10/35 Goûter aux délices [partie 1]

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16 décembre 2017

Cela faisait déjà quatre fois que je changeais de tenue. Je voulais être jolie sans donner l'air de l'avoir fait exprès. Je ne m'en sortais pas. J'avais essayé un jean avec des bottines à talons, trop habillé pour un samedi ; j'avais opté pour des Converses, erreur, on aurait dit une lycéenne ; alors j'avais tenté la robe, et me sentis bête dans cet ensemble bien trop soirée de trentenaires dans un bar à vins ; en fouillant, j'avais trouvé une jupe courte. Ça pouvait faire l'affaire. Avec des bottines ? Non, trop grivois. Avec des baskets colorées ? Très bien, ça donnait un côté habillé/décontracté très tendance.

Restait à trouver le haut, le manteau et la coiffure. Je m'énervai moi-même devant le miroir. Merde, mes collants avaient un trou aux talons. Tant pis, c'était ma dernière paire, ça ne se verrait pas.

Quand la sonnette de la porte retentit, je venais d'achever un demi-chignon décoiffé qui m'avait pris une demi-heure après m'être mis un peu de rouge à lèvre, garantie sans traces bien sûr.

Je sautai sur l'interphone pour lui dire que je le rejoignais en bas, avant que ma coloc' n'ait eu le temps de sortir de sa chambre. Je n'avais pas envie qu'elle le rencontre. J'appréciais Aurore, on vivait ensemble depuis un an, mais elle avait un avis sur tout et tout le monde. Je préférai éviter qu'elle ne me croise avec lui, ne sachant pas comment je devais le présenter : ami ? mec ? connaissance ?


Je mis du temps à descendre. Je tournai en rond pour retrouver mes affaires, mon portable, mon bonnet, ma carte bleue. Alors, il s'était adossé à une barrière en scrolant sur son portable. Il était entièrement vêtu de noir, ça faisait ressortir ses yeux qu'il releva vers moi à l'entente de la porte de mon immeuble.

Je fus satisfaite de mon choix vestimentaire quand je remarquai qu'il me détailla des pieds à la tête en me laissant marcher vers lui, un rictus au coin de la bouche. Je m'arrêtai à sa hauteur en soufflant un – salut timoré. Il le fut moins que moi et vint coller ses lèvres fraiches sur les miennes. C'était doux.

– On va boire un café ? proposai-je lorsque je rouvris les yeux.

– Je te suis, dit-il en passant sa main dans la mienne.


Nous descendîmes quelques rues vers le centre de Montreuil, et nous nous installâmes dans un bar que je connaissais bien. Qu'est-ce que j'aimais les terrasses parisiennes, les deux chaises adossées au mur du café devant une table branlante pour laisser un passage précaire sur le trottoir étroit. Je n'avais même pas à réfléchir pour coller mon genou contre sa jambe. En plus, il faisait bon sous ce soleil hivernal, sa main nonchalante posée sur ma cuisse alors que nous échangions des banalités, le visage penché l'un vers l'autre.

Nous déambulions entre les étals du marché qui remballaient en cette fin de matinée. Je m'achetai quelques légumes et m'excusai de l'emmener faire mes courses. Il me répondit en riant qu'il m'avait promis de faire ce que je voulais de cette journée. Je rétorquai que la prochaine étape était ma lessive.

– J'adore, me lâcha-t-il blagueur.

– Alors, tu fais quoi pour les fêtes ?

– À Noël, je suis en famille à Manchester et après, on part skier dans les Alpes entre cousins, me répondit-il en buvant une gorgée du vin chaud trouvé à la fin du marché.

– La chance ! Je n'ai pas skié depuis mes 12 ans, en classe de neige.

– Je te ramènerai une de ces petites marmottes en peluche qui sifflent quand tu appuies sur leur ventre si tu veux, me taquina-t-il.

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