Chapitre 8

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~Lando~

 
—  Droite ou gauche ?
 
La porte claque comme un étau qui se referme sur moi. Je tente de faire bonne figure devant Carlos, mais rien qu'à l'idée de passer une nuit à côté de lui, j'en suis malade.
 
—  Comme tu veux.
 
—  J'aurais cru que t'étais du genre à avoir tes petites habitudes.
 
Carlos me sourit en s'étalant sur le lit de droite. À bien y réfléchir, j'aurais dû choisir celui-là. Il est près de la porte et en cas de trop forte envie de lui, je n'aurais qu'à faire deux pas pour sortir.
 
—  Non, je suis du genre à me mettre où il y a de la place.
 
Je lance mon sac sur le lit de gauche pendant que Carlos se redresse en riant. On se regarde un instant comme si on attendait que l'un ou l'autre prenne la parole. D'habitude, Carlos est intarissable en conneries, mais là, il ne trouve rien à dire et se contente de me regarder.

Je détourne les yeux de lui, son corps étalé sur un lit, commence me donne des idées.
Je ne suis pas au bout de mes peines. Presque deux mois qu'on se côtoie maintenant et je crois que je ne me suis jamais senti aussi bien avec quelqu'un. Je ne peux pas totalement lâcher prise, mais c'est ce qui s'en rapproche le plus.
 
—  Qu'est-ce qu'il y a, Lando ?
 
Mon capitaine vient s'asseoir sur le bord de son lit et je fais pareil sur le mien. Il n'est pas stupide, il doit bien voir que je suis stressé et pas seulement à cause du match à venir. Je lève les yeux vers lui avant de les détourner à nouveau. Son regard montre son inquiétude, je crois qu'il est temps.
 
Temps d'arrêter les conneries pour moi. Carlos est quelqu'un de génial, trop bien pour que je l'entraîne dans mes délires. Je n'en ai pas la moindre envie maintenant que je le connais. C'est quelqu'un de gentil, passionné et totalement dévoué à son équipe, c'est le mec le plus investi que je connaisse, il sait écouter et comme si ce n'était pas suffisant, il respire le sexe. J'aime être avec lui, j'aime qu'il me fasse rire et qu'il me parle de ses disques, j'aime qu'il me regarde avant qu'il ne sourie, j'aime trop ça.

C'est pour ça qu'il faut qu'on s'éloigne, c'est trop dangereux. Cette équipe, je l'aime aussi et je ne veux pas en partir et si Carlos se rend compte de l'effet qu'il me fait, je suis foutu. Il a beau être compréhensif, c'est aussi un tombeur et un pur hétéro, je doute qu'il apprécie de savoir que joue un double jeu.
 
—  Écoute, Carlos...
 
Je n'arrive même pas à aligner deux mots quand je croise à nouveau ses yeux. Ce brun, je l'imagine quand il doit jouir, lui qui est si expressif, ça doit être un spectacle merveilleux. Un que je ne connaîtrai jamais.
 
—  Lando, si tu t'inquiètes à cause du match rassure-toi, je te l'ai dit ; Cardiff est nul et...
 
—  Non, ce n'est pas le match.
 
—  Alors, quoi ?
 
Bordel, qu'est-ce que je pourrais lui dire « Carlos, on doit arrêter cette amitié entre nous parce que moi je ne veux pas que ton amitié, mais ton cul aussi. Tu m'excites comme personne et te côtoyer devient dur... dans tous les sens du terme »... Oui, comme ça, il devrait bien le prendre.

Je regarde à nouveau Carlos. Bordel, je sens la colère me gagner, elle ne me manquait pas, mais lui, ses yeux qui doutent cherchent une réponse à mon inquiétude et se demandent ce qui m'arrive m'agace, parce que je ne veux pas lâcher ce mec !
 
—  On doit gagner ce match, on doit être champion aussi sinon le coach y passe. Les dirigeants, ils veulent des résultats, on n'a pas le choix. L'argent, il n'y a que ça qui les intéressent, mais je refuse que le coach en paye le prix. On a besoin de lui, c'est... l'âme du club, C. On ne peut pas faire autrement et je ne sais pas comment on va y parvenir avec cette pression, mais...
 
—  Attends, attends, Carlos ! De quoi tu parles, là ?
 
Il passe une main dans sa crête en soufflant, j'ai l'impression de voir ses épaules se relâcher comme si ce poids lui pesait tellement qu'il en devenait trop lourd pour lui. Qu'est-ce qu'il raconte ?
 
—  C'est ce que m'a dit C avant que l'on parte. On doit avoir des résultats, cette saison. On doit avoir le titre de meilleure équipe à la mi-saison et ensuite ce sera la coupe qu'on devra gagner. Ça n'en finira pas, plus on leur en donnera et plus, ils en exigeront, mais là, le poste de C est en jeu. C'est des putains d'enfoirés !
 
Il se lève d'un bond et entame une série de pas à travers la pièce avant de reprendre, encore plus énervé.
 
—  Et tu sais ce que ça veut dire ? Ça veut dire une équipe sous pression, à cran, des blessures, une sale ambiance et à la moindre faute qui pourrait nous causer une défaite, on va s'en vouloir et...
 
Je me lève à mon tour et le saisis par les épaules pour qu'il arrête.
 
—  Carlos.
 
—  On va se le reprocher et les jeunes, ils ne vont pas supporter longtemps...
 
—  Carlos !
 
—  Quoi !?
 
Enfin, il arrête et me regarde, il a l'air complètement absent.
 
—  Arrête de te stresser comme ça. Le match de demain, on va le gagner, on sera la meilleure équipe de la mi-saison et pour le reste, laisse passer les vacances, il sera temps d'y penser après.
 
Carlos inspire et ferme les yeux un instant, je n'aime pas le voir comme ça. Mes mains glissent sur ses bras et je le sens trembler alors je m'empresse de les enlever.
 
—  Au fait, dit-il en relevant les yeux sur moi, tu ne m'as pas dit ce que tu faisais pendant les vacances.
 
Je ris en retournant à mon sac posé sur le lit où je pose mon blouson.
 
—  T'arrêtes jamais, toi.
 
—  Ça me revient, maintenant.
 
—  Je n'ai pas passé un Noël avec ma famille depuis trois ans, alors maintenant que je suis là, je vais le faire.
 
—  Tu faisais quoi pour les fêtes quand t'étais à Milan ?
 
Il a l'air de s'être calmé. Il m'étonne, j'ai bien cru qu'il allait nous faire une crise cardiaque, mais tant mieux, je le préfère comme ça, même si je comprends son emportement. Toutefois sa question m'embarrasse, je n'aime pas lui mentir, même si j'y suis forcé, ça reste désagréable.
 
—  Je ne faisais rien de spécial. Et toi, tu vas faire quoi ?
 
En réalité, je partais en vacances en Crête, là où je pouvais être tranquille et enfin être moi-même sans qu'on me juge. Je m'assois sur mon lit et me tourne vers mon capitaine qui est resté debout. Il me regarde comme s'il ne croyait pas un mot de ce que je lui disais.
 
—  Je serai avec mes parents.
 
Carlos pose son blouson puis commence à se déshabiller, alors que j'allais lui demander pourquoi il ne me parle jamais de ses parents. Mais je suis plus occupé à regarder les vêtements tombés un à un au sol, révélant son corps magnifique. Ma respiration s'accélère quand je pose les yeux sur son tatouage, son torse nu est magnifique. Habituellement, je ne le regarde pas, je fais en sorte de ne pas baisser les yeux sur lui sinon je me trahirais, mais là, il m'a pris par surprise et je suis incapable de décoller mes yeux de son corps.
 
—  Je vais prendre une douche, dit-il en se retournant vers la salle de bain avant de s'y engouffrer.
 
Bordel ! Je me laisse tomber sur le lit. Je ne vais pas tenir.
 
 
***
 
 
—  Arrête ça, Lando !
 
La lumière s'allume en même temps que je sursaute dans mon lit, Carlos me dévisage, l'air énervé, depuis son lit.
 
—  Quoi ?
 
Je ne fais rien à part me demander si je vais arriver à fermer les yeux sans penser qu'il est à un mètre de moi, son corps chaud et nu dans son lit.
 
—  Arrête de serrer ce téléphone, le bruit est agaçant.
 
Je remarque maintenant qu'il le dit que j'ai mon portable dans la main et que je le serre et desserre comme pour me retenir de le toucher lui.
 
—  Désolé, dis-je.
 
—  Qu'est-ce que t'as ? Tu stresses parce qu'elle ne t'a pas appelé ?
 
—  Qui ?
 
—  Celle qui a l'air de te mettre dans tous tes états.
 
J'inspire et me retourne vers lui en me demandant ce qui l'agace le plus, le bruit du téléphone dans ma main ou qu'il croit que j'attends le coup de fil d'une femme.
 
—  Jaloux ?
 
Carlos se redresse d'un coup, ses yeux éveillés m'envoient des éclairs, alors que son corps sort des couvertures.
 
—  Qu'est-ce que tu insinues, Lando ?
 
—  Rien, mis à part que depuis que je te connais, je ne t'ai pas vu avec une femme alors pour un tombeur comme toi, je trouve ça inquiétant. Tu te relâches, Carlos.
 
—  Va te faire foutre, Lando !
 
Il a vraiment l'air en rogne, je crois que ce n'est pas sa journée.
 
—  Carlos ?
 
—  Ouais ?
 
—  Ne te prend pas la tête pour les dirigeants, ils n'en valent pas la peine, on fonctionne très bien comme ça. Il n'y a pas de raison que ça change.
 
—  Je sais, mais je pense à C, je ne veux pas que l'équipe le perde.
 
Je comprends, le coach est un élément indispensable surtout depuis le temps qu'il est là, il connaît ses joueurs et même si parfois il est dur, c'est toujours dans notre intérêt.
 
—  Ce ne sera pas le cas, parce qu'on gagnera.
 
Carlos rit en se tournant vers moi, son bras derrière la tête, il est appuyé contre la tête de lit.
 
—  T'es sacrément optimiste pour une fois.
 
Oui, je crois surtout que je n'aime pas le voir stresser comme ça, alors tous les moyens sont bons pour retrouver le Carlos que je connais. Si en arrivant, j'avais décidé de m'éloigner de lui, je me rends compte que c'est impossible, même si ça devient dur pour moi d'être près de lui, j'aime mieux ça que de ne plus avoir cette complicité qu'il y a entre nous.

Je sais me maîtriser, enfin jusqu'à présent, j'y arrive.
 
—  J'ai connu ça en France. C'était ma première équipe après le centre de formation, les dirigeants ont voulu se débarrasser du coach après une saison médiocre. On devait remonter la pente sinon, il y passait, lui, d'autres membres du staff et certains joueurs.
 
—  Et qu'est-ce qui s'est passé ?
 
Je me redresse à mon tour. Habituellement, je dors nu, les vêtements me gênent dans mon sommeil, mais là, j'ai quand même gardé un caleçon, bien maigre défense face à mon désir.

—  Tu sais, Harry, avant j'avais tendance à très vite m'emporter et à ne pas me maîtriser quand j'étais en colère alors évidement, j'ai fait partie des joueurs dont on s'est débarrassé.
 
—  Qu'est-ce que t'as fait ?
 
—  J'ai frappé le proprio du club.
 
Parfois, on a juste l'impression d'être les pions de dirigeants qui ne cherchent qu'à s'en mettre pleins les poches et malheureusement, ils ne comprennent pas que le sport a des impératifs, s'ils veulent qu'on soit performants. Et leur faire comprendre s'avère difficile, mes poings ont parlé pour moi ce jour-là.

Carlos éclate de rire dans son lit ce qui me fait sourire.
 
—  Mais je sais une chose, Carlos, c'est qu'on est une équipe, Coach compris et tant qu'on reste soudés, on y arrivera, alors cesse de te prendre la tête et dors.
 
Carlos se lève, je le distingue à peine à la lueur de la lampe, mais j'ai déjà plein d'images de lui, emmagasinées dans ma tête et je devine parfaitement son corps dans la pénombre.
 
—  Je vais prendre une douche.
 
Il part en direction de la salle de bain, il doit avoir un truc avec les douches, c'est la troisième de la soirée, ça doit sûrement lui éclaircir les idées.

Je souffle en essayant de calmer l'érection qui commence à venir, les images de Carlos nu sous la douche dégoulinant d'eau et de mousse sur son corps musclé ne devraient pas être dans ma tête.

Je me retourne et essaye de m'endormir, mais les bruits de l'eau ne font qu'aiguiser mon désir. Je m'imagine me lever, le rejoindre sous la douche, caresser son corps ferme sous mes mains son cul parfait, sa peau douce rendue glissante par le savon et...

La porte s'ouvre et je me rends compte que je me caresse sous les draps. Bordel, il faut que j'arrête ça !

J'entends Carlos s'installer dans son lit, je dois me calmer.
 
—  Bonne nuit, Lando
 
—  Bonne nuit, Carlos.
 
Le silence retombe dans la chambre, je regrette d'avoir posé mon portable sur la table de nuit, j'aurais bien besoin de quelque chose à serrer dans mes mains, autre que ma queue qui hurle que je la soulage.

Je ferme les yeux et pense au match de demain, aux tactiques, au jeu, à la pelouse... à tout et n'importe quoi sauf à mon capitaine.

Au bout d'un moment, j'arrive enfin à me détendre et j'entends Carlos gesticuler dans son lit.

La nuit va être longue.

The Hidden Face [Carlando]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant