10/35 Goûter aux délices [partie 2]

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16 décembre 2017

Je me retrouvai debout face à lui. Il me fixa, l'air hagard, les yeux voilés, pendant quelques instants. Puis il se redressa et me demanda, en essuyant du pouce et de l'index la commissure des lèvres :

–    Qu'est-ce qu'il y a ?

–    Hum, je-... Je dois aller aux toilettes.

    Le sang tambourinait dans mes tempes et je courus presque m'enfermer dans la salle de bain.


    Quand je croisai mon reflet dans la glace, je remis d'une main agitée ma tenue désordonnée et fis couler de l'eau fraîche sur mon visage enfiévré.

    En un quart de seconde, je m'étais mise à douter. J'en mourais d'envie, ça ne faisait aucun doute et mon corps en tremblait encore. Mais une angoisse était venue m'enserrer la poitrine.

    Et si je n'étais pas à la hauteur ?

    C'est vrai après tout, il était là, beau, charmant et charmeur, sûr de lui et de son corps, certain dans ses gestes. Il avait transformé un baiser en une intense volupté où nous étions en train de nous déshabiller. N'en avais-je pas joué aussi ? Si bien sûr. Mais lui savait parfaitement y faire. Il avait certainement couché avec des dizaines de filles. Rien que d'y penser, j'en avais le vertige.

    Je n'étais pas mannequin, moi. Je ne savais pas prendre des positions alanguies dans un corps parfait et faire monter le désir d'un coup d'oeil. J'étais une nana de vingt-trois ans, complexée par son physique, ses hanches trop larges, sa cellulite et ses petits seins.

    S'il me voyait nue et qu'il ne me trouvait pas assez jolie, que je ne lui faisais plus envie, qu'allait-il se passer ? Quand je réalisai que je ne m'étais pas épilée depuis ma dernière sortie piscine, il y a trois semaines.

    Qu'avais-je pensé ce matin ? À ma tenue ? Idiote. Bon, cela n'avait rien de grave. Comparé au reste !

    Pourtant, ce n'était pas comme si je n'avais jamais vu le loup ! Cela faisait plusieurs mois que je n'avais couché avec personne, d'accord. Depuis juin dernier, avant nos vacances communes. Mais ce n'était pas une question de pratique régulière, si ?

    Je soupirai en laissant tomber ma tête entre mes mains. Je ne m'étais jamais considérée comme une personne très sexuelle. Avec mes ex, nous couchions bien sûr ensemble, mais je n'étais pas celle en demande, j'étais plutôt celle qui accepte, y prenant un plaisir relatif. Je n'y avais jamais accordé d'importance. Ne pas avoir envie ne me semblait pas un problème.

    Sauf que là, je le désirai absolument, totalement, entièrement. Du bout des orteils jusqu'à la racine des cheveux, j'en frémissais. Et je voulais à tout prix que cela continue et recommence. Mais pour ça, il fallait que ça se passe bien, même peut-être très bien. Un bon coup, quoi.

    Quels étaient alors les gestes à ne pas louper ? Devais-je jouer la vierge effarouchée qui minaude et qui fait non de la tête en gloussant ? Ou prendre les devants et arriver devant lui en le mettant à genoux pour mon simple plaisir ? Ou descendre son pantalon et le prendre dans ma bouche en le regardant droit dans les yeux ? Pas que cela ne me gène, mais j'entendais la voix de Julie qui soutenait qu'elle ne faisait jamais de pipe avant la troisième nuit, pour ne pas être prise pour une actrice porno.

    Et puis, fallait-il rester dans le salon ou aller dans ma chambre pour être plus à l'aise ? Mais ne me prendrait-il pas pour une fille sans imagination, un peu conventionnelle ? ... Le canapé avait un côté efficace, on ne s'y attarderait pas trop. Un petit coup et hop on se rhabille, l'air de rien. Alors que le lit, il s'imaginerait peut-être que j'avais envie qu'il dorme chez moi toute la nuit. Ça me traversait l'esprit, si tout se passait bien.

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