Rys.
— Qu'on m'apporte du vin. J'ai la gorge sèche !
Amarys faillit laisser tomber les bols d'eau et les torchons en entendant la voix de sa princesse résonner à travers la salle à manger. D'une joie contenue, ses pas rejoignirent Ikarus et Bérène. Julia s'irrita à l'approche de Bithia, qui lui apporta le bol pour se laver les mains, agita ses doigts dans tous les sens afin d'éclabousser l'esclave indésirable, puis vida la moitié de sa coupe.
— Humm, ce n'est pas aussi bon que le cru des vignobles d'Ostorios, mais c'est rafraîchissant, remarqua-t-elle avant d'en descendre le fond.
L'expression mi- outrée, mi- inquiète de sa génitrice l'amusa.
— Je ne suis plus un enfant ! Si peu de vin ne me rendra pas pompette.
Le dîner brillait par sa modestie. Eut égard à la santé du vieux prince, l'on ne servait que des repas légers : tranches de bœuf, soupe à la tomate et aux champignons, pain, raisins et agrumes, eau citronnée. L'alcool n'était désormais réservé qu'aux invités. Julia grignota la viande tout en régalant ses parents d'histoires au sujet des festins organisés par son mari.
— Ostorios a fait venir une variété de viandes et de poissons de l'Orient : chameau, crocodile, canard laqué, pieuvres et épices qui fondent sur la langue. Parfois, je mange jusqu'à en avoir l'estomac plein à craquer. Encore du vin, Bithia !
— Ta silhouette demeure néanmoins attrayante, complimenta Bérène.
— Merci, Mère.
Elle repoussa l'escalope, prit un raisin à la place, après, une autre lampée. Bithia vint récupérer les torchons humides et remplit à nouveau sa coupe.
— Rys, rassemble tes affaires. Tu rentres avec moi.
Dès que les mots quittèrent la bouche de Julia, le silence enveloppa la pièce.
— Y a-t-il un problème ? défia-t-elle.
— Laisse-nous, Amarys, dit doucement Ikarus.
— Rys, tu rentres avec moi, ordonna Julia, sa voix emplie d'autorité.
Sa tête pivota ensuite vers son père, déterminée.
— Je croyais que tu possédais bien assez de servantes, déclara le vieux prince.
— Ma chérie, intervint Bérène, prudente, pourquoi as-tu besoin d'Amarys, vu que tu en as tant d'autres ?
— Les autres ne me servent pas comme je le souhaite.
— Alors apprends-leur, commanda le paternel d'un ton sec.
Il avait remarqué l'étincelle de bonheur dans les yeux de la serve, la savait épanouie au palais. Rys observait de son côté le réconfort apporté chaque fois que sa harpe égrenait les mélodies, tous les soirs au sein du péristyle.
— Je les enseignerais s'ils avaient un peu d'intelligence, répliqua dame Maximilian. Mon époux ne se soucie que de leur apparence. La plupart s'avèrent aussi inutiles que les Xhers d'Olympias. J'ai fait fouetté une à plusieurs reprises, sans succès. Toujours trop lente. Ostorios ne voulait pas de Rys parce qu'elle est Shulamite et laide.
— Mais elle reste une Shulamite, rétorqua Ikarus.
— Elle n'a jamais été laide, ajouta Bérène.
Julia jeta un coup d'œil à sa mère.
— Vous semblez vous être beaucoup attachés.
— Qu'est-ce qu'Ostorios n'aime pas chez les Shulamites ? s'enquit Ikarus, ce qui fit immédiatement taire sa fille.
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Une Voix dans le vent
RomanceC'est l'histoire d'Amarys, surnommée Rys, une jeune chrétienne du royaume de Shulam devenue esclave de l'Empire d'Égée. Après avoir perdu sa famille, elle se retrouve servante de la princesse Julia Valerian, nièce de l'Empereur. Une relation complex...