71. La déesse de la nuit

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Rys.





En fin d'après-midi, Amarys aidait Julia à se préparer pour sa soirée, quand Ostorios fit irruption dans ses appartements.

— Si tu as assez de temps à consacrer à Olympias, tu peux m'accorder quelques heures ce soir ! Le Général Aniketos se sentira insulté si tu n'assistes pas à la célébration de son anniversaire.

La princesse, assise devant son miroir, surveillait l'élaboration de sa coiffure, feignant l'indifférence face à la colère de son mari. Seule la rigidité de son dos répondait aux injonctions.

— Je me fiche qu'Aniketos soit insulté. Trouve l'excuse que tu veux, Ostorios. Shiva m'a invité à assister à une pièce de théâtre.

—  Que Shiva se noie au fond des puits de Zagreus ! Je ne t'ai pas demandé grand-chose ces derniers temps ! J'ai besoin de toi ce soir !

Son Altesse toisa le reflet de Maximilian.

— Tu as besoin de moi ? Comme c'est exquis.

Gonflée de mépris, Julia se retourna avec une grâce étudiée, les mains légèrement croisées sur les genoux.

— Pourquoi ce soir, Ostorios ?

— Aniketos t'admire, balbutia-t-il en jetant l'œil au loin. C'est un de mes associés. Cela ne ferait pas de mal de lui offrir une risette, ou un badinage inoffensif à l'occasion.

Il se servit du vin.

La princesse montra les dents en une parodie de sourire, s'amusant de son tourment. Son époux passait pour un imbécile devant elle. Qu'il bouille dans son propre sang, devait-elle penser.

— Je n'accepterai pas que cet immonde crétin me tripote parce que tu lui dois de l'argent.

— Tu m'as espionné ?

Ostorios passa nerveusement la main dans sa tignasse. Ses phalanges blanchirent sur le gobelet.

— La suggestion de Liviclès, ma douce ?

— Je possède mon propre jugement, ce qui est, chez toi, une tare. Ton manque de chance aux courses fait désormais partie de l'incroyable. Il semble que tout Aetherna soit au courant de tes pertes, sauf moi, évidemment.

La voix de Son Altesse explosa.

—  Tu as dépensé deux mille aigles d'or en moins d'un an !

L'accusé posa lentement sa coupe.

— Laisse-nous, ordonna-t-il à Amarys d'un ton plein de venin.

Alors qu'elle se dirigeait vers la porte, sa maîtresse objecta.

— Et si je ne veux pas qu'elle parte ?

— Alors qu'elle reste et qu'elle voie ce que je vais lui faire.

Julia lui fit signe de partir.

— Attends à l'extérieur. Je te convoquerai sous peu.

Rys referma doucement la porte derrière elle, reconnaissante que dame Maximilian n'ait pas davantage testé la patience de son conjoint. Jusqu'où pouvait s'étendre sa brutalité ? Dans le couloir, on entendait distinctement leurs voix furieuses.

— Puisque tu es si bien informée, Julia, tu comprendras pourquoi ta présence s'avère primordiale !

— Qu'Aniketos aille aux enfers ! Là où devrait se trouver ton cœur !

Une Voix dans le ventOù les histoires vivent. Découvrez maintenant