfortante et je m'allongeai dans le lit à ses côtés, le sang tambourinant toujours dans les tempes.


Je fus prise de crampes dans le bas-ventre. Voilà que j'allais avoir mes règles par-dessus tout. Mais n'étais-je pas en avance ? J'avais perdu le fil des jours ces derniers temps. J'attrapai mon téléphone qui trainait à côté du lit et ouvris l'application sur laquelle j'enregistrais mes cycles. Celle-ci m'indiqua vingt-huit jours de retard.

Je fronçai les sourcils et pestai d'avoir oublié de mentionner mes dernières règles. Je glissai mon doigt vers le calendrier pour vérifier la date présumée de ces dernières. Le 14 août. Bizarre. Ce jour-là, c'était le dimanche où nous avions été à la piscine avec Julie. Je m'en souvenais, mon téléphone m'avait rappelé l'anniversaire d'une amie alors que je payais mon entrée. Je n'avais pas saigné. J'essayais de fouiller dans ma mémoire, mais n'arrivais à remettre dans les jours suivants ou précédents l'apparition de ce phénomène ennuyant. Je me mis alors consciencieusement à repasser le calendrier du mois écoulé pour trouver les dates possibles de mon saignement. Cela ne me revenait pas.

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