The Hidden Face [Carlando]

Chapitre 23

~Carlos~

—  Entre Carlos, assieds-toi.
 
Je passe une main dans mes cheveux encore mouillés en soupirant, je ne suis pas d'humeur à me prendre un troisième savon. C me regarde m'asseoir attentivement, nous nous lorgnons quelques minutes sans dire un mot. Il me défie du regard de parler en premier, mais de quoi ? Ça, je l'ignore. Parce que je ne m'étalerai pas plus sur les raisons qui m'ont poussé à tabasser l'italien.

Un profond soupir sort de la bouche de mon coach, il s'appuie contre le dossier de sa chaise, je n'aime pas le regard qu'il m'accorde.
 
—  Tu sais pourquoi je t'ai fait venir ?
 
Ah ça, je me doute qu'il ne s'inquiète pas, mon altercation va me poursuivre durant un moment.
 
—  C'est vis-à-vis encore de cette histoire avec le milanais ? Coach, si je pouvais vous dire en détail ce qui m'a poussé à faire ça...
 
C lève une main pour me faire taire. J'obéis, je discute  — rarement —  avec lui.
 
—  Tu sais, Carlos, l'esprit d'équipe est la meilleure chose qui définit un capitaine. En huit ans, je n'ai jamais regretté, même si tu étais très jeune, de t'avoir donné ce brassard. Tu le mérites, il fait partie de toi, j'ai toujours su que tu te battrais et je parle au sens figuré, pour tes coéquipiers. Mais permets-moi d'exprimer mon étonnement.

À son tour, il passe une main dans ses cheveux gris.

— Cette saison, tu as changé, fils. Elle est différente, pour toi, à tes yeux et j'ignorais pourquoi.
 
Mon cœur commence à s'accélérer, je me demande pourquoi on parle de MOI, et pas des raisons qui m'ont poussé à agir ainsi... à moins que...
 
—  Tu sais, reprend C, je pense que l'arrivée de Lando y est pour quelque chose. Je pense que tu as trouvé en lui le soutien que tu n'as jamais eu parmi tes collègues. Sebastian est bien gentil mais pas assez intelligent face à toi. J'ai toujours voulu que vous vous entendiez bien en dehors du terrain, mais c'est différent avec Lando, j'ai l'impression...

Il se tait quelques instants.

—   Fils, c'est ton ami ?
 
Ma voix est rauque lorsque je réponds, je suis sous le choc, crispé, à l'idée que mon mentor puisse découvrir la vérité à mon sujet, il faut que je me ressaisisse, que je montre que je suis Carlos Sainz, et pas le mec fou amoureux qui s'inquiète comme un malade pour l'homme qu'il aime. Parce que je sais, Lando ne va pas bien, et j'ai merdé en lui faisant la gueule, je le sais, mais... Le coach attend ma réponse, je le vois insister du regard.
 
—  Oui, Lando est mon ami. Mais coach...
 
—  Alors, il faut que nous parlions. Carlos, tu es mon capitaine, tu es celui de Lando, et je pense que l'heure est grave. Ce voyage à Milan vient de déclencher des tas de choses.
 
Je me fige, et comprends qu'il sait. Pour Lando, il sait quelque chose, mais quoi... Bon sang !
 
—  Si tu ne veux pas me dire pourquoi tu t'es battu, ne dis rien. Je sais.
 
Je me liquéfie complètement sur ma chaise maintenant que j'ai la confirmation. Il... sait ? Il sait quoi ? Que mon mec aime les mecs ou la raison pour laquelle il était si en froid avec ses ex-coéquipiers ? Je me racle la gorge pour qu'il me comprenne.
 
—  Pardon, mais où voulez-vous en venir dans...
 
C m'interrompt.
 
—  J'ai parlé avec l'ancien coach de Lando, je sais pourquoi tu as levé la main sur ce joueur. Je sais pourquoi Lando est parti.
 
Je ferme les yeux. Oh, bordel. Ma peur m'envahit parce que j'ignore la raison de son départ et qu'à cet instant, j'imagine le pire.

Qu'est-ce qu'il a fait ?!
 
—  Et... ?
 
—  Lando a eu des problèmes et l'équipe a découvert que ce dernier était... différent de nous sur un terme sentimental. Des rumeurs d'homosexualité ont parcouru les couloirs. Son équipe l'a très mal pris, coach compris.
 
Je reste sans voix.
 
—  Est-ce que tu savais tout ça ?
 
Je secoue la tête, non, j'ignorais. J'ignorais que c'était réellement ça la raison de son départ. Je savais que ça devait être grave, important, je sentais venir la merde, mais je n'imaginais pas... Je serre les poings, et tente de rester impassible.
 
—  Ceci dit, en étant votre coach, ce que vous faites, mes joueurs, au lit, j'en ai rien à foutre. C'est ce qui se passe sur le terrain qui me préoccupe le plus. Savoir que toi Carlos Sainz, tu es le mec qui s'est tapé le plus de femmes dans cette ville ou que Fernando est le mari le plus infidèle, je m'en fiche. Comme je me moque d'apprendre que parmi nous, nous avons un joueur qui aime les hommes. Ça ne me pose aucun problème.
 
Il me fixe et attend que je dise quelque chose, mais les mots ne sortent pas, je ne peux pas parler, je suis... figé, dans la colère, la douleur de savoir ce qui va se produire, dans la rage envers mon amant
 
—  Par contre, reprends C, et je sais déjà que les rumeurs vont bon train, je sais que certains de nos joueurs ont déjà parlé à des milanais pour savoir, ils sont au courant. Le problème que je rencontre aujourd'hui est que j'ignore qui c'est. Alors j'aimerais que tu trouves ceux qui savent et que tu leur demandes de se taire. Je refuse d'entendre une quelconque remarque homophobe dans mes vestiaires. Ce que vous faites en privé ne nous regarde pas, personne n'a à juger son coéquipier. Je ne veux pas, de plus, avoir une mauvaise ambiance dans mon club.
 
Je hoche la tête.
 
—  As-tu un problème avec ce que je viens de t'apprendre ? As-tu une quelconque gêne à partager ton vestiaire avec quelqu'un qui est différent ?
 
Je retrouve ma voix, je n'aime pas le regard que me lance mon mentor.
 
—  Non, coach, bien sûr que non, je...
 
J'aurais envie de lui dire : « Non, coach, ça ne me pose aucun problème parce que je suis pareil, j'aime les hommes autant que j'aime Lando, et j'ai mal à cet instant d'apprendre la vérité de la bouche d'un autre que lui ». Mal de savoir ce qu'il va vivre, mal de savoir que c'est fini parce que je ne suis pas capable d'assumer. Je me connais, je vais prendre mes distances avec Lando, je refuse d'être dans le même sac que lui, même si c'est vrai. Ma réputation avant tout... même avant celui que j'aime. Je me fais gerber avec de telles pensées, je suis un minable.