Chapitre 20.

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Je ne peux retenir une grimace. Je ne suis donc pas la seule à avoir remarqué que Aelis semble s'être liée d'amitié avec le pirate. À mon plus grand désespoir, il en joue. Si j'étais en capacité de planter mon poignard dans son corps à cet instant, je le ferai sans hésiter. Aelis est trop pure et trop naïve. Elle ne connaît rien des hommes et de leurs vices.

– Je suis sa capitaine. Elle n'hésitera pas.

– N'oublie pas tu n'es pas en position de force. Dois-je te le rappeler ?

La lame de son poignard s'enfonce un peu plus dans mon cou. Je laisse échapper un gémissement plaintif. Avec tout le calme du monde, Whitley me pose la question suivante :

– Pourquoi veux-tu cette carte ?

– Rien qui ne te concerne.

La lame s'enlise encore de quelques millimètres. Il y a encore juste assez d'espace entre le poignard et ma gorge pour parler. Je ne peux même plus déglutir au risque de me couper. Je reconnais enfin le Whitley cruel dont parlent les légendes. Je chuchote :

– Je te l'ai déjà dit ! Je souhaite traverser les brumes d'ombre et trouver le trésor d'Aëloria.

Sa bouche s'entrouvre et ses pupilles élargies me regardent d'un drôle d'air.

– Ce que tu m'as dit ce jour-là, ce n'était pas une plaisanterie ?

– Bien sûr que non ! J'étais très sérieuse.

– C'est une légende, il n'y a aucune certitude que le trésor existe vraiment.

– Tu remettrais en cause la parole de la déesse ? La même qui, il a des décennies, a choisi ta lignée pour établir la royauté pirate et vaincre L'Ordre des Vents ?

Son silence est lourd. Le pirate m'observe comme si je venais de perdre la raison.

– On parle d'un trésor. Le plus gros qui n'ait jamais existé. Un cadeau de la déesse elle-même pour les hommes. Pour les féliciter d'avoir braver le danger. Il est d'une valeur inestimable et-

– Incommensurable. Je connais la légende. Mon père y a consacré toute sa vie.

Son ton est accusateur, rempli de reproches. Je suis au courant de cette histoire, tout le monde l'est. L'ancien roi des pirates, son père, Thaldrim Whitley était obsédé à l'idée de trouver ce trésor. Il n'a jamais abandonné mais il est mort avant de le découvrir et de s'en emparer. Personne ne connaît les raisons de son décès. Certains disent qu'il est mort de vieillesse, d'autres qu'il est mort au combat. Les plus spéculateurs pensent qu'il est encore vivant.

Je me demande si Thaldrim a été un bon père pour son fils. On disait de lui que c'était un homme barbare mais qui a toujours chéri les gens qu'il aimait. Son équipage, sa femme, son fils unique. D'un oeil mauvais je rétorque :

– Et alors ? Ce n'est pas parce qu'il a échoué que j'échouerai moi aussi.

Nous sommes si proches l'un de l'autre que je peux voir tous les petits détails de son visage : la cicatrice sur son sourcil droit, ses longs cils noirs, son nez aquilin. Ma détermination semble le faire sourire.

– J'établis les règles. Tu me donnes la pierre de lune et tu peux te lancer dans cette aventure grâce à ma carte.

– Et bien voilà ! C'est pas si dur !

Je me surprends à lui sourire de toutes mes dents. Nous avons enfin trouvé un arrangement après tant de menaces de mort. Le soulagement s'empare de mon corps, je me sens plus légère. Il me sourit en retour.

– Je te suivrai, m'avoue-t-il.

– Pardon ?

– Nos deux navires vogueront ensemble. Si tu veux cette carte, tu vas devoir collaborer.

Mon corps vient de supporter une implosion de joie, tout de suite gêler par la contrepartie du pirate. J'ai envie de lui hurler au visage qu'il aille au diable mais la dague m'en empêche. Je dois prendre sur moi au risque de me vider de mon sang d'ici quelques minutes. Je pensais être enfin libérée de la piraterie. Quelle désillusion. Qu'est-ce que je hais son air arrogant. Je n'ai qu'une seule envie c'est de pouvoir lui faire regretter son insolence.

– Je refuse.

– Tu es plus intelligente que ça. Réfléchis...À l'heure actuelle c'est la plus belle option qui s'offre à toi.

– Je...

Le début de ma phrase reste en suspens. Un moment de silence flotte dans la cabine. La colère est passée dans son regard, laissant place à l'indifférence. Je ne sais même pas lequel des deux est le pire. Je hais cet homme. Je n'ai pas envie de faire équipe avec lui. Ce n'est pas ce qui aurait dû se passer. Récupérer la carte, se débarrasser de Whitley. Les mots tournent en boucle dans ma tête. C'était mon plan d'origine.

Je n'arrive plus à y voir clair. Sa chaleur corporelle me tranquillise, son parfum m'enivre et ses yeux m'hypnotisent. J'aimerai lui taillader le visage pour qu'il soit laid. S'il était repoussant, j'arriverais mieux à rassembler mes idées. Dès qu'il est dans les alentours, mon esprit divague et je remets ma réaction sur le compte de son charisme.

– Je garde la pierre. C'est une sécurité. Quand je n'aurais plus besoin de la carte, je te donnerai la pierre sans broncher, dis-je totalement désemparée.

– Bien.

Un silence.

– Voilà qui s'apparente à un accord ?

– Ce n'est pas fini.

– Encore ?! m'exclame-je.

Le métal froid s'enfonce de nouveau et cette fois la lame m'empêche de respirer. Je suis contrainte de prendre une dernière respiration. Un seul mouvement brusque peut me faire rejoindre les cieux. Mon propre sang commence à dégouliner sur mon cou. Je n'ai pas spécialement envie de mourir ici alors je compte me montrer docile.

Il a failli mourir noyé contre le mat par ma faute, il ne fait que satisfaire sa petite vengeance personnelle. Nous savons tous les deux qu'il ne peut pas me tuer pour l'instant. Il n'a pas encore la pierre de lune. Dans un dernier souffle, je lâche :

– Je suis toute ouïe.

– Plus de liens. Je déteste être attaché, crache-t-il. Et une double ration de repas le temps de retrouver mon navire.

Ne pouvant plus être dans la capacité physique de lui répondre je cligne deux fois des yeux. Ses lèvres s'étendent dans un sourire narquois et fier. Son corps se détache du mien. J'ai enfin l'impression de respirer pour la première fois. Étourdie, je tiens à peine sur mes jambes. Whitley me laisse quelques secondes pour reprendre mes esprits.

– Et arrête de m'appeler par mon nom de famille. C'est très réducteur. Appelle-moi Nox.

Sa grande main se tend vers moi. D'une poigne que j'estime un peu faible, je réponds à son invitation. À cet instant précis, la porte s'ouvre en grand sur Aelis qui porte un fusil à l'épaule, prête à ouvrir le feu sur Nox.

𝐋𝐄 𝐌𝐎𝐍𝐃𝐄 𝐄𝐓 𝐏𝐋𝐔𝐒 𝐄𝐍𝐂𝐎𝐑𝐄 [𝑒𝑛 𝑟𝑒́𝑒́𝑐𝑟𝑖𝑡𝑢𝑟𝑒]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant