7/35 Je m'en fiche [partie 4]

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13 octobre 2017

Pourtant, pendant un moment encore, nous restâmes plantés l'un devant l'autre. Ce fut la notification d'un message sur son téléphone qui nous ramena à l'instant présent et à l'absurdité de la situation. D'un geste de la main, il m'indiqua le métro et entama un pas vers l'arrière.

–    Tu ne le prends pas ?

–    J'ai envie de marcher, répondit-il.

    Il se détourna. Mais un je-ne-sais-quoi en moi fit que je n'avais pas envie de lâcher l'affaire de suite. Et sans réfléchir, je forcis le pas pour le rattraper et marcher à ses côtés. Il me lança un regard suspicieux :

–    Moi aussi, j'ai envie de marcher finalement.

–    Et t'es obligée de marcher là ?

–    Oh, redescend un peu ! dis-je à demi-énervée. Le trottoir ne t'appartient pas encore et j'ai le droit de marcher où je veux !

    À ma réplique, il écarquilla les yeux et éclata franchement de rire. Et cela fit bondir quelque chose du côté de mon ventre. Secouant la tête, résigné, il dit :

–    T'es vraiment chiante, toi en fait !

–    Je préfère têtue, me défendis-je en croisant les bras.

–    Ouais, si tu veux, répondit-il toujours le sourire aux lèvres.

–    Par contre, on est censé faire semblant de rien. Donc, si on pouvait éviter de se parler...

    Je m'étonnai de mon attitude si effrontée. À croire que je trouvais plaisant ce jeu de provocations.

–    T'as raison, j'me tais, conclut-il, moqueur.

    Et nous nous mîmes à marcher de front.


    Les poteaux, les gens, les vélos, nous étions obliger de slalomer pour rester au même niveau. C'étaient autant d'excuses pour que nous nous frôlions à chaque fois que nous nous rejoignions. Sa main effleura mes doigts lorsqu'il la glissa dans la poche de son jean. Était-ce intentionnel ? Mon coude toucha son bras quand je rajustai mon sac sur l'épaule. C'était intentionnel. Il guidait, je m'amusais à calquer mes pas sur les siens. Je ne remarquais pas où nous passions. Lui-même n'avait pas l'air d'avoir de destination. Ma seule attention était concentrée sur la distance qui nous séparait. Cette espace était devenu palpable, contenant tous les mots que nous ne disions pas. Nous nous lancions des regards asymétriques.

    Et puis s'instaura un rythme. J'imposai aussi des directions. Je choisissais de tourner à gauche précipitamment, l'obligeai à appuyer son bras au mien le quart de seconde qu'il réagisse à mon mouvement. Nous nous mîmes à nous tourner autour. Lui devant dans un escalier. Moi derrière, observant ses jambes arquées grimper les marches. Moi, me faufilant entre l'étale d'un fleuriste et une poussette. Lui la main rasant mon dos pour ne pas me perdre. Nos regards s'accordèrent. Nous ne parlions que de l'essentiel : – Par là. – Non à gauche. – Attention à la voiture.


–    T'avais pas cours cet aprèm' ? me demanda-t-il alors que nous attendions pour traverser à un carrefour.

–    Oh, je crois pas, soufflai-je l'air de rien, m'appuyant contre un poteau.

    Il rit. Moi aussi.

–    Et toi, t'avais pas des rendez-vous à gérer ?

–    Je sais plus. J'crois que j'ai plus toute ma tête là.

    Il me zieutait du coin de l'oeil.

–    Ah mince, c'est grave tu penses ? renchéris-je en gesticulant bêtement autour du poteau.

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