58. Les vieilles outres et le vin neuf

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Oldric.






Ils suivirent un passage qui les conduisit à une vaste cour entourée d'immeubles d'habitation, puis revinrent à l'arrière de l'auberge. L'entrée était barricadée et les volets bien fermés. Des morceaux de bois jonchaient la rue. Bammon frappa violemment à la porte.

- Allez-vous-en ! tonna une voix masculine venant de l'intérieur. Je vous l'ai déjà dit, l'Ours n'est pas là ! Rentrez chez vous !

- C'est Bammon, imbécile. Ouvre la porte.

Dès qu'Oldric entendit le verrou se retirer et le loquet se soulever, il pénétra de force dans les locaux.

- Tu me dois trente aigles d'argent pour avoir utilisé mon nom au-dessus de ton enseigne ! cracha-t-il en direction de l'aubergiste.

- Du calme, répliqua Pugnax, imperturbable. Vous recevrez ce que j'ai promis.

La robustesse du type impressionnait ; il possédait la même taille que Bammon, dépassant les six pieds, avec une poitrine et des bras massifs. Ses cheveux étaient gris et coupés courts. Au-dessus de sa vieille tunique verte pendait un rectangle en ivoire gravé d'or, symbole de son statut d'esclave affranchi. Il sourit à Oldric, révélant des espaces où plusieurs dents étaient ébréchées ou complètement cassées.

- Tu aurais dû amener plus de gardes, fit remarquer l'aubergiste. Heureusement que notre bel ours court vite, n'est-ce pas, mon vieil ami ?

L'instructeur éclata de rire.

- Je ne l'ai jamais vu détaler avec autant d'aplomb !

- Asseyez-vous, dit Pugnax, d'un ton qui ressemblait plus à un ordre qu'à une invitation.

Bammon s'installa à une table en bois usée, tandis que Pugnax se dirigeait vers le comptoir pour servir les boissons. L'aubergiste orienta Oldric vers le centre de la pièce, mais l'Estanien préféra s'asseoir près de l'âtre, cherchant la chaleur. Il examina sa tunique déchirée.

- Tu me dois de nouveaux vêtements, grogna-t-il.

- Autre chose, Votre Seigneurie ? répliqua le tenancier en posant une chope de bière devant lui.

- Un bon repas et un lit confortable amélioreraient grandement son humeur, suggéra Bammon. Et s'il y a une femme disponible, ce sera un bonus.

- Je les ai toutes renvoyées chez elles.

Pugnax désigna des plateaux où gisaient des restes de volailles, des pommes cuites, des pois, des légumes bouillis ainsi qu'un panier de fruits.

- Le festin préparé en votre honneur, dévoré par les admirateurs de notre champion, commenta-t-il.

L'aubergiste saisit une pêche et la lança à Oldric.

- Goûtez, Votre Seigneurie. Je vous assure que ce sera encore meilleur lors de votre prochaine visite.

- Qu'est-ce qui te fait penser que je reviendrais dans ce trou à rat ?

- Tu préfères à ce point ta cellule ?

Pugnax sourit à Bammon.

- Je crois qu'il a peur de quelques bonnes femmes.

Oldric se redressa avec fureur, ce qui n'eut que pour seul effet de déclencher l'hilarité des deux autres hommes.

- Assieds-toi, ordonna l'instructeur. Pugnax s'est battu contre des hommes plus coriaces que toi avant même ta naissance.

L'aubergiste soupira et s'assit en face d'eux.

Une Voix dans le ventOù les histoires vivent. Découvrez maintenant