𝐋𝐄 𝐌𝐎𝐍𝐃𝐄 𝐄𝐓 𝐏𝐋𝐔𝐒 𝐄𝐍𝐂𝐎𝐑𝐄 [𝑒𝑛 𝑟𝑒́𝑒́𝑐𝑟𝑖𝑡𝑢𝑟𝑒]

Chapitre 28.

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La sorcière brise enfin le sortilège qui protège la carte et nous confie l'indice en un souffle. Je suis dans l'incapacité totale de me concentrer sur le monde qui gravier autour de moi. Une tempête d'émotions fait rage en moi. Les pirates et la sorcière discutent mais je ne suis pas en mesure de les écouter. Illu perçoit mon désarroi et me tend la main. Je m'approche sans aucune crainte à son égard. Si elle voulait m'éliminer, elle l'aurait déjà fait. Elle m'a suffisamment remuée pour que je puisse craindre une nouvelle attaque. Je place ma main en dessous de la sienne et j'attends. Une sphère blanche et nacrée, semblable à une grosse perle, vient se nicher au creux de ma paume. La froideur de l'objet me fait frissonner et détourne mon attention du bouleversement que mon corps traverse : la mélancolie, le manque, la haine.

– En cas de besoin, nous n'aurez qu'à demander mon aide.

Elle ne rajoute rien de plus et se contente de passer une main dans ses cheveux. Elle se replonge dans le grimoire posé sur son bureau. Téhanie pose une main sur mon épaule, me signifiant que nous devons partir. La sorcière a fini de marchander avec nous. Je préfère éviter de susciter sa colère donc je fais un signe de tête en guise d'approbation.

Je suis la première à franchir la seule et unique porte du minuscule chalet. Encore secouée par les événements, je ne pipe pas un mot sur le trajet du retour. Les insectes se sont remis à chanter. Leurs bourdonnements sont tonitruants. Menaçants. Ces petits êtres nous encouragent à mettre les voiles. L'île et la nature elle-même nous rejettent. Nous ne sommes plus accepter dans ce paysage.

Personne ne sait quoi dire après ce que nous venons de vivre. Nous nous contentons d'avancer le plus vite possible dans la faune. Lorsque mes bottes foulent le sable et que l'océan me fait face à perte de vue, c'est la délivrance. Un poids se retire de mes épaules. Le Red Shell est toujours là, il m'attend. Une fois arrivé aux embarcations échouées sur la plage, Nox déclare :

– Octave et moi allons vous rejoindre sur le Red Shell. On doit parler des potentialités.

J'approuve d'un mouvement de tête. Cette sorcière m'a mis si mal à l'aise que je peine à faire semblant que tout va bien. Elle m'a forcé à replonger dans des souvenirs cruels en faisant chanter une chanson qui a une immense symbolique pour moi. L'Hymne de la Liberté. Un chant traditionnel pirate qui fait les louanges de la déesse Aëloria, lui implorant sa protection et sa guidance sur les océans. Une mélodie que ma mère avait l'habitude de chantonner à longueur de journée. J'ai fini par l'apprendre en écoutant attentivement les paroles. Un jour, ma mère comprit que j'avais un don pour le chant. « Une voix de sirène » me disait-elle. Elle me demandait sans cesse de lui chanter cet hymne qui lui rappelait son amour passé. Je hais les pirates.

Le chant représente le premier sacrifice du voyage. La première épreuve.

Cela fait des années que j'attends de me lancer dans cette ultime aventure. Je prépare cette quête depuis des mois mais maintenant que je suis emportée par le courant, je ne suis plus sûre de rien. Est-ce que j'ai réellement la force d'affronter les prochaines étapes ? Est-ce que cela en vaut vraiment la peine ?