Chapitre 26

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~Lando~

Je me lève et sors du salon où mon père regarde encore le journal sportif de l'équipe à la TV où il n'arrête pas de passer le visage de Carlos.

Une semaine que je ne l'ai pas vu, on est suspendus jusqu'à demain et ce n'était vraiment pas le moment. En plus de lui, je vais perdre la seule chose qui me restait : le foot. C m'a bien fait comprendre que je n'étais pas indispensable dans l'équipe et qu'il ne se gênerait pas pour se passer de moi si on en arrivait là. Maintenant que c'est le cas, je ne me fais pas d'illusions et j'ai du mal à envisager mon avenir professionnel. Je ne veux pas partir, je dois être sadique parce que je ne veux pas m'éloigner de lui, alors que ce sera pire en le voyant tous les jours, le voir, ne pas le toucher et savoir qu'il baise des femmes...

J'entre dans la cuisine en essayant de ne pas penser à Carlos, je ne fais que ça. Chez moi, c'est l'horreur, tout me le rappelle. La douche, mon lit, la TV, la cuisine, même les chambres d'amis qu'on a inaugurées ensemble ! Il n'y a pas une pièce où Carlos n'a pas laissé un souvenir de sa présence. En venant ici, je pensais ne pas le voir, mais en entrant dans ma chambre de gamin, il était là, encore. J'inspire et prends un torchon pour aider mon frère qui fait la vaisselle. Sa femme est partie pour le week-end chez ses parents avec les enfants, du coup, lui aussi se retrouve ici. Ma mère est aux anges de nous avoir tous les deux et mon père se contente de me regarder en essayant de comprendre sans toutefois me poser directement la question.
 
—  Laisse, je vais le faire, me lance Oliver en voulant reprendre le torchon.
 
—  Depuis quand tu veux m'épargner d'essuyer la vaisselle ?
 
J'attrape une assiette et commence à essuyer, j'ai besoin de m'occuper. Je n'ai jamais autant couru que ces derniers jours et le reste de la journée, je fais du sport. Quand je ne fais rien, je pense et en ce moment, ce n'est pas la meilleure chose à faire.
 
—  Depuis que tu tires une tête d'enterrement.
 
Je souris, continue ma tâche et Oliver replonge ses mains dans l'eau savonneuse. On n'a jamais été vraiment proches, comme deux frères pourraient l'être. Pourtant, je me surprends à lui parler.
 
—  C'est fini avec Carlos.
 
Ses mains se figent un instant avant qu'il ne me regarde. Voilà peut-être pourquoi je ne disais rien, ce regard, celui qui est triste pour vous, j'ai l'impression, un instant, d'avoir ma mère en face de moi.
 
—  Qu'est-ce qui s'est passé ?
 
—  Ils savent. L'équipe sait pour moi. Et Carlos...

J'inspire et m'appuie sur le plan de travail en baissant la tête.

Il ne veut pas qu'on sache pour lui.
 
—  Vous aviez l'air bien, pourtant. Je veux dire, je pensais qu'il t'aimait, il te regardait comme si t'étais la huitième merveille du monde. Et toi, tu souriais comme un crétin.
 
Je donne un coup de torchon à mon frère qui m'envoie de l'eau. J'étais bien avec Carlos, c'était simple avec lui. Il me manque terriblement.
 
—  Il faut croire qu'il aime sa carrière plus que moi.
 
Je m'en veux d'avoir cru ça possible, d'avoir pensé être plus important que le reste, mais on n'a pas les mêmes priorités, lui et moi. Je le savais et j'ai laissé courir, je suis tombé amoureux de lui et maintenant je souffre comme un damné, parce que j'ai été trop con pour ne pas arrêter tant qu'il était encore temps de sauver mon cœur.
 
—  Je ne crois pas, Lando. Je ne connais pas très bien Carlos, mais il n'a pas l'air d'être ce genre de personne...
 
—  Justement, tu ne le connais pas, je le coupe.
 
—  Ce que je veux dire, reprend-il en s'essuyant les mains, c'est qu'il a peut-être besoin de temps pour se rendre compte de ce qu'il perd.
 
Je secoue la tête, je sais qu'il en a besoin, mais combien ? Des années, il ne changera pas tant qu'il sera dans ce milieu, il va reprendre sa vie d'avant moi, celle où il baisait des femmes. Il sera à nouveau le champion que tout le monde aime et il m'oubliera comme il s'oublie lui-même.

The Hidden Face [Carlando]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant