Chapitre 38

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~Carlos~
 
 
Voilà, c'est fait.

Je coupe le son de la télévision, même les informations sur la chaîne principale parlent de moi. C'est le scoop du mois visiblement. « Carlos Sainz, idole et homosexuel ».

J'ai pris quelques jours, je pense que j'avais besoin de rester loin d'un terrain et des visages qui me sont connus. L'incompréhension les domine tous, je comprends, apprendre que le mec que vous pensiez connaître depuis des années vous cache le secret de sa vie en se faisant passer pour ce qu'il n'est pas... je dois être un inconnu à leurs yeux à cet instant.
J'ai passé des jours enfermé chez moi, à filtrer les appels de tout le monde, ma sœur, mon coach, la plupart de mes coéquipiers et ceux de mes parents. Je refusais d'entendre leur haine au téléphone.

Je sais qu'ils sont en colère, ils ne peuvent que l'être. Apprendre en regardant la télévision, en même temps que tout le monde que leur fils aîné est gay, c'est violent. Et je ne cache pas que je n'ai pas eu la force d'écouter leurs nombreux messages sur mon répondeur, tout comme je ne l'ai jamais eu d'aller chez eux, pour leur dire clairement, en toute intimité, que je suis gay.

Pourtant, je sais que je ne pourrai pas rester dans mon appart' longtemps, ma vie ne s'arrête pas parce que j'ai avoué être homo. Ce n'est pas une tare, merde !

Je n'en sais rien, en fin de compte, je me pose beaucoup de questions, sur ce que j'ai fait, et dit, sur ce qui va se passer, se planquer ne sert à rien, mais pour l'instant, ça m'aide. Moi aussi, je dois faire une croix sur tout un passé.

Je zappe inutilement, j'ai pensé à prendre un bouquin, à me soûler la gueule en écoutant en boucle chaque disque présent dans ma bibliothèque pour oublier que c'est la merde, mais ensuite ? Rien ne changera.

Est-ce que je regrette ? Je ne sais pas encore si c'est le cas, je n'ai pas affronté le monde extérieur pour me faire une idée à ce sujet.

Je soupire en regardant qui tente de me joindre à nouveau, Blanca apparaît sur l'écran tactile, le magnifique visage de ma sœur qui d'habitude me fait sourire, me laisse indifférent à présent.

J'ai l'impression d'être vide à l'intérieur sans ce secret qui me faisait ressentir tellement de choses. Le remord, la peur, la colère et la peine ne me quittaient pas, je m'étais fait à leur présence, j'étais persuadé qu'ils allaient m'accompagner pendant un long moment, des années encore, pas qu'ils me quitteraient si vite.

En fait, je suis complètement paumé. J'ignore la réaction qu'a pu avoir mon entourage, je les ai évités par crainte. C'est le bordel total. En fin de compte, si je me suis libéré d'un lourd secret, j'ignore ce qu'il a engendré dans la vie de tous.

Ma sœur me rappelle deux fois de suite, une part d'inquiétude commence à naître en moi, généralement, elle m'appelle toutes les trois heures, et n'insiste pas si je ne décroche pas. Je termine ma bière et attrape mon portable pour décrocher lorsque j'entends quelqu'un tambouriner à ma porte.

Je me lève, je vois que ma sœur a décidé de passer à l'étape suivante : pas de nouvelle par téléphone donc, elle a dû faire le trajet pour voir si je ne m'étais pas pendu depuis l'interview. J'enfile rapidement en t-shirt, déverrouille la porte et l'ouvre tout en rassurant l'intrus qui vient déranger mon ermitage.
 
—  Blanca, ça ne pue pas la mort dans le couloir, ce qui veut dire que je suis toujours en vie, alors t'es gentille et tu...
 
Je ne termine pas ma phrase lorsque je reçois un coup de poing en pleine figure. Ouais, ce n'est pas ma sœur, elle ne sait pas utiliser ses petits poings. Je recule de quelques pas sous l'impact du geste, dès que ma vue redevient normale, je me fige en voyant qui vient de m'en coller une : mon père.
 
—  Non, mais t'es dingue ? je lui lance sur un ton mauvais.
 
Mon père me foudroie du regard, à nouveau. Il lève son poing. S'il croit que je vais le laisser me casser la gueule sans rien dire, c'est mal barré.
 
—  Papá !
 
Blanca et ma mère débarquent à leur tour dans mon appart'. Je croise le regard inquiet de ma sœur, elle a les larmes aux yeux. Celui de ma mère, c'est autre chose, du dégoût, elle me regarde comme si j'étais la pire déception de sa vie.

The Hidden Face [Carlando]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant