60.Peut-être que tout ira bien

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Rys.







Depuis qu'Ikarus Valerian avait accepté un mariage par "rachat", signifiant que le couple était autorisé à divorcer, Julia semblait encore plus joyeuse. Amarys songeait au choix de ce régime plutôt qu'à la traditionnelle union à vie optée lors des noces de Nikanor, quand la princesse déclara avec confiance devant l'autel : "Où tu es soleil, je suis lune." Ostorios Maximilian embrassa son épouse et scella l'engagement avec un anneau en argent.

Là, paré de ses atours blancs et or, il fallait l'avouer : le marié resplendissait. Pourtant, malgré l'absence de preuves concrètes, la Shulamite était certaine qu'il y avait quelque chose de sinistre caché sous l'apparence polie de Maximilian. Chaque fois que les pupilles grises se posaient sur elle, un frisson lui parcourait l'échine.

Sans personne à qui se confier sur ses soupçons, Amarys ne pouvait que contempler avec appréhension la célébration. Kallian était parti pour affaires, laissant sa nièce faire face toute seule à son mariage. Les oracles avaient parlé, la date fixée, et il n'y avait pas de retour en arrière possible. La serve avait au préalable exprimé ses inquiétudes, suppliant sa maîtresse de patienter jusqu'au retour du prince cadet, mais Julia restait résolue. Elle ne risquerait pas la colère des dieux en retardant la cérémonie.

— Peut-être que c'est pour le mieux, avait-elle dit à Rys. Mon oncle a déjà assisté à mon premier mariage, et je doute qu'il trouve celui-ci plus intéressant.

Les préparatifs se déroulèrent sans accroc, ce qui remit en question les doutes sur Maximilian. Des heures passaient en longue conversation entre Ikarus et lui, explorant les subtilités du commerce extérieur ainsi que de la politique. Étonnamment, leurs opinions concordaient sur presque tous les sujets. Bérène se trouvait captivée par le charme de son futur gendre. Même les esclaves de la maison croyaient que les déités avaient accordé leur faveur à Julia, car Maximilian cochait toutes les cases de l'amoureux transi. L'avenir semblait prometteur, malgré l'absence de Kallian. Hélas, en dépit du vernis des bonnes manières, la vilaine intuition persistait.

Le matin des noces, une excitation nerveuse emplit Julia, déterminée à paraître plus resplendissante que jamais. Amarys consacra une éternité à brosser, boucler, tresser, défaire, recommencer, orner de perles les mèches rousses jusqu'à ce qu'elles deviennent une coiffure au style complexe. La robe de mariage, tissée dans la plus pure flanelle immaculée, enveloppait gracieusement les courbes généreuses, tandis qu'une ceinture en laine, attachée en "noeud de force" pour porter chance, entourait la taille délicate. Avec le plus grand soin, Rys glissa les sandales dorées aux pieds de sa maîtresse.

— J'ai l'impression de contempler la déesse Emmesis, chuchota Bérène, les yeux pleins de fierté.

Prenant la main de sa fille, elle s'assit à côté d'elle sur le lit.

— As-tu peur, ma chérie ?

— Non, Mère, répondit Julia, amusée. Mon cœur aspire à Ostorios, un désir si intense qu'il en est presque insupportable !

D'un geste chargé de tendresse, Bérène ajusta le voile d'or sur la tête de Julia.

— Que les dieux te donnent le don de la progéniture.

— Oh, Mère, je t'en prie ! Que les dieux retardent une telle bénédiction. Je suis encore trop jeune pour être accablée par les responsabilités de la maternité.

Amarys resta en arrière de la congrégation dans le temple d'Ops. Les cris stridents du cochon transpercèrent les murs alors qu'il était amené de force vers l'autel. Sa lutte frénétique s'intensifia quand sa gorge fut impitoyablement tranchée, le pourpre se déversant à flot sur le marbre en guise d'offrande sacrificielle pour les jeunes mariés.

Une Voix dans le ventOù les histoires vivent. Découvrez maintenant